Quelqu’un vient d’oser parler, un tant soit peu, de ce qui s’est passé en cette fameuse et historique journée du 14 janvier 2011. Sans aller au fond des détails, Kamel Morjane, leader du parti l’Initiative (El Moubadara), a indiqué que le peuple tunisien a le droit de savoir ce qui s’est passé ce jour là et que la vérité ne peut être faite que si toutes les parties prenantes se réunissent et racontent leurs version des faits.

En effet, en réponse à une question de Businessnews et parlant du peu de choses qu’il sait ou se limitant à ce qu’il a voulu dire, il a précisé que la journée a été normale jusqu’à 13h30 où il a constaté que le ministère des Affaires étrangères était sans défense, les gardes n’étant plus à leurs postes. Il a appelé le ministre de l’Intérieur, le ministre de la Défense et le général Rachid Ammar pour leur annoncer les faits avant d’appeler, finalement, Zine El Abidine Ben Ali à 14h30 pour le prévenir. Ce dernier lui répond : «ça s’aggrave, je m’en occupe». Aux alentours de 15h, « Rachid Ammar était aux commandes de la salle des opérations au ministère de l’Intérieur », conclut-il son récit.
Autrement dit, l’armée avait pris les choses en mains pour commander le pays, faire accélérer l’aboutissement de la révolution et éviter, probablement, à la Tunisie des journées sombres à l’issue imprévisible. Et il n’est pas à écarter qu’on aurait été, jusqu’aujourd’hui dans l’état où se trouvent encore le Yémen et la Syrie. Nous préférons ne pas y penser.
Toujours est-il que, finalement, aussi bien en Tunisie qu’en Egypte, par la suite, les armées dans chacun des deux pays, républicaines et soucieuses de la légalité, auront évité aux deux peuples tunisien et égyptien, le pire.

Cette révélation de taille a été faite, donc, par M. Morjane , invité d’honneur du Centre des jeunes dirigeants d’entreprise qui, en collaboration avec la KAS (Konrad Adenauer stiftung), a organisé le neuvième Round de la série des Rounds CJD -Partis politiques, en ce samedi 2 juillet 2011.
Le leader d’El Moubadara, a profité de cette opportunité pour présenter les idées forces de son parti qui reposent sur les fondements de la révolution et des principes pour lesquelles elle a eu lieu notamment celle d’entreprendre des réformes.
Concernant la méthodologie, Kamel Morjane a précisé que son parti est centriste, démocratique et veut instaurer les principes de la modération et de l’ouverture, où la place est ouverte pour toutes les sensibilités politiques et où seul le vote décide de la position qui sera adoptée par le parti.
L’Initiative a plusieurs objectifs dont la préservation de l’indépendance du pays, la consécration de la souveraineté du peuple et l’ancrage des valeurs de la modernité et de la république, etc. Il est pour la décentralisation du pouvoir notamment avec la création de 5 districts économiques dotés de l'autonomie de décision.

Kamel Morjane a précisé qu’il faut trouver un équilibre entre l’individu et la société ainsi qu’entre l’intérêt privé et celui public. Il a souligné l’importance que la Tunisie respecte ses engagements à l’échelle internationale. Il a également mis en relief la nécessité de la mise en place réelle du Maghreb arabe car la non réalisation de cette coopération intermaghrébine fait perdre à chaque pays de l’union 2% de PIB par an.
L’Initiative préconise un modèle économique libéral qui défend la propriété privée et encourage l'initiative privée ainsi que l'investissement, public ou privé, le tout supervisé par l'Etat qui joue le rôle de régulateur et d’accompagnateur notamment en menant des études ou en recherchant des nouveaux marchés. Il vise, à travers son programme économique, à atteindre un taux de croissance à 2 chiffres, afin de garantir l'emploi aux nouveaux arrivants sur le marché de l'emploi. Il, grâce à ce programme, atteindre en 2012 une croissance de 9,5% pour répondre aux demandes d’emplois.

Concernant le volet social, le parti veut réduire les distorsions entre les régions et entre les individus. Il veut éradiquer la pauvreté du pays : un taux de 3,8% d’extrême pauvreté (moins de 400 dinars par an par individu) est inacceptable et il va tout faire pour que seule une classe moyenne demeure dans le pays, donc soit un revenu moyen de 5.600 dinars par an par individu.
A propos du gouvernement de transition, M. Morjane a indiqué qu’il est vital pour le pays en l‘absence de constitution de collaborer avec le gouvernement et que toute les parties prenantes notamment "El Moubadara" de collaborer ensemble pour l’intérêt du pays et afin de «garantir son avenir».
Concernant la constituante, il aurait aimé passer directement à un référendum sur la constitution de 1959. Mais puisque le projet est déjà en route, le parti ne peut qu’y adhérer et y participer.
Concernant ce qui c’est passé le dimanche 26 juin 2011 à l’Afric’Art, Kamel Morjane s’est dit sidéré en entendant dire qu’il s’agissait d’ex-RCDistes : «je dis, je rêve !».

Interrogé sur l’armée et ses moyens limités et pourquoi il n’a rien fait lors de son mandat au ministère de la Défense, M. Morjane a indiqué qu’il a fait de son mieux vu les moyens dont il disposait (4,5% du budget de l’Etat) précisant qu’il s’agissait d’un choix stratégique fait par Habib Bourguiba depuis l’indépendance pour favoriser d’autres secteurs tels que l’enseignement auquel on a consacré 25% du budget de l’Etat.
Interrogé par Business News, également, sur le nombre de ses adhérents et sur son financement, le leader de l’Initiative a précisé que son parti réunissait quelques dizaines de milliers d’adhérents de tous les gouvernorats. Le budget se décidera en fonction des objectifs à réaliser, donc il est à variante flexible.

Kamel Morjane a indiqué, par ailleurs, que si les intérêts de son parti résident dans sa démission, il le ferait. Il a exprimé le souhait de voir son parti évoluer sur la base de ses actions et prises de position, en évitant les procès d'intention.