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Chroniques
C’est la femme qui a fait monter Béji et c’est elle qui le sauvera (ou pas)
06/08/2018 | 16:00
8 min

 

Lundi prochain, cela fera un an que le président de la République Béji Caïd Essebsi a décrété la mise en place d’une commission législative destinée à élaborer un rapport sur la question des libertés individuelles et de l’égalité hommes/femmes en Tunisie. La Colibe est créée et elle sera présidée par la militante et députée, Bochra Belhaj Hmida. C’était le 13 août 2017, date de la célébration de la Fête de la Femme en Tunisie et date de la promulgation du Code du statut personnel. Ce jour-là, Béji Caïd Essebsi a appelé à la révision de la circulaire interdisant aux Tunisiennes d'épouser des non musulmans. La fameuse circulaire N°216 du 5 novembre 1973. Un mois après, le 14 septembre 2017, et suite à une correspondance officielle du chef du  gouvernement, le ministre de la Justice Ghazi Jeribi émet une circulaire rappelant que la circulaire numéro 216 est contraire aux articles 21 et 41 de la Constitution tunisienne et contraire aux accords internationaux signés par l’Etat tunisien. Désormais, les Tunisiennes peuvent se marier avec des étrangers non-musulmans. Dans les faits, plusieurs maires et huissiers notaires refusent l’application de cette circulaire qu’ils jugent contraire aux préceptes de l’islam, mais Béji Caïd Essebsi, Youssef Chahed et Ghazi Jeribi ont eu le mérite d’imposer par la loi une circulaire que ces maires finiront tôt ou tard par appliquer.

Quant à la Colibe, et en dépit de sa composition hétérogène (qui va de l’islamiste refoulé jusqu’au mégalomane affiché), son rapport fut prêt en un temps relativement record. Le 20 février, Bochra Belhaj Hmida aurait pu présenter son rapport au président de la République. Pour causes de crises politiques successives, et à cause des élections municipales, elle ne le fera que le 20 juin. Le rapport semble être très polémique et ses incendiaires lui attribuent tout et n’importe quoi, notamment ceux qui ne l’ont jamais lu. Si vous en faites partie, merci de cliquer ici pour télécharger le rapport de la Colibe.

 

Depuis le 20 juin, Bochra Belhaj Hmida ne cesse de recevoir des coups durs de la part des islamistes, des conservateurs, des ignares et des autoproclamés avocats de Dieu et de l’islam. La riposte intégriste s’est bien organisée. On touche à sa personne, à son honneur, à sa famille, à sa foi, à tout ! On l’accuse de chercher à modifier les préceptes de l’islam et d’imposer des lois contraires aux textes divins.

La dame a beau expliquer que son rapport n’a aucune force de loi et que c’est au Parlement de décider, elle a beau inviter ses détracteurs à le lire et à constater d’eux-mêmes qu’il ne touche aucunement aux préceptes de l’islam, rien à faire ! Quand on est un inculte-paresseux, on attaque d’abord, on lit après, si jamais on voudrait bien lire. Pourtant, le premier mot du Coran est bel et bien « lis !» (Iqrâ !).

Ces autoproclamés avocats de Dieu, et notamment les politiques parmi eux, jouent totalement aux hypocrites car ils feignent d’oublier que la Tunisie a des dizaines de textes de loi contraires à la chariâa sans que cela ne les ébranle spécialement, comme je l’ai indiqué il y a à peine un mois dans cette même rubrique à propos de ce même sujet. Ils ne veulent pas des textes de cette Colibe et veulent la chariâa en Tunisie, mais ils ne sont pas spécialement agacés par l’absence (depuis des lustres) des pendaisons sur les places publiques, des mains coupées ou encore de l’interdiction totale de la polygamie. Dernier en date à réagir, le rigolo Hechmi Hamdi qui a juré fidélité et loyauté à sa Reine d’Angleterre qui lui a accordé la citoyenneté britannique. Il ne trouve aucun mal en cela et encore moins à vivre dans un pays qui respecte toutes les croyances, mais il a du mal à accepter la même chose pour les Tunisiens. A Londres où il vit (dans un ghetto à vrai dire), il respecte totalement les lois en vigueur, mais en Tunisie il n’hésite pas à bloquer la circulation des personnes en imposant une prière en pleine rue. L’islam, en théorie, exige la propreté en tout, mais en pratique Hechmi Hamdi n’hésite pas à prier directement sur un trottoir sale.

Comme Hechmi Hamdi, il y a des milliers d’hypocrites qui attaquent la Colibe et Bochra Belhaj Hmida, juste pour des raisons purement politiques ou mercantiles.

