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Tribunes
Assez de manœuvres, place à la responsabilité !
09/06/2016 | 13:25
8 min
Assez de manœuvres, place à la responsabilité !

Par Hédi BEN ABBES*

 « Il en est alors comme de l'étisie, dont les médecins disent que, dans le principe, c'est une maladie facile à guérir, mais difficile à connaître, et qui, lorsqu'elle a fait des progrès, devient facile à connaître, mais difficile à guérir. C'est ce qui arrive dans toutes les affaires d'État : lorsqu'on prévoit le mal de loin, ce qui n'est donné qu'aux hommes doués d'une grande sagacité, on le guérit bien tôt ; mais lorsque, par défaut de lumière, on n'a su le voir que lorsqu'il frappe tous les yeux, la cure se trouve impossible » (Machiavel, Le Prince)

 

Il y a un an déjà, il m’a été donné de publier une lettre ouverte à M. Le Président de la République (La Presse, le 28 mai 2015) dans laquelle j’ai tenté, autant que faire se peut, d’attirer son attention sur la nécessité d’entreprendre des mesures nécessaires pour remédier aux désordres présents avant que la cure ne se trouve impossible. En voici quelques extraits après l’introduction d’usage :

« …M. le Président, aujourd’hui la Tunisie est à court de vision, de cap, de programme et de projets. Pendant ce temps-là nous sommes tous saisis par un désarroi dû à la perte de tout ce qui fait une nation digne de ce nom à savoir : ses repères culturels, ses valeurs, son éthique, sa cohésion, sa communauté de destin, sa foi dans le présent et l’avenir, des valeurs dont le Président de la République est non seulement garant de leur pérennisation mais aussi le rempart contre toute dérive éventuelle. Et des dérives on en a que trop d’exemples. Nul ne peut feindre d’ignorer l’axiome selon lequel là où il y a moins d’Etat prolifèrent l’arbitraire et l’anarchie. L’insécurité qui habite les rues et les esprits, la sclérose de notre administration, l’obsolescence de notre système éducatif, la déliquescence de notre système bancaire et fiscal, les inégalités qui se creusent, l’effritement des valeurs, j’en passe et des pires, sont quelques-uns des maux qui rongent notre système de gouvernement pour cause de faiblesse de l’Etat et de la puissance publique…

Il est grand temps M. Le Président, de dire la vérité au peuple et de la manière la plus transparente et la plus simple…

M. le Président… Ce dont la Tunisie a besoin aujourd’hui c’est de politique dans le sens le plus noble du terme. De ce que le père fondateur de la Tunisie moderne, le Président Habib Bourguiba avait qualifié de ciment sans lequel d’édifice de la nation ne peut tenir. La période que la Tunisie traverse aujourd’hui est politique par excellence…

C’est de courage politique dont nous avons besoin. D’abnégation et d’amour pour ce merveilleux pays qui est le nôtre dont nous avons soif, et de disponibilité, car on ne peut être disponible pour les autres que lorsqu’on est moins disponible pour soi.

M. Le Président, contrairement à ce que dit le dicton, j’affirme qu’à l’impossible nous sommes tous tenus si nous souhaitons relever le défi de la modernité et du développement à commencer par le devoir d’exemplarité. On ne fait pas de la politique pour être important, on la fait pour être utile...

"Il n’y a de vent favorable que pour celui qui sait où il va", disait Sénèque, force est de constater qu'il n'y a nul besoin de boussole quand le cap fait défaut et c’est à vous Mr Le Président de fixer ce cap et de le définir…

Vision, cap, programme, projets et méthode sont les maîtres-mots d’un mode de gouvernance dont la Tunisie de demain a grandement besoin…A moins d’un sursaut républicain de votre part et d’une mise en œuvre des prérogatives que vous confère la Constitution, je crains que Clio la muse de l’histoire ne détourne le regard de notre Tunisie et qu'avec elle ne s’évapore l’espoir de tout un peuple de sortir de sa torpeur et de son sous-développement… »

 

Hélas, trois fois hélas ! Que de temps perdu ! Après plus d’une année de tergiversation, Monsieur le Président semble, in fine, prendre la mesure de la gravité de la situation. Sa dernière manœuvre politicienne, celle du 2 juin dernier, semble, si l’on n’y prend garde, aller dans le bon sens si toutefois on ne cherche pas à user d’une bonne veille ficelle qui consiste à prendre « l’adversaire » en traître au lieu de l’affronter directement.

 

 L’appel à l’UGTT et à l’UTICA de prendre part dans un gouvernement d’union nationale témoigne d’une faiblesse tactique manifeste. Mettre l’UGTT face à deux choix négatifs n’est certainement pas une approche efficace. Soit le syndicat refuse l’offre et il est isolé, voire mis au banc des accusés. Soit alors il prend part dans le futur gouvernement et de ce fait ne sera plus en mesure de remplir son rôle syndical ne pouvant être de facto juge et partie.

