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Chroniques
Aides, soutiens, compensation, subvention, l’impératif d’une révision
04/10/2018 | 17:18
4 min

Par Houcine Ben Achour


Il a fallu la présentation d’un scénario possible pour réformer la Caisse générale de compensation au cours de la conférence nationale sur les orientations économiques et sociales du projet de loi de finances 2019 pour susciter émoi et début de polémique vite étouffée par le ministre du Commerce affirmant que les prix des produits de base subventionnés ne subiront pas d’augmentation de sitôt.

Pourtant, il aurait été plus audacieux de relancer le débat à travers une approche analytique du dossier qui établit la part entre la compensation aux produits dits de première nécessité et la subvention des prix des produits énergétiques. Partant, on constaterait aisément que ce n’est pas tant la compensation des prix des produits de base qui importe plus aujourd’hui que la subvention des prix de l’énergie. C’est cette dernière qui est problématique, à la limite du soutenable et du prévisible. En effet, chaque année ou presque, les prévisions budgétaires et de paiements extérieurs du pays sont malmenés en raison des variations des cours mondiaux de l’énergie.

 

L’année 2018 ne s’écarte pas de la règle. Actuellement, le cours moyen du baril de pétrole affiche 72 dollars alors que le budget de l’Etat se basait sur un prix annuel moyen du baril de 54 dollars. Du coup, la facture de la subvention des prix de l’énergie a bondi à 2.700 MD contre 1.500 MD envisagée dans la loi de finances 2018, et cela en dépit des ajustements effectués au cours de l’année au niveau du prix public des carburants et de l’électricité. Heureusement que ce surcoût ne remettra pas en cause l’objectif de déficit budgétaire fixé par la loi de finances 2018 à 4,9% du PIB.

 

Néanmoins, ce sont 1.200 MD qui partent en fumée, au vrai sens du terme puisqu’une bonne partie de ce montant sert à compenser le tarif des carburants à la pompe dont l’utilisation est plus le propre des classes moyennes supérieures et des plus hauts revenus que des plus démunis. Une étude de l’Itceq (Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives), publiée l’année dernière, estimait que près de 50% de la subvention à l’énergie est allouée aux carburants. Une autre étude, de la Banque mondiale celle-là, observe que les ménages à revenu élevé bénéficient de 30% environ des subventions énergétiques (carburants et électricité) alors que ceux à bas revenu n’en bénéficient qu’à hauteur de 13%. Par extrapolation,  cela revient à constater que, pour l’année 2018, plus de 800 MD de subventions à l’énergie ont profité aux plus hauts revenus et seulement un peu plus de 350 MD aux ménages les plus démunis. C’est à se demander de quelle compensation parle-t-on ?

En tout cas, cela remet en cause crument l’efficacité d’un tel instrument. Et en pareil circonstance, ne serait-il pas temps d’engager d’abord une sérieuse et réelle réforme de la subvention à l’énergie avant de penser à réviser le système de subvention des prix des produits de première nécessité ? D’autant plus que l’une peut inspirer sinon guider à la refonte de l’autre et au-delà à une refonte complète de la politique des transferts sociaux qui constituerait en fin de compte le socle du nouveau pacte social dont le pays a tant besoin. Ce ne sera point une sinécure, loin s’en faut. Mais ce n’est pas impossible, non plus.

 

Des pistes existent et ne méritent que d’être déblayées. Il en est une qui vaut la peine d’être remis au goût du jour, celle d’un rééquilibrage de la politique de transferts sociaux entre, d’une part, les dépenses directes de soutien, et notamment des dépenses liées au Programme national d’aide aux familles nécessiteuses (Pnafn) et, d’autre part, les dépenses indirectes de soutien que constitue la subvention et la compensation.

 

A cet égard, il convient de rappeler que le Pnafn a été créé dans la foulée de la mise en œuvre du Plan d’ajustement structurel en 1986. L’ambition originelle de ce Programme était en fait d’accompagner un démantèlement progressif de la Caisse générale de compensation. On se retrouve aujourd’hui avec deux instruments de plus en plus complexe à gérer dans la mesure où l’un, la compensation, a été fourvoyé et l’autre, le Pnafn, exige un véritable toilettage s’agissant de la population des bénéficiaires.

 

Qu’attend-on pour bien faire et redorer le blason de l’Etat-providence tunisien ?

 


04/10/2018 | 17:18
4 min
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Commentaires (6)

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manixsv
| 09-10-2018 16:07
et c'est sans parler des aspects ecolo qui je sais/vois sont le dernier des soucis des Tunisiens

manixsv
| 09-10-2018 16:01
Vous explicité ce que je glisse dans mes commentaires depuis que je vous lis. Un regard extérieur s'étrangle immédiatement en voyant ce système... mais connait aussi le coté routinié de la Tunisie et ne craint que rien ne change avant longtemps :-(

Gg
| 05-10-2018 11:27
Votre voisin a une Maserati? Wouaouh, il a bon goût!
Allez, il faut rire un peu...

AH
| 05-10-2018 08:54
Il est impératif d'ajouter le mot "Pauvreté" dans le jargon des politiciens. Le mot zwawla a perdu son sens.

Ainsi, on pourra penser aux statistiques officielles dans le domaine et commencer à trouver des solutions à ce fléau. A moins que le gouvernement n'est pas concerné par ce problème.

La compensation profite plus aux gens qui ont les moyens pour en profiter.

De manière générale, il faudrait penser à tout réformer pour la bonne gestion de l'argent du contribuable et des citoyens!

1/3i
| 04-10-2018 19:52
j'ai un 4x4 qui consomme 20 litres au 100 km.
donc quand je fais le plein, je touche un max de subvention.

Merci à ceux qui paient des impôts !
Vous me donnez de l'argent.

C'est pareil pour mon voisin qui a une maserati. Nous trinquons souvent à votre santé, pour vous remercier !

Nous n'attendons plus que la subvention sur les produits de luxe qui nous coutent trop cher !!

DHEJ
| 04-10-2018 18:29
Il faut chercher l'inconnue "x" pour une bonne solution