 

Face à ces politiques qui utilisent l’islam et manipulent l’opinion pour servir leurs propres causes, il y a quasiment le vide.

Derrière Bochra, ceux qui théoriquement croient et épousent son projet, il y a quasiment le vide. Les gauchistes sont en vacances, les militants des Droits de l’Homme n’ont pas reçu l’ordre (et le chèque qui va avec) des maisons-mères européennes et américaines de leurs ONG et la société civile est dispersée et ne sait pas s’organiser. L’opposition ne veut surtout pas se mouiller, car il y a tout à perdre et rien à gagner en défendant Bochra Belhaj Hmida. Les grandes causes et les belles paroles glorieuses, on ne s’en rappelle que lorsqu’il s’agit de taper sur Béji Caïd Essebsi et Youssef Chahed. Face aux libertés des Tunisiens et des Tunisiennes piétinées par les lois moyenâgeuses inspirées de la chariâa, Samia Abbou, Imed Daïmi et Moncef Marzouki préfèrent jouer aux autruches.

De toute façon, nous n’avons pas voté pour eux, ils n’ont pas de comptes à nous rendre, mais Béji Caïd Essebsi oui !

Qu’a fait le président de la République élu au suffrage universel pour la Colibe ? Rien ! Il est fort probable qu’il va réagir à ce sujet lundi prochain, mais en attendant, il laisse Bochra et les autres membres de la Colibe livrés à eux-mêmes face aux hyènes et marchands de la religion.

Béji Caïd Essebsi préfère s’occuper de Nidaa et de son fils plutôt que de défendre Bochra et son rapport. Ses conseillers sont occupés à attaquer, dans les coulisses, le chef du gouvernement et les médias plutôt que de défendre une commission créée par le président de la République. Son parti Nidaa est occupé à mobiliser les mercenaires pour attaquer le gouvernement et les leaders d’opinion plutôt qu’à mobiliser les militants pour contrer les aficionados de Hechmi Hamdi and co.

Dans son interview tronquée sur Nessma du 16 juillet, Béji Caïd Essebsi n’a pas dit un mot sur la Colibe et la polémique qui en découle. Il a préféré frapper Youssef Chahed plutôt que de titiller ceux qui tirent la Tunisie vers le Moyen-âge. Dans son discours du 31 juillet à la clôture de la conférence annuelle des chefs de missions diplomatiques et des consulats, il lui lance même des petites phrases en rappelant qu’un homme d’Etat se doit de penser aux générations futures, alors qu’un homme politique ne se préoccupe que des prochaines élections. C’était la réponse du berger à la bergère, puisque précédemment Youssef Chahed lui a lancé une petite phrase en lui rappelant ses propos de « la patrie avant le parti ». Voilà où en est le président de la République ! Il dit penser à la génération future, mais il pense plutôt à la génération future de sa propre descendance. Il pense à sa petite famille et non à la grande famille d’hommes et femmes qui l’ont élu. Sa priorité n’est pas le rapport de la Colibe, mais comment ouvrir la voie à Hafedh Caïd Essebsi et son entourage d’opportunistes de Nidaa.

 

Béji Caïd Essebsi a une formidable occasion d’entrer dans l’Histoire et d’écrire son nom en lettres d’or. C’était l’objet même de la chronique de la semaine dernière. Son initiative du 13 août 2017 relative au mariage des Tunisiennes avec des étrangers entre dans ce cadre et correspond parfaitement aux promesses électorales qu’il a formulées à son million d’électrices. C’est grâce à lui aussi que les mères tunisiennes peuvent voyager avec leurs enfants sans une autorisation paternelle. A quel moment précis de l’Histoire s’est-il arrêté de défendre et d’écouter les Tunisiennes et à n’accorder son attention qu’à sa petite famille ? On l’ignore, mais les faits sont là et ils ne sont pas en sa faveur. Bochra Belhaj Hmida est seule face aux hyènes. « On veut abrutir les gens mais je ne laisserai pas faire ! », dit-elle. Mais aussi forte soit-elle, que peut-elle faire toute seule, sans un véritable appareil mobilisateur de foules avec elle ?

Il y a quelques jours, la présidence appelait un à un les députés Nidaa pour les pousser à contrer Youssef Chahed. Pourquoi ne les a-t-elle pas appelés pour descendre dans la rue et aller discuter et débattre un à un avec les fans de Hechmi Hamdi pour ne pas laisser « ce sujet de sa majesté » abrutir les Tunisiens ?

Depuis quelques mois, on ne reconnait plus Béji Caïd Essebsi, celui qui a été élu grâce, par et pour les femmes.

