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Tunisie – La crise de l'UGTT : Grève ou pas grève ?
11/12/2012 | 1
min
Tunisie – La crise de l'UGTT : Grève ou pas grève ?
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La journée du 11 décembre 2012 a été celle de toutes les rumeurs, de toutes les intox, de toutes les déclarations, démentis, y compris entre des responsables de l’UGTT eux-mêmes. À deux jours de la Grève générale décrétée par la Commission administrative de la Centrale syndicale, et au moment de la tenue d’une réunion entre des représentants de l’UGTT et des membres du gouvernement dont le but est de trouver un accord en vue d’annuler la grève, les spéculations vont bon train. La deuxième grève générale de l’histoire de la Tunisie post-indépendance aura-t-elle lieu ?

La pression était à son comble depuis la décision de l’UGTT, au lendemain de l’annonce faite le 5 décembre au soir, de décréter une grève générale sur l’ensemble du territoire tunisien, pour la journée du jeudi 13 décembre 2012. Les attaques et les accusations ont fusé de toutes parts. Des responsables d’Ennahdha, parmi lesquels Rached Ghannouchi, avaient accusé l’UGTT de détenir des armes dans ses locaux et de vouloir semer le chaos. Des grèves régionales se sont déroulées dans plusieurs villes tunisiennes, suivies de manifestations de soutien au gouvernement, condamnant les décisions prises par l’UGTT. Adnane Hajji, syndicaliste, avait, dès ce vendredi 7 décembre 2012, exprimé des menaces à peine voilées contre ceux qui n’observeront pas la grève. Des Imams et autres personnalités religieuses avaient, de leur côté, mis en garde contre cette grève, la présentant comme un pêché, pour certains, comme un outil utilisé par les RCDistes et autres communistes afin de s’emparer du pouvoir, pour d’autres.
Houcine Abassi, secrétaire général de l’UGTT, avait, quant à lui, rejeté la possibilité d’annuler la grève, faisant valoir le discours non constructif d’Ennahdha et accusant le parti islamiste de favoriser le recours à la violence des Ligues de protection de la révolution, considérées comme la milice d’Ennahdha.

Mais depuis hier lundi 10 décembre 2012, les rumeurs d’annulation de la grève se sont multipliées. Sur les réseaux sociaux, des pages proches du pouvoir participent à véhiculer ces rumeurs, aussitôt démenties par la page officielle de la Centrale syndicale. Pourtant, les déclarations des responsables syndicalistes ne sont plus aussi tranchées. Adnane Hajji, lui-même, revient sur ses déclarations et, tout en accusant Ennahdha de menacer les grévistes et les non-grévistes de représailles, appelle Houcine Abassi et les dirigeants de l’UGTT à suspendre la grève du 13 décembre, afin, dit-il, de révéler le vrai visage des milices islamistes.

Côté Troïka, le temps est à l’apaisement. La prière du vendredi de Rached Ghannouchi, à la gloire du militantisme syndical, et sa rencontre avec le fils du leader Farhat Hached, en sont une preuve.
Chez Ettakatol, on prend clairement parti pour l’UGTT, tout en appelant à la dissolution des Ligues de protection de la révolution et au dialogue, afin de trouver un accord en vue d’annuler la grève. En ce sens, la réunion qui a eu lieu aujourd’hui entre membres du gouvernement et représentants syndicalistes est présentée par Mohamed Bennour, porte-parole du parti, comme une initiative de Mustapha Ben Jaâfar, leader d’Ettakatol et président de l’Assemblée nationale constituante.
Au CPR enfin, les avis sont partagés. Si Mohamed Abbou, secrétaire général du parti affirme que la dissolution des Ligues de protection de la révolution serait une atteinte aux droits de l’Homme, considérant ces mêmes ligues comme la « conscience de la révolution », côté présidence, par contre, ces ligues posent problème. Adnane Manser, porte-parole de la présidence de la République, a émis, en effet, la possibilité de les sanctionner voire de les dissoudre, à terme.

Au sein du gouvernement, la tendance est également au dialogue et à la recherche de solutions. Ali Laârayedh, ministre de l’Intérieur, avait, dès le 4 décembre, accusé les LPR d’être la cause des violences, par leur présence sur la Place Mohamed Ali, sans pour autant désigner de coupables. Khalil Zaouia et Samir Ben Amor ont également fait ce constat et Touhami Abdouli, secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères chargé des Affaires européennes avait fait part de la profonde préoccupation des pays européens et américains, concernant les exactions des LPR, semant le doute sur la réussite de la transition démocratique en Tunisie.

Aujourd’hui 11 décembre 2012, des informations contradictoires circulaient et la tension est montée d’un cran pendant la réunion de la Kasbah entre membres du gouvernement et représentants de l’UGTT. Des manifestants, soutenant la Centrale syndicale, se réunissent, au même moment Place Mohamed Ali. Sur les réseaux sociaux, les pages proches d’Ennahdha mettent en garde contre toute décision de dissoudre les Ligues de protection de la révolution, menaçant de faire tomber le gouvernement si une telle décision venait à être prise à l’issue des pourparlers.
En fin d’après-midi, plusieurs représentants syndicaux, dont Belgacem Ayari, membre du bureau exécutif de l’UGTT, déclarent que les négociations ont été « positives » et que l’accord répondrait à la majeure partie des revendications de l’UGTT. Parmi la délégation gouvernementale, Khalil Zaouia affirme, quant à lui, que cet accord, s’il venait à être ratifié par la Commission administrative de l’UGTT et la présidence du gouvernement, demain 12 décembre 2012, aurait pour conséquence l’annulation de la grève.

Cependant, dans la journée, plusieurs syndicats de base relevant de l’UGTT (celui des employés du ministère de l’Intérieur et de Tunisair, notamment), ainsi que l’Ordre des avocats, avaient apporté, jusqu’en fin d’après-midi, leur soutien à la grève générale du 13 décembre et informé de leur participation à ladite grève. Sami Tahri, secrétaire général adjoint de l’UGTT, chargé de la communication, est intervenu également pour affirmer qu’aucun accord n’avait été conclu et que la grève générale était toujours d’actualité, appelant à mettre en œuvre les dispositifs nécessaires pour sa réussite. « Ceux qui font circuler ces rumeurs d’annulation de la grève ne cherchent qu’à discréditer l’UGTT et à faire échouer la grève », accuse-t-il.

Si les différentes déclarations, que ce soit du côté de l’UGTT ou du côté du gouvernement, font entrevoir une possible sortie de crise, par une réponse adéquate aux revendications de la Centrale syndicale, il est impossible d’affirmer, à ce jour, si la grève générale aura bien lieu. La commission administrative de l’UGTT se réunira en effet demain 12 décembre 2012 pour décider de l’annulation ou la suspension ou encore du maintien de cette grève, selon l’accord amorcé à la Kasbah. En attendant, les suppositions, hypothèses, rumeurs ou intox se poursuivent, et les défenseurs de l’UGTT devront attendre le dernier moment pour savoir si, oui ou non, il y aura grève ce jeudi 13 décembre.

Monia Ben Hamadi
11/12/2012 | 1
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