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Chroniques
Un nouveau monde s’écrit en confinant l’ancien
Par Ikhlas Latif
03/04/2020 | 17:30
3 min
Un nouveau monde s’écrit en confinant l’ancien

 

Nous avons beau insulter les gens qui s’agglutinent devant les bureaux de poste, fustiger leur inconscience, leur manque de civisme et de jugeote, le danger qu’ils peuvent représenter pour eux et pour tout le peuple, nous sommes à côté de la plaque, carrément ! En bonnes personnes cultivées que nous sommes, nous déclamons que l’enfer, c’est les autres et les autres sont ceux qui ne se décident toujours pas à entamer leur huis clos.  

 

Ces gens-là ont faim, leurs enfants crèvent la dalle et je n’exagère en rien. Ils s’agglutinent devant les bureaux de poste espérant empocher, le plus rapidement possible, l’aide promise par l’Etat, espérant que le soir venu, ils feront enfin bouillir la marmite. 200 dinars. Ils s’exposent au risque de la maladie pour 200 dinars. Ils préfèrent mourir du Covid-19 que de voir leur famille dépérir lentement entre quatre murs.

Leur logique nous parait absurde, nous les gens civilisés qui respectons à la lettre le confinement, parce que nous pouvons nous le permettre, parce qu’on continue à toucher nos salaires, qu’on profite de ce moment de répit pour philosopher sur le sens profond de notre existence et essayer les recettes de fricassé et de yoyo de belle-maman. Nos frigos, ils sont remplis à ras bord, nous avons eu tout le temps de nous approvisionner et les moyens de le faire. A la télé, nous avons le choix entre des centaines de bouquets ou Netflix. Nous avons l’internet, nos smartphones, nos tablettes, nos livres, nos Xbox ou Ps4 pour passer le temps. Nous pouvons mettre nos baskets et partir faire une petite marche dans notre quartier calme où tout le monde est à cheval sur l’hygiène. Il ne s’agit pas de se sentir honteux d’avoir tout le confort possible, au contraire, mais un peu d’humilité ne nous ferait pas de mal. Alors baissons