Lundi prochain, il a une occasion historique de rattraper ses errements passés, en mettant tout son poids au profit du rapport de la Colibe. Un rapport qui doit être « promulgué » en entier et non saucissonné comme voudraient le faire plusieurs et comme cela a été le cas avec la loi de la réconciliation. Un homme d’Etat pense aux générations futures et le rapport de la Colibe doit être, dans son intégralité, une loi créée pour les générations futures, comme l’a été le CSP en son temps !  

Si Béji Caïd Essebsi consacre toute son énergie pour cet objectif, il aura été conséquent avec lui-même et tenu la promesse donnée à ses électrices. Il sera sauvé par cette même femme qui l’a nommé à Carthage. S’il continue à s’occuper de son fils, il sera « enterré » par cette même femme, parce qu’il l’a déçue. Il aura été cet homme politique qui pense à la prochaine élection de son fils, plutôt que cet homme d’Etat qui pense aux générations futures. 

06/08/2018 | 16:00
8 min
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Commentaires (20)

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Amilcar
| 07-08-2018 18:05
Bce aurait entube la femme et tous les Tunisiens Normaux? retour de la femme Tunisienne a la case départ?
Et le colibe, ce n' est que du cinéma pour faire paraître Bce, progressiste et non assujetti aux islamo-fascistes?
C' est très plausible et plus que probable vu qu' il ( Bce) n' en fait pas plus pour affirmer sa bonne foi et sonner un coups de pouce en faveur de ses mesures progressistes encore au stade de gestation ..

C' est machiavélique de sa part, surtout en calculant que le.colibe ne passerai pas à l' ARP, n' est ce pas? Vu la domination des islamo-fascistes, n ' est ce pas M r le président?

Pour ce qui est de l' interdiction de mariage de la Tunisienne ( présumée de facto)avec un étranger non musulman., et bien elle renonce à la religion musulmane tout simplement

Ce n' est pas une grosse perte compte tenu que cette religion ,.. Plutôt Secte mondiale n' est que l' oeuvre d' humains en déconnexion avec la réalité.. Et vu l' apport négatif que cette Secte religieuse engendre sue le.monde

Puis si cela est insuffisant inclure la liberté de conscience inscrite dans notre merveilleuse constipation et le tour est joué



LARIO
| 07-08-2018 16:25
C'est la femme qui a choisi "BAJBOUJ", et c'est elle qui a été roulée ,humiliée, oubliée, crevée , et c'est elle, qu'elle a déclaré en sa présence l'envie du gouter la viande méme une fois par mois, et c'est elle , qu'elle a terminé ses études supérieures et elle est devenue une bergére ou une bosseuse du lever du jour au crépuscule pour travailler la terre, et c'est elle qui se léve à l'aube et marcher à pieds des kilométres pour arriver à temps au champ ou à l'usine, ect... ect ........Aux élections municipales , le remords l'a désespérée, et en 2019 on devra lui éviter le désistement, et l' intention de mettre tous les partis dans le méme sac. Les partis et les indépendants dans l'opposition doivent tenir compte de cette éventualité, leur devoir envers notre chére TUNISIE est DE BOUGER LE ***, et de se déplacer partout où la femme se trouve , d'éveiller sa conscience et de comprendre sa révolte , et l'aider à surmonter sonj indignation, et de gagner sa confiance en respectant sa dignité et en sachant de lui étre sincére et réaliste

DHEJ
| 07-08-2018 11:44
C'est bien d'avoir lu et commenté la démonstration de JAMAL toutefois il me semble que des erreurs sont commises dans le com.

La Tunisie étant un Etat Civil applique les lois de la république. Pour le cas du mariage alors c'est le code du statut personnel.

Or ce code comprend des articles qui nécessite la vérification que les futurs époux sont " fi hillin minal mani-i achar-iya"! Les notaires ne vont pas contracter un mariage incestueux!

Et la porte fermée a été ouverte par la circulaire de 73 pour que la fille tunisienne qui insiste à se marier en Tunisie, de dire que son époux est musulman.


En annulant la circulaire par le débile BCE et ses "suiveurs", alors retours à la case de départ et tout contrat rédigé après cette annulation et non avant est "GHAYR CHR-I"!!!

