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Aéroport à Utique : une fausse bonne idée ?
15/08/2017 | 19:59
5 min
Aéroport à Utique : une fausse bonne idée ?

Mis en exploitation en 1940, l’aéroport Tunis-Carthage compte deux pistes et s’étend sur une superficie de 830 hectares. Considéré comme la principale plateforme aéroportuaire du pays, cette structure vieille de plus de 50 ans est aujourd’hui selon les autorités : dépassée, saturée !

Face à cette réalité, le ministre du Transport, Anis Ghedira, a parlé dans un premier temps d’extension de la structure, avant de se rabattre sur l’idée de construction d’un nouvel aéroport. Pour le pays, ça serait le deuxième aéroport construit en l’espace de 10 ans. Est-ce nécessaire ? Le désastre d’Enfidha n’est-il pas suffisant ?

 

Dans une déclaration donnée le 9 novembre 2016, le ministre du Transport, Anis Ghedira a laissé entendre qu’une étude ministérielle sensée simuler le trafic aérien à l’horizon 2030-2040, déterminera la solution à adopter pour désengorger le trafic aérien et mettre les bases pour une bonne gestion du flux des voyageurs qui arrivent en Tunisie chaque année.

 

Pour un touriste qui débarque à Tunis-Carthage en pleine saison estivale, la mauvaise gestion de la structure saute aux yeux. Une mauvaise gestion qui cause des retards quasi systématiques, un affolement à l’embarquement, des vols de bagages et une sensation de stress ambiant qui débouche bien souvent sur des dérapages et violences verbales. Et lorsqu’un touriste affiche son mécontentement face au personnel de l’aéroport, la réponse est toujours la même : « On n’est pas habitués à gérer un tel flux de passagers ».

 

Sous l’ancien régime, en 2007, l’Etat tunisien entreprend de résoudre le problème et se lance avec une holding turque (TAV), dans la construction de l'aéroport international d'Enfidha-Hammamet sous le régime de la concession dite BOT (built, operate and transfer). Un méga projet où les Turcs ont injecté plus de 550 millions d’euros. Selon l’accord signé, cette concession du gouvernement tunisien au géant turque ne prendra fin qu’en 2047. Après un certain retard dans la réalisation de l’œuvre, elle est finalement mise en service en décembre 2009.

 

Censé décongestionner l’aéroport de Monastir ainsi que celui de la capitale, cette nouvelle structure, huit ans après avoir été achevée, tourne actuellement encore au ralenti. Très mal desservie,voir même pas du tout, et ayant subit de plein fouet la crise du secteur touristique, elle prend aujourd’hui l’allure d’un aéroport fantôme. Bâti sur un terrain quatre fois plus grand que celui de l’aéroport Tunis-Carthage, cet aéroport qui était censé gérer un flux de millions de passagers par an, se retrouve a en gérer quelques dizaine, voire quelques centaines de milliers.

 

En comparant Tunis-Carthage avec d’autres aéroports de capitales européennes, par exemple, on se rend rapidement compte que le problème n’est pas dû à l’inadéquation de l’infrastructure mais bien à une mauvaise gestion du trafic et des flux. Comme pour toute autre structure étatique, il s’agit avant tout d’un problème de rendement des ressources humaines et de bonne gouvernance.

Dans une interview accordée au journaliste Jean-François Bélanger de Tour Hebdo, la ministre du Tourisme et de l'Artisanat, Salma Elloumi Rekik, a confirmé le choix d’Utique comme emplacement pour le nouvel aéroport. Evoquant le financement du projet, elle a révélé qu’il sera assuré par la cession des 1 000 hectares de l’actuel aéroport de Tunis-Carthage, en plus de partenariats public-privé.

 

Jusque là, deux solutions étaient sur la table s’agissant de Tunis-Carthage, la première : l’extension, la deuxième, le démantèlement. D’après les récentes déclarations des responsables ministériels, il semblerait que les autorités aient tranché pour la deuxième. Certains journaux locaux titrent aujourd’hui :« luxueux aéroport à Utique ». Il devrait couter aux alentours de 3000 MD. Et si après sa mise en service, il restait vide ?

 

D’autres journaux encore, titrent : « l’Aéroport Tunis-Carthage va déménager ! ». La chose certaine c’est qu’après ce « déménagement », le ministère des Domaines de l’Etat va avoir du pain sur la planche entre d’un côté : la division du « butin » et les expropriations de l’autre. Dans ces mille hectares de terrains, certains urbanistes auraient vu en plus des tonnes de béton, des espaces verts. Une idée qui paraitra sans doute, farfelue, pour les décideurs et les gestionnaires de fonds souverains.

 

Utilisé a seulement 5% de sa capacité, l’aéroport d’Enfidha, aurait pu connaitre un meilleur sort selon les professionnels du tourisme qui se sont réunis le mercredi 19 juillet 2017 au siège de la FTH (Fédération Tunisienne de l’Hôtellerie). Durant le point de presse, les membres du bureau exécutif de la fédération ont pointé le retard dans la mise en place de la convention « Open Sky » qui doit garantir l’accès des compagnies européennes à bas prix, aux aéroports tunisiens, ce qui aurait eu pour résultat une augmentation considérable du nombre de touristes.

 

Lorsqu’on se trouve aux portes d’un aéroport « qui se respecte », on a devant soit une multitude de services de transport garantissant le lien entre ce dernier et les principales villes environnantes. Ainsi, même si l’on est à 80 kilomètres d’une ville, on ne mettra pas plus d’une heure à la rejoindre. Avec le plan de développement à l’horizon 2020, la Tunisie, endettée à 70% du PIB, a présenté à ces principaux créanciers une multitude de grands projets, parmi lesquels des ports et des hôpitaux. Les décideurs y ont-ils intégré un plan pour la maintenance et l’amélioration du rendement des anciennes structures ? Par ailleurs, les promoteurs immobiliers commencent déjà à fourbir leurs armes pour s’arracher le terrain de l’actuel aéroport. Situé entre les quartiers de la Soukra, Aïn Zaghouan et l’Aouina, le terrain présente un fort potentiel surtout si l’on sait que le mètre carré s’y négocie à près de 1600 dinars…

 

Sofiene Ahres

15/08/2017 | 19:59
5 min
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Commentaires (40)

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Abou El ezz
| 13-11-2019 10:44
Il est bien noté dans votre article l'intérêt de l'emplacement de l'aéroport Enfidha par rapport au voyageur et même l'environnement.Il est nécessaire de rappeler que l'Aeroport d'Enfidha a été conçu afin d'alléger le flux aux aéroports de Tunis et Monastir dans un premier temps pour terminer en fin de course de fermer celui de tunis devenu ingérable dans un milieu confu . Notons que l'idée de construire un autre aéroport proche de tunis n'est nullement bénéfique pour la majorité de la population.il est donc revoir à qui rêvent le bénéfice du nouveau d'Utique dont l'emplacement ne répond qu'à un certain nombre de rêveurs ?

Papillon34
| 17-08-2017 21:10
Qui n'a pas connu la basse vallée de la medjerda sous des mètres d'eau peut rire. Ce petit oued en a emporté des Charrettes entière de rigolards
Qui n'a pas vu des figuiers de 5 m de haut sous l'eau peut construire ce qu'il veut dans les marécages qui débutent à djedeida.
Qui ignore que uthique était un port peut chanter sous la pluie
Qui ignore l'histoire peut construire un aéroport dans une guelta qui fait des milliers d'hectares , au pire il y a les hydravions et en y rajoutant des crocodiles on se croira en Floride.

Icare
| 17-08-2017 13:17
L'UGTT protège les employés de Tunisair Handling, qui a le monopole de l'assistance aéroportuaire sur Tunis Carthage, tandis que cette activité est assurée, plus efficacement, par des sociétés privées à Enfidha.
C'est une des raisons pour lesquelles le Gouvernement ne veut pas considérer qu'Enfidha serait (une fois doté d'une liaison rapide ferroviaire avec Tunis) une bonne solution pour devenir le futur 2ème aéroport de la capitale ... car il faut garder Tunis-Carthage comme "aéroport de proximité" : Utique est trop distant pour les voyageurs d'affaires et les touristes qui font des "courts séjours" à Tunis !

aziz aziz
| 17-08-2017 09:12
Aujourd'hui des aéroports sont construis en gagnant des terrains sur la mer et il y a encore qui nous parle de terrains inondables impropres pour bâtir un tel projet !!. Je leurs rappel d'ailleurs qu'un aéroport est une structure étalée (ce n'est pas comme pour une ville) et donc on peut facilement maîtriser l'hydrauliques de surface du site. Bref, cet argument ne tient pas.
Par contre je dois avouer que choisir la région ouest de Tunis au lieu d'Utique ajouterait une dimension de plus à l'aspect stratégique du projet celle d'un développement régional plus équilibré. D'ailleurs la zone de Bouhnach à Mornaguia est restée en ballotage avec la zone d'Utique jusqu'au dernier moment. Cette zone est moins excentrée qu'Utique (trop au nord) et surtout elle peut bénéficier d'une extension de la linge (E) de l'R.F.R qui est déjà en construction. Mais je crois qu'il faudra prévoir un coût d'expropriation plus élevé vue le fort morcellement des terres là-bas, et qu'il faudra aussi améliorer l'accès routier au moins jusqu'à l'autoroute A3. Si la discrimination positive était un critère pondérant dans le choix du site, je crois que Tunis-Ouest l'aurait emporté.
Le vrai problème reste dans les têtes, car certains de nos concitoyens ne conçoivent la Tunisie que dans le rayon des 10 kms entre les Manazehs-Marsa-Lacs et autres où ils ont leurs attaches et font donc de la résistance. Leur dire qu'un jour ils devront traverser la banlieue ouest pour aller prendre son avion c'est comme si vous leurs demander qu'ils traversent la jungle, sa leur file la trouille.

Papillon34
| 17-08-2017 07:11
Merci de rappeler à ces bougres qui nous gouvernent qu'on préférerai qu'ils nous annoncent qu'ils vous reboucher les nids de poule sur les routes et assurer la propreté du domaine public

Gg
| 16-08-2017 23:11
Je me suis amusé une fois à mesurer le temps que met un policier à contrôler un passeport, aux arrivées de Lyon et de Tunis.
Eh bien cela va quasiment deux fois plus vite à Lyon, moyenne comptée sur 20 passagers.
Et c'est pareil au départ, et les deux tiers des guichets sont vides alors que la foule piétine...
Bref il y a beaucoup à faire avant de construire un nouvel aéroport.

Ingenieur Lambda
| 16-08-2017 20:23
Mis a part les grands interets des futurs speculateurs, des futurs intermediaires et lobyistes de tous bords et de tous genres, mis a part la diversion de l'opinition publique et pour longtemps, lancer a la legere une telle information et la faire reprendre par differents departements ministeriels, releve aujourd'hui du grand amateurisme pour s'en tenir a ce seul qualificatif du premier degre, et ne pas se lancer dans d'autres accusations plus graves.
En effet soutenir publiquement une telle hypothese sans arguments techniques, financiers ou meme environnementauxvalables, denote d'une grande legerete et d'un sens tres grave de la non consideration de la chose publique et de la triste realite economique et sociale du pays en ce moment.
Se hasarder a parler officiellement d'un site donne pour l'hypothetique futur grand projet, tient du delit d'initie. Ceci ne fera l'affaire que des speculateurs fonciers qui vont faire flamber les prix des terrains agricoles dans ces regions, ce qui aura pour consequence directe et immediate, le blocage de la roue economique dans ces regions deja peu entreprenantes, par le ralentissement des transactions foncieres normales et coutumieres pour cause de flambee des prix.
Autre consequence, l'arret des grands investissements agricole dans ces regions, au motif qu'elles sont vouees a perdre leur vocation agricole a terme.
En un mot, "que de grondements dans un tunnel".
Une derniere chose, comment ose t'on reparler du site d'Utique, alors que tous le monde sait que ce site dit "Ardh EL BEZAZIA" est repute pour etre le dernier deversoir naturel du bassin versant du grand Oued de la Medjerda. Le remplissage de ce bassin est directement lie aux crues dudit Oued et surtout aux intemperies et aux precipitations qui s'abattent sur l'ouest Algerien. En effet la gestion de la securite des barrages de retenue Algerien fait qu'en cas de trop plein, nos freres algeriens previennent leurs homologues algeriens d'ouvrir a leur tour les retenues et barrages Tunisien j'usqu'a la mer. Le scenario des crues de 2002 en Algerie et les lachees de barrages sont encore dans nos memoires.
Cette annee la nouvelle autoroute Tunis Bizerte a failli etre emportee, et a due etre fermee partiellement pour consolidation apres quelques mois de son inauguration.
La zone etait sous presque deux metres d'eau a gauche et a droite de l'autoroute, et ce pendant de tres longues semaines.
A cette epoque, ou etaient nos actuels Ministre des transports et du Tourisme?
Souvenez vous egalement que lors de l'inauguration de l'autoroute, l'AFH a presente un projet d'une ville moderne de 1000 hectare a mi chemin entre Tunis et Bizerte et des plans ont ete presente de cette nouvelle ville.
Une annee plus tard apres les fameuses inondations, personne n'osa jamais plus en parler.
Reveillez vous Messieurs, Dames, occupez vous des vrais problemes urgents, et dites vous bien que ce pays est dote d'une bonne memoires qui est celles de ces fils et filles qui ont sues pour que la Tunisie soit sans cesse au rang des grandes nations.
A bon entendeur, Salut

Xept
| 16-08-2017 18:52
La centrale solaire peut être installée sur le lac de Tunis. Le photovoltaïque flottant présente l'avantage de ne pas consommer de foncier. Sous réserve de prouver la saturation de Tunis Carthage , Borj El Amri est un meilleur emplacement que celui d'Utique( il y a déjà les terrains de l'école d'aviation). Mais la meilleure solution c'est d 'utiliser Enfidha et d'installer une liaison ferroviaire à grande vitesse avec Tunis.

Hannibal
| 16-08-2017 16:48
Si la circulation est sature dans le grand Tunis,le probleme revient a la situation catastrophique des moyens de transports ferroviaires,rien n a ete veritablement bien etudie,une gare centrale a tunis ne repondant pas aux besoins urgents des voyageurs,pourtant Tunis a besoin d une grande gare centrale ferroviaire ou les metros,bus et trains de banlieu et regionaux aient suffusemment de terminaux et de quais spacieux et modernes pour concurrencer l utilisations des voitures privees,un voyage en train plus confortable et moins de stress que la conduite d une autos dans les embouteillages permanent
La gare de Tunis actuelle peut etre remplacee sur le meme emplacement en y incluant les batiments tout autour de la place Mongi Bali et la place Barcelone en majorite appartenant a l Etat,pour eriger une gare centrale disposant de toutes les commodites modernes et peut etre financee par les revenus des loyers des dizaines de boutiques et gastronomie du nouveau batiment,c est exactement ce qui se produit dans les plus grandes villes Europeennes.Oui Tunis a besoin de developper et moderniser les transport ferroviaires et publics et d offrir les espaces necessaires a leurs realisations.Tunis Carthage peut etre aggrandi et modernise en demenageant la base militaire et l aeroport presidentiel.

Zug
| 16-08-2017 15:33
Pour le coût d'un nouvel aéroport, il serait en effet plus judicieux de transférer le frêt, le hajj et autres à Enfidha et d'étendre, moderniser et améliorer, le parking et les connexions bus tram de Tunis Carthage.
Ça coûterait moins cher et Tunis Carthage est très bien bien ... au lieu de celà, on investirait dans une première tranche de 250 MW d'une centrale solaire qui nous permettrait d'économiser 1 milliard de dinars d'importation d'énergie fossile par an aux cours actuels !
Ghdira et la Ministre du tourisme devaient travailler sur l'Open Sky et ils nous reviennent avec un projet de nouvel aéroport, ce n'est ni professionnel ni démocratique.
Que pense notre Premier Ministre de tout celà. Il est trop occupé à lutter contre la contrebande. C'est vrai que la mauvaise gouvernance dans le tourisme et le transport c'est moins prioritaire ...
Saurons nous un jour le bilan de ces 2 Ministres et à qui profite cette initiative hasardeuse ? parions que non !
Vive la démocratie à la Tunisienne !!!