 

Ce nouvel écran de fumée faussement habile vise des intérêts immédiats et ne règle en rien les multiples problèmes de notre pays. Le syndicat des travailleurs risque de se diviser et au lieu d’avoir à s’entretenir avec un seul interlocuteur, le gouvernement aura à affronter une multitude de nouveaux chefs à la tête d’une multitude de représentations syndicales. Et s’il ne se divise pas, pour pallier le risque d’être isolé, l’UGTT se radicalisera et versera dans le populisme le plus extrême pour gagner la bataille de l’opinion publique. Sans oublier l’autre hypothèse : celle de la seule participation de l’UTICA au gouvernement qui ouvrirait alors la voie à une véritable guerre des syndicats dont les conséquences seraient désastreuses pour notre pays.

 

Le courage politique consiste d’abord dans la transparence et le parler vrai en prenant l’opinion publique à témoin. On ne peut pas mélanger les genres dans une démocratie naissante. On ne peut pas brouiller les lignes de démarcation entre les pouvoirs publiques et les « partenaires sociaux ».

 

Le principe de séparation des pouvoirs au sein de l’appareil de l’Etat d’une part et la nécessité d’avoir des contre-pouvoirs représentés par la société civile dans son ensemble, est un principe fondamental de la démocratie qui ne peut être rompu de cette manière. Si l’on persiste dans cette voie, il en résultera l’affaiblissement aussi bien du pouvoir exécutif, que législatif ou encore syndical. Le fameux « checks and balances » sans lequel il n’y a ni responsabilité, ni reddition des comptes se trouvera alors bafoué. Et lorsque l’on préside à la destinée de toute une nation, il est impératif de respecter ces principes fondamentaux et d’assumer pleinement ses responsabilités.

Sur le plan politique, il est du devoir des partis majoritaires à l’ARP d’assumer pleinement leurs responsabilités. Ils ont une majorité confortable pour le faire. Quand on est incapable de gouverner, on appelle à des élections anticipées et on cherche à former une nouvelle majorité dans le strict respect de la Constitution.

 

Socialement, un dialogue national est souhaitable à condition qu’il ne déborde ni sur le politique et encore moins sur l’opérationnel (exécutif). Ce dialogue national doit avoir comme principal objet la mise en place d’un véritable programme de gouvernement proposé par les partis majoritaires et discuté par les partenaires sociaux.

 

Nidaa et Ennahdha doivent assumer leur responsabilité et gouverner comme le peuple leur a demandé de faire en les plaçant à la tête du pays. Il n’est pas sain de vouloir une nouvelle fois diluer les responsabilités pour condamner à nouveau le pays au désir d’Otium, à l’immobilisme. Les prochains enjeux électoraux ne peuvent en aucun cas justifier ce genre d’irresponsabilité.

 

Il ne s’agit pas de personne à choisir pour faire un gouvernement ni même d’un nouveau chef du gouvernement. Tant qu’on n’a pas changé de politique, de mode de gouvernance dans le cadre d’une vision et d’un programme, même les plus compétentes des personnes ne pourront sortir le pays de l’impasse où il se trouve.

 

C’est pourquoi, en toute humilité et à toutes fins utiles, je propose au Président de la République tout d’abord de faire part au peuple de sa vision : où veut-il, ainsi que sa majorité, amener le pays ? Quel modèle de société, quel modèle économique et social veulent-ils mettre en place pour les décennies à venir ? Une fois la vision et le cap sont fixés, la majorité parlementaire peut prendre l’initiative de réunir « en conclave » les meilleures compétences dont elle dispose, avec l’idée de sortir avec un programme réaliste et chiffré dans un délai ne dépassant pas les deux mois.

 

Quatre commissions ad hoc, une commission économique, une sociale, une sécuritaire et une quatrième chargée de la coordination pour donner de la cohérence et de la consistance à l’ensemble des travaux. Sur la base de ce contrat programme un choix de gouvernement parmi les deux partis majoritaires se chargera d’exécuter ce programme non sans avoir consulté au préalable et pour avis, les incontournables partenaires sociaux pour obtenir leur appui.

 

Une véritable pédagogie de communication devra être mise en place pour convaincre l’ensemble de la population de la nécessité de mettre à exécution ce programme qui, sans conteste, ne pourra que comporter quelques sacrifices et un effort collectif. Du moment où il a une visibilité sur l’avenir, le Tunisien adhérera à ce programme et une nouvelle dynamique pourra alors remettre en marche toute une nation.

Il est donc temps d’arrêter le jeu et de penser à l’enjeu. Le jeu politique est un luxe que la Tunisie ne peut se permettre. L’heure est à la responsabilité et au don de soi pour bâtir ensemble l’avenir de notre beau pays.