J.trad
| 07-08-2018 11:36
Ce n'est pas le terme qu'il faut ,un fillipin ,par exemple est un étranger ,ta fille peut l'épouser ,s'il n'est pas (mouchrik) point à la ligne ,sauf (el mouchrikin) les dualistes ,une mouslima ,ne peut pas épouser un homme qui ne croix pas (que Allah est ahad,Samad, ) Voltaire était ( déiste) ton arrière grand mère ,avait le droit de l'épouser ,même si elle ne parlait pas français ,et si un amour réciproque ,aurait pu les lier, on peut dire pour les deux (Allah yarhamha,et yarham Voltaire
Mon arrière grqnd'mère aussi ,aurait bien pu épouser celui qui a stoppé les idiotes guerres de religions ,en faisant éclater la révolution française et levé l'étendard du (déisme) pour éteindre les feux des rancunes des chamaillent à propos de Jésus et Moïse ,issus d'ailleurs de Jacob ,des siècles avant la naissance de mouhammed ,Jacob (Israël) n'est qu'une branche du tronc commun (Ibrahim) le patriarche de l'islam ,bien que même nouh ,est qualifié mouslim ,(kountom oummatan wahidatan ,) ensuite il y a eu biffurcation ....à suivre...

Benje
| 07-08-2018 07:43
Monsieur Tazarki (Docteur c'est une habitude allemande car les francophones plusieurs fois docteur sur ce site n'utilisent pas ce titre provenant d'un diplômes ) vous écrivez à juste titre que la circulaire de 1973 qui n'autorise le mariage d'une femme tunisienne musulmane qu'après la conversion de l'époux a été annulé par le de décret de 2017 et que dans ce cas on revient au décret disposition du code personnel de 1965 qui n'autorise purement et simplement ce mariage mixte. certes c'est logique et rationnelle comme raisonnement mais ce retour en arriere signifiant que l'on revient au diopsition antérieure du code personnel qui interdit tout mariage d'une femme avec non musulman est discutable juridiquement ! '? mon avis il n'y a pas de rétroactivité en droit ce qui a été annulé (décret ou circulaire) ne peut plus être appliqué à nouveau car pa exemple les mariages entre 1973 er 2017deviennent caduques et peuvent être annulés : les dispositions du code personnel de 1965 ont été annulées en 1973 ne peuvent plus être appliquées mais je demanderai bien l'avis des juristes pas des religieux pitié
Mais d'une façon plus pratique comment peut on vérifier la religion du futur époux ou de quelqu'un c'est le prénom la nationalité la couleur de la peau et des yeux ... ou c'est laisser au choix de l'officier de l'état civil c'est du n'importe quoi c'est même une atteinte à la vie privée et du proselitisme comme ce fut le cas d'un jeune ami franco tunisien sfaxien pure souche à qui a demandé en 2014 de prouver qu'il est de religion musulmane en prononçant la chahda lors de son mariage avec une fille tunisienne ! Quel humiliation mal vécue par ce jeune
="=> J'insiste, c'est grâce à la circulaire de 1973 qu'une femme tunisienne musulmane pourrait épouser un non-musulman, si ce dernier se convertissait à l'islam. la circulaire de 1973 a neutralisé le paragraphe du code du statut personnel qui interdit catégoriquement le mariage d'une femme tunisienne musulmane à un non-musulman. "

Ali Baba au Rhum
| 06-08-2018 23:20
la Colibe, cela a été un show de prestidigitation de l'hôte de Carthage, un exercice de la main droite chargé de faire oublier ce que faisait la main gauche, en l'occurrence la dite Réconciliation Nationale; Ghannouchi n'a fait que l'y suivre en faisant élire la flamboyante nouvelle maire de Tunis. Libérer la femme ? certes, à commencer de son instrumentalisation par le politique...et médiatique.

DHEJ
| 06-08-2018 21:31
BCE est bête entube par sa conseillère aussi bête et le meilleur bête c'estle ministre de la justice...une vraie bêtise...

kameleon78
| 06-08-2018 21:25
Bravo Dr. Jamel Tazarki, votre explication est d'une clarté remarquable : BCE nous a entubés, il a entubé la femme en créant la confusion avec l'annulation d'une circulaire qui en fait remet en application le décret original qui interdisait le mariage d'une musulmane avec un non musulman (la circulaire de 1973 était un assouplissement). Cet homme Béji Caïd Essebsi nous a trompés jusqu'au bout.

HatemC
| 06-08-2018 20:36
La tunisienne n'a pas le droit de se marier avec qui elle veut ? On lui impose un mari c'est bien cela tête de noeud La tunisienne est votre objet les raclures... HC

DHEJ
| 06-08-2018 20:18
N.B est borné et ne veut rien analyser. Il veut défend "bêtement" la liberté de la femme tunisienne pour se marier avec qui elle une liberté dont le domaine d'application est à l'extérieur du segment du CODE DU STATUT PERSONNEL...


Ta démonstration est claire mais dépasse les capacités mentales de notre hôte!


Rien à espérer ni de lui ni de GHAZI JERIBI


A mettre sur la même liste...


Cordialement