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Elections : Sfax revient et elle n'est pas contente !
29/08/2014 | 1
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Elections : Sfax revient et elle n'est pas contente !
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Capitale industrielle et deuxième plus importante ville de Tunisie, Sfax ne paie pourtant pas de mine à voir son infrastructure archaïque, ses nombreuses routes non asphaltées et son statut de ville fantôme la nuit. Pourtant, c’est dans l’effervescence de cette ville que tout se joue aujourd’hui, ou se jouera plutôt lors des élections législatives du 26 octobre. Celle qui a donné un douloureux coup de pied dans le derrière des modernistes lors des élections de 2011, semble avoir bien des choses à dire aujourd’hui. Cela les politiques l’ont bien compris et misent gros sur elle. 

Dans la ville de Sfax et même ailleurs en Tunisie, on ne parle plus que de la grande surprise lancée par Ennahdha en nommant en tête de sa liste à Sfax 2 l’homme d’affaires Mohamed Frikha. Une personnalité très en vue dans le milieu des affaires aujourd’hui et porteuse de nombreux espoirs pour les habitants de la ville. Patron de la nouvelle compagnie aérienne du pays, concurrente de Tunisair, l’entrepreneur cinquantenaire est un motif de fierté pour de nombreux Sfaxiens admiratifs de cette « sucess story » locale.
Lors d’une conférence de presse du parti Ennahdha, tenue mardi 26 août à Sfax pour présenter ses têtes de liste dans la région, l’homme d’affaires a encore une fois surpris son auditoire en annonçant « réfléchir sérieusement » à une candidature à la présidentielle. Une annonce accompagnée d’avis assez mitigés dans la ville, entre ceux qui sont émoustillés à l’idée de voir « l’un des leurs » les représenter à la magistrature suprême, et d’autres, qualifiant cette décision d’ « opportuniste ». Pour l’heure, l’entrepreneur connu pour sa discrétion,  n’a pas souhaité s’attarder sur ses projets pour la ville lors de ce point de presse, mais a promis qu’il « y reviendrait prochainement ».

Force est de reconnaitre qu’aujourd’hui, Sfax a plus que jamais besoin d’un « leadership local ». Une personnalité emblématique de la ville, jouissant d’une certaine popularité auprès de ses habitants, et maitrisant parfaitement sa copie afin de comprendre les doléances de ses citoyens et de sortir la ville du carcan de la marginalisation dans lequel elle a été enfermée depuis plus de 70 ans.
En effet, chaque programme politique devra accorder la place du lion à la ville de Sfax. Jugée persona non grata par les politiques sous les deux anciennes dictatures de Bourguiba et de Ben Ali, mais aussi sous le règne de la Troïka, Sfax possède cependant un potentiel qui tarde à être exploité.
Pourtant, c’est près de 15.000 Sfaxiens qui la quittent chaque année pour s’envoler  vers des « cieux meilleurs ». Rejoignant d’autres villes, dont surtout la capitale Tunis, ils fuient un important manque de projets et un déséquilibre criard avec les autres grandes villes tunisiennes.

 « Dans notre programme, nous accordons à cette ville plus d’importance que les autres », affirme Moncef Sellami, dans une déclaration à Business News. L’homme d’affaires Sfaxien est tête de liste du parti Nidaa Tounes dans la circonscription Sfax 2. Autant dire, qu’il est le premier rival de Mohamed Frikha. Au sujet de ce dernier justement, il nous confie : « Mohamed Frikha est très peu connu à Sfax, moi-même je suis très bien placé dans la région depuis longtemps ». En effet, de plus de 20 ans son aîné, Moncef Sellami est une personnalité du football tunisien. Ancien président du CSS, il est également un entrepreneur très connu dans le monde des affaires ainsi que dans le domaine social où il entreprend plusieurs activités en faveur de la ville.
« Si je suis élu, moi-même mais aussi Nidaa Tounes, prévoyons tout un programme pour la ville de Sfax », précise Moncef Sellami. Au programme : finaliser le projet de Chott El Kerakenah ainsi que celui de Taparura, mais aussi, trouver une solution à la situation environnementale chaotique dans laquelle se trouve la ville à cause, notamment, de la pollution générée par la Société industrielle d'acide phosphorique et d'engrais (SIAP). En réalité, toutes ces solutions ont été proposées depuis des années et leur mise en place entre dans le cadre d’une politique nationale. Leur réalisation tarde, cependant, à voir le jour compte tenu d’une absence totale de volonté politique. Les prochaines élections pourraient-elles y remédier ?

A l’instar d’autres villes tunisiennes, Sfax a voté en masse pour le parti islamiste lors des élections de 2011. Aujourd’hui, la tendance semble virer de bord. C’est ce que semblent croire en tout cas les partis rivaux des islamistes dont, Nidaa Tounes. Lors du dernier meeting du parti dans la ville, certains de ses membres n’ont pu s’empêcher de laisser échapper : « Ennahdha nous a eus à Sfax [lors des élections du 23 octobre 2011] et elle ne pourra perdre les prochaines élections que grâce à Sfax ».  Bochra Bel Haj Hmida, figure du parti et aujourd’hui candidate aux législatives, déclare à Business News : « Sfax est déterminante, non seulement sur le plan économique, mais aussi politique. La ville a longtemps été marginalisée et les politiques doivent être en mesure aujourd’hui de ne plus dire aux entrepreneurs ‘’comptez sur vous-mêmes’’ mais plutôt ‘’vous pouvez compter sur nous’’ ».

Au-delà des batailles électoralistes entre les deux plus importants partis, sacrés premiers par les instituts de sondage, la centrale syndicale pourrait bien avoir son mot à dire en appelant officieusement ses troupes à aller voter massivement en faveur d’un candidat ou d’un autre. L’UGTT est une institution puissante dans la ville de Sfax. Le leader syndicaliste Farhat Hached, étant originaire de la ville et plus particulièrement de l’île de Kerkennah, les Sfaxiens restent très attachés à leur syndicat. On rappellera la manifestation massive organisée par l’UGTT le 12 janvier 2011, au centre-ville de Sfax, qui a réussi à mobiliser plusieurs dizaines de milliers de personnes appelant au départ de Ben Ali.

Si les candidatures des grosses fortunes sont critiquées aujourd’hui par certains partis tels que l’Alliance démocratique ou Al Majd, elles restent prisées par Ennahdha et Nidaa Tounes mais aussi d’autres partis tels que Afek Tounes qui vient de désigner récemment l’homme d’affaires Hafedh Zouari en tête de liste à Sousse. Force est de reconnaitre que depuis la nuit des temps, grosses fortunes et politiques ont toujours convolé en justes noces. Ce choix semble s’imposer, de l’avis de nombreux politiques, compte tenu de la situation particulière de laquelle pâtit la ville de Sfax.
Cataloguée à tort ou à raison comme ville islamiste, Sfax, conservatrice certes, cache pourtant bien son jeu. Avec son important potentiel électoral, Sfax pourrait bien changer la donne et n’a encore pas dit son dernier mot…

Synda TAJINE
29/08/2014 | 1
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