 

*Universitaire et dirigeant d’entreprise

  


09/06/2016 | 13:25
8 min
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Commentaires (20)

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Himar Ben Abbes
| 11-06-2016 15:49
Maître Ben Abbes ne nous déçoit pas encore par un article à rallonge où l'on dit tout et n'importe quoi. Par exemple (et il y en a pleins) il dit qu'il faut faire vite (ce qui est louable), mais non sans avoir tchatché avec toute la bande des tocards (politiques et partenaires sociaux) .... imaginez l'ambiance !
Bref, complètement irréaliste, M. Ben Abbes est essentiellement rêveur. Et malgré tout on en a besoin de gens comme lui.

SECTEUR PUBLIC
| 10-06-2016 07:38
quel est le premier ministre qui peut avoir le soutien de la fonction publique pour faire
redresser le pays travailler 8 heures ???

Dr. Jamel Tazarki
| 09-06-2016 22:12
Il est évident que le gouvernement de Mr. Essid a un programme socio-économique, mais ce qui nous manque, ce sont les bonnes conditions de mise en oeuvre.

Il est temps de comprendre le fait que la mise en oeuvre d'un programme socio-économique n'est pas un processus unique et linéaire mais plutôt un processus dynamique et itératif à l'intérieur duquel se trouvent plusieurs étapes et qui exige l'utilisation de stratégies'

Les programmes socio-économiques de l'après révolution de jasmin ont échoué à cause des mauvaises capacités organisationnelles et du niveau de préparation inadéquat. On a trop négligé l'étude de faisabilité et certains de nos Ministre ont/avaient une fausse compréhension des éléments du programme socio-économique du gouvernement de Mr. Essid, en particulier Mr.Noômane Fehri, Mr. Zied Laâdhari et Mr. Mr. Yassine Brahim sont/etaient même contreproductifs. Ils faisaient/font du n'importe quoi sans tenir compte des objectifs du programme socio-économique gouvernemental (sans entrer dans les détails')


Puis, il faut avouer que Mr. Essid n'a pas su favoriser la communication avec/entre l'ensemble des personnes impliquées dans la mise en oeuvre de son programme socio-économique. La présence d'un leader (coordonnateur du programme socio-économique) au sein d'un gouvernement est une composante clé de la mise en oeuvre et de la réussite d'un pays' Certes, Mr. Essid a/avait assez d'autorité afin de se permettre d'influencer les décisions et apporter des changements dans les structures mais par contre il lui manque/manquait le savoir-faire'


Je contredis Mr. Hédi Ben Abbes en disant que le gouvernement Mr. Essid a un programme socio-économique, par contre Mr. Essid n'a pas su le réaliser! Il faut qu'il se sépare de certains de ses/nos Ministres mais il n'a pas le courage de le faire et de contester ainsi les exigences de dirigeants de certains partis politiques.

Oui, il est temps que Mr. Essid parte de lui-même, et vous savez maintenant pourquoi!

Jamel Tazarki

Le Demystificateur Universel
| 09-06-2016 21:25
Qui a mis tous ces tocards,en particulier les ploucs nahdhaouistes ,CPR ,attakatol,Jomaa sur orbite pour pouvoir les manipuler facilement,asservir le peuple et ruiner la Tunisie en un temps record.

Citoyen_H
| 09-06-2016 21:21

"Tous ces tocards,qui n'ont prouvé que leur incapacité,leur impéritie"

Bien dit.
C'est systématiquement le cas dans les "bananas républic".
Ces imposteurs n'ont qu'une règle: La "faim" justifie les moyens.

"Laa dine wa laa mila".
Salutations.




Le Demystificateur Universel
| 09-06-2016 21:15
Le niveau du langage ordurier que tu utilises(,mal d'ailleurs) me fait penser que tu es un adherent ou un sympathisant de la secte des tenenebres Ennahdha.

tunisien fugitif
| 09-06-2016 21:05
en fin tu es démasqué je t'ai vu à la télé (allo jeddah) pleurer ton gourou , va te faire cuir un oeuf tu ne peux jamais péter au dessus de ton sal ***.

Tartour
| 09-06-2016 20:31
Monsieur CPR, pire parti politique de ce pays ; Monsieur conseiller de Marzouki, responsable numéro de la catastrophe que nous vivons. Monsieur en Abbes, vous avez eu votre chance, vous l'avez gâché, vous avez montré qui vous être vraiment. De grâce,un peu de pudeur, disparaissez, la Tunisie trouvera un jour ou l'autre son chemin avec des gens intègres et honnêtes.

Le Demystificateur Universel
| 09-06-2016 20:08
C'est une verité etablie que la classe politique en Tunisie est formée pour l'essentiel de tocards,allechés par la curée.certains d'entre-eux,ayant prouvé leur incompetence lorsqu'ils etaient au pouvoir veulent y retourner en gesticulant dans les medias.Preuve supplementaire qu'ils sont passés a coté de la plaque.

Le Demystificateur Universel
| 09-06-2016 19:53
Encore un parent ou un ami de ce monsieur et chargé de le defendre.Un nain a beau se tenir sur une montagne,il n'en est pas plus grand pour autant.