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Chroniques
Borhen – Slim : La combinaison gagnante
Par Synda Tajine
11/12/2018 | 15:59
4 min
Borhen – Slim : La combinaison gagnante

 Par Synda Tajine


L’actualité de la semaine est passionnante. Non, elle n’est pas uniquement faite de la nouvelle alliance, avec un rappeur, de la très célèbre fille d’un ancien président, ni des supposés déboires amoureux d’un animateur vedette ( !). Je ne vous parlerai pas non plus du coup de peinture et des nouveautés annoncées par un journal très célèbre et très sérieux de la place (le narcissisme a ses limites)…

L’actualité de la semaine est faite du vote de la loi de finances sous les houleuses chamailleries de l’Assemblée (nous y reviendrons prochainement) mais aussi de la sortie de prison de Borhen Bsaies et des déboires (encore) avec la justice de Slim Riahi.

 

Elle a été annoncée, puis démentie, depuis des semaines. Une grâce présidentielle exceptionnelle accordée à Borhène Bsaies. Voilà qui est (très peu) surprenant. La présidence de la République a d’abord préféré rester discrète sur la question et ne pas commenter. Finalement, Borhen Bsaies est sorti hier de prison suite à une grâce présidentielle exceptionnelle accordée à l’occasion de la journée internationale des droits de l’Homme.

Aujourd’hui, Borhen Bsaies a tenu à remercier « tous ceux qui ont concrètement participé à [sa] libération ». Premier sur la liste ? Béji Caïd Essebsi bien sûr ! Le président de la République a même reçu à Carthage ce matin le chargé des affaires politiques de Nidaa Tounes (le parti qu’il a lui-même créé et dont le fils est actuellement président du comité politique). Borhène Bsaies est condamné à deux ans de prison dans une affaire d’emplois fictifs.  Il en purge deux mois et finit par être libéré et reçu par le président de la République au profit d’une grâce présidentielle sortie de nulle part. Dame justice se retourne dans sa tombe…

 

De l’autre côté, Slim Riahi voit sa célèbre plainte classée par le Parquet militaire. Après des semaines de tergiversations au sujet d’un supposé coup d’Etat contre le pouvoir, fomenté par le pouvoir lui-même, voilà que Slim Riahi part à l’étranger et ne prend même pas la peine d’étayer ses dires auprès de la justice. Slim Riahi balance une bombe, mais prend la fuite avant d’en assumer les retombées.

Il parle d’un coup d’Etat armé, de complot contre la sûreté de l’Etat et accuse le chef du gouvernement, le chargé de communication de la Kasbah, l’ex directeur du cabinet présidentiel, un ancien dirigeant de Nidaa Tounes, ainsi que le directeur général de la sécurité présidentielle de fomenter un coup d’Etat armé puis part sans s’en expliquer davantage. Après les sollicitations du Parquet, il ne donne aucune suite pour étayer ses dires prétextant des affaires importantes qui l’en auraient empêché, et ce à deux reprises. Slim Riahi n’est évidemment pas le cerveau ce cette opération. Qui est derrière ? Hafedh Caïd Essebsi et Béji Caïd Essebsi bien sûr !

 

Cette plainte aurait pu être une aubaine pour toucher un pouvoir qu’on tente d’affaiblir. Slim Riahi, nouveau secrétaire général de Nidaa Tounes, parti en guerre contre la Kasbah, y a sauté à pieds joints sans en calculer les retombées. Dans cette manœuvre orchestrée au sommet du parti (suivez mon regard), Slim Riahi a été celui qui a porté la chose sur la scène publique en abordant ce supposé coup d’Etat sur une chaîne télévisée et en déposant une plainte auprès de la justice militaire.

Le parti qui l’avait soutenu dans sa plainte mais sans officiellement le soutenir, fait l’autruche aujourd’hui alors que Slim Riahi risque de faire l’objet de poursuites judiciaires puisqu’il n’a pas daigné présenter son témoignage et ses preuves devant la justice. Quel sérieux ont aujourd’hui cette plainte et ce supposé coup d’Etat quand bien même ils le seraient ? Quel sérieux a aujourd’hui Slim Riahi qui a été utilisé pour porter ses graves accusations? Slim Riahi, aujourd’hui secrétaire général de Nidaa Tounes, excusez du peu, va-t-il revenir pour assumer pleinement son poste…et ses accusations ?

