Algérie : un peuple insoumis !
Par Hédi Ben Abbes
« Election, piège à cons » !!!
Cette pancarte brandie par un jeune algérien dans les rues de la capitale Alger, vendredi 7 juin 2019 résume à elle seule la profondeur du peuple algérien et le degré de son insoumission à un ordre faussement démocratique.
Une phrase qui résonne comme un écho à ce que Amartya Sen, le prix Nobel de l’économie appelle « la démocratie des urnes », qui n’est qu’un simulacre de démocratie.
Une phrase qui dit NON à un système qui tente de survivre à cette vague de protestation pacifique et intelligente portée par un peuple dans sa diversité culturelle et sociale.
Une phrase qui décrit bien ce grand peuple qui refuse de se laisser piéger à nouveau par les caciques du régime et même par les militaires qui se portent garant de l’unité de la nation.
Si l’histoire de l’Algérie est peuplée d’exemples de rebellions et de révoltes, il est d’autant plus méritoire pour ce peuple d’exprimer son insoumission à une époque de manipulation des masses et de volonté d’uniformisation de la pensée.
Que ce peuple algérien réussisse ou non dans cette entreprise de transformation politique profonde, il a d’ores et déjà fait preuve de sa prise de conscience de la limite d’un système injuste et indigne et l’impact de son insoumission va bien au-delà des frontières algériennes.
Avec humilité, ce grand peuple nous montre qu’une révolte n’est pas une Révolution, qu’une élection ne fait pas la démocratie, qu’il n’y a pas de zone intermédiaire entre liberté et soumission.
« Le dégagisme » inventé en Tunisie, prend tout son sens en Algérie car le concept trouve dans la culture révolutionnaire de ce peuple entier qui a appris comment mourir pour une cause noble, l’alchimie nécessaire à tout projet de transformation profonde. Les demi-mesures, les compromis compromettants, les arrangements entre amis, les consensus mous et contreproductifs, ne font pas partie de la culture de ce peuple insoumis.
Je ne peux résister à l’idée de citer André Gide quand il dit : « Le monde ne sera sauvé, s’il peut l’être, que par des insoumis. Sans eux, c’en est fait de notre civilisation, de notre culture, de ce que nous aimions et qui donnait à notre présence sur terre une justification secrète. Ils sont, ces insoumis, le « sel de la terre », et les responsables de Dieu ».
C’est cette insoumission collective porteuse de nouveaux projets qui fait sens. Si le mot « peuple » a un sens, c’est dans les causes collectives que ce sens prend corps. C’est dans les profondeurs de sa culture et les valeurs humaines profondes, occultées par des strates de manipulations de toutes sortes, que le peuple peut puiser sa motivation. Il faudrait aller chercher cette motivation dans ces profondeurs et faire naître ainsi de l’espoir pour toute l’humanité. C’est dans cette volonté de recouvrer sa souveraineté en rejetant le SYSTEME dans son ensemble que le peuple algérien rend service à l’humanité tout entière.
Merci l’Algérie.