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Chroniques
A quel point sommes-nous cons ?
Par Synda Tajine
08/11/2014 | 16:01
3 min
A quel point sommes-nous cons ?

Par Synda Tajine

« Les promesses n’engagent que ceux qui y croient »
, avait déclaré Moncef Marzouki dans un récent discours préélectoral. Visiblement, à l’approche des élections, les capacités de nos présidentiables à débiter des insanités et à prendre les électeurs pour moins futés qu’ils ne sont, croissent à vue d’œil. « J’ai décidé d’être poli, je sais que j’ai déjà foiré auparavant », disait Béji Caïd Essebsi favori de la présidentielle dans sa dernière apparition télévisée. On veut bien vous croire mais qu’en est-il pour les autres ?

A l’approche de la date fatidique du 23 novembre, chacun lustre ses atouts et sort ses meilleurs arguments de vente en vue d’attirer un maximum de consommateurs dans son entreprise du pouvoir.
Au lieu de se farcir les réels problèmes qui attendent le futur président d’un pays au bout du rouleau, ayant le couteau sous la gorge, certains préfèrent prendre les choses à la légère et faire dans le burlesque. Toutes les familles des martyrs seront prises en charge, à vie. Kairouan sera la nouvelle capitale choisie par les Tunisiens. Le pays sera divisé en 6 districts…. Les idées farfelues et incongrues fusent de toutes parts par des candidats qui semblent y croire vraiment…ou croire que nous y croyons vraiment. Ou alors sont-ils en train de nous prendre pour des dindes et de rire de nous dans les couloirs ? J’ignore quel est le pire des deux scénarios.
Mais ces arguments de vente ne réussiront pas à convaincre les plus blasés des consommateurs. Certains l’ont compris et n’hésitent pas à les menacer de front. « Si les dossiers [de la justice transitionnelle, de la traduction des voleurs devant les tribunaux et de la récupération de l’argent volé] restent ouverts c’est bien parce que je serais encore président de la République ». Traduction, si Moncef Marzouki partait ce serait le chaos. La peur fait des miracles. Pas bête comme raisonnement.

La campagne présidentielle est aujourd’hui gérée comme une grande campagne marketing à coups d’impressionnantes affiches publicitaires où on pose devant un peuple ébahi mais indécis, de slogans hitchcockiens qu’on a du mal à saisir et de formules toutes faites qui présentent les candidats, tous sans exception, comme de futurs sauveurs du pays.
Des atouts marketing restent en revanche plus vendeurs que d’autres. Alors qu’en 2011, un passé de militant pouvait vous faire vendre comme des petits pains, les consommateurs d’aujourd’hui semblent avoir délaissé cet atout pour un autre plus vendeur : économie, prestige de l’Etat et unité des Tunisiens. Ça, nos politiques l’ont bien compris et n’hésitent pas à le marier à toutes les sauces et à l’étaler dans tous les discours. De pareils arguments de vente font que des énergumènes comme Hachmi Hamdi, Larbi Nasra ou Abderraouf Ayadi croient en leurs chances de passer le premier tour. D’autres, sont peu soucieux de la déculottée qu’ils ont pris lors des législatives et continuent à faire campagne, tel est le cas de Mustapha Ben Jaâfar, Ahmed Néjib Chebbi ou Moncef Marzouki.
Ces derniers ont incontestablement été de mauvais commerciaux et n’ont pas pu vendre leurs produits au peuple tunisien lors des législatives. Pourquoi réussiraient-ils aujourd’hui ?


Il est difficile de savoir à quel point ces présidentiables nous prennent pour des cons. Suffira-t-il d’arborer son plus beau sourire, une coiffure étincelante et un élégant costume pour faire aimer la gauche aux anti-gauchos ? Suffira-t-il d’enlever sa veste du passé une fois élu à Carthage ? Suffira-t-il de prôner un discours de division et de haine pour se faire aimer au détriment d’autres ?
Les électeurs qui ont choisi Nidaa Tounes aux législatives sont des « esclaves » s’écrient Sihem Badi, Tarek Kahlaoui ainsi que tous les autres pro-Marzouki qui n’en reviennent toujours pas de leur échec le 26 octobre. « Les esclaves n’élisent que leur bourreau ». Voilà une preuve que nos politiques n’ont rien compris.

Si les consommateurs choisissent un produit et en snobent un autre, c’est tout simplement que le premier produit est bon. Non qu’il soit utile, non qu’il soit bon pour leur santé ou pour leur bien-être mais parce qu’il leur a été bien vendu. C’est là que réside tout le secret d’un bon marketing. Secret que nos politiques semblent avoir du mal à saisir. Si on n’arrive pas à vendre une crème antirides à une jeunette de 18 ans, un VTT à un vieux de 90 ans ou un écran LCD à un malvoyant, ce n’est pas que le consommateur est un con mais que le vendeur est tout simplement mauvais. Les politiques n’ont toujours pas retenu la leçon : les urnes ont toujours raison !

Par Synda Tajine
08/11/2014 | 16:01
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