 

Dans cette guerre déclarée entre les deux pouvoirs en place, on sacrifie Slim Riahi et on libère Borhen Bsaies. L'un est grillé, deux mois après sa nomination en tant que secrétaire général de Nidaa. L’autre, sort d'une pochette surprise compte tenu du poids et du rôle qu'il joue au sein du parti. Pour arriver à ses fins, on libère des otages, on en sacrifie d’autres et on n’hésite pas à mêler la justice à ces bas calculs politiques. Mais tout ça n’est pas très étonnant lorsque l’on se rappelle des péripéties qui ont marqué le parcours politique de Slim Riahi avant qu’il ne devienne SG de Nidaa ou qui ont ponctué celui de Borhen Bsaies pour qu’il devienne l’homme politique convoité qu’il est devenu aujourd’hui…

 

 

Par Synda Tajine
11/12/2018 | 15:59
4 min
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Commentaires (8)

Commenter

jilani
| 12-12-2018 11:20
Votre écriture est très plaisante avec ces petites phrases , suivez mon regard ..., vous dites vrai, la mafia s'est installée au plus haut sommet de l'Etat et ceci n'est pas étonnant de la part du vieux renard que ses proches l'appelait "haka l'avocat" et sont encore surpris comment il est devenu président et faire rouler plus de d'un million d'électeurs.

Mansour Lahyani
| 12-12-2018 09:57
Quant à cette saga d'un nouveau genre, de ce nabot politique qui a fait cocus un président, son fils et ses saints esprits - toute la flopée des Toubel, des Farjaoui, des Qazmaoui et de leurs semblables, tous prétendants à la direction de la politique de cette pauvre Tunisie, qui se sont divertis à applaudir l'improbable jonction d'un Riahi à la recherche dune légitimité politique et d'un Nida en perdition - elle reste à élucider, pour qu'on puisse enfin en tirer les enseignements qui s'imposent : comment un nabot politique et un galopin encore imberbe ont-ils pu circonscrire un vieux renard de la politique et le mener à sa perte politique ?
Le ci-devant BCE se souviendra longtemps de cette semaine maudite, qui lui a fait perdre un total incalculable de ses crédits politiques!

Mansour Lahyani
| 12-12-2018 09:37
"Une grâce présidentielle exceptionnelle accordée à l'occasion de la journée internationale des droits de l'Homme"... Synda, vous vous faites complice de ce navrant amalgame suggéré par une presse aux ordres, et cherchant à offrir coûte que coûte un alibi à une décision qui n'a aucune justification, et certainement pas celle de cette journée des droits de l'homme! Les droite de l'homme ne sont en rien concernés par cette affaire de droit commun d'un délinquant condamné après un procès ordinaire ! Ou alors il faudrait gracier, exceptionnellement, tous ceux qui ont été condamnés par un tribunal civil !
Hésitez-vous à condamner une décision qui violente d'une façon aussi contestable la justice ordinaire de ma Tunisie

A4
| 12-12-2018 08:49
slim a acheté sa fuite à l'ombre (ou à Londres) en cédant son "cheptel" de 15 députés à nidaa.
C'est vexant pour Monsieur Ftiti et Madame Chaouachi d'être pris pour un cheptel, mais c'est bien la vérité !

mansour
| 11-12-2018 22:10
c'est tout simplement juste et vrai de désigner Slim Riahi+Borhène Bsaies comme le mal de la politique et le fait de ne pas désigner l'organisation secrète d'Ennahdha+les document de la chambre noire que le gouvernement Ennahdha-Youssef Chahed met constamment un voile pudique pour ne pas désigner et nommer c'est étonnamment vrai également....

Cassius Clay
| 11-12-2018 20:16
C'est un peu l'histoire du bouc du rabbin...accusez quelqu'un d'un crime qu'il n'a pas commis, et il passera pour innocent , même pour des délits dont il sera l'auteur ou le responsable...grâciez en un autre , et il sera toujours un coupable. Dans cette histoire, c'est de l'alliance politique avec la Nahdha, un parti impliqué dans une haute trahison, et d'une politique économique désastreuse, qu'on veut détourner l'attention du peuple.

Tunisino
| 11-12-2018 18:48
1. La justice militaire est sous les ordres de BCE, la justice civile est sous les ordres de RG/YC. La dépendance de la justice n'est qu'un slogan pour les affaires impliquant les pouvoirs exécutif ou législatif.
2. En guerre politique, être superficiel peut ne pas être suffisant. Il faut aller en profondeur, envisager toutes les pistes possibles, et retenir les pistes plausibles.
Ce qui devient de plus en plus plausible est que BCE, Nida, Ugtt, et peut être Jebha sont entrain de pousser vers un mécontentement populaire général pour établir un nouvel équilibre politique. Ce mécontentement est alimenté par les coups de BCE contre YC et Nahda, par les grèves de l'Ugtt, par la compagne Gilets Rouges, mais aussi par YC et Nahda qui insistent à mépriser les tunisiens (comme l'a fait Macron pour les français) à travers les nominations ridicules et les mesures fiscales irrationnelles (bonjour le savoir réfléchir de YC et RG, et de leurs conseillés illuminés).

Zohra
| 11-12-2018 18:48
La passe difficile que traverse actuellement laTunisie , tant sur le plan politique qu'économique, 8 ans d'illusions, après cette merdolution la folie d'idéologie, de faillites, de drames individuels et collectifs, la corruption,... cerise sur le gâteau ce genre d'individus ya latif chou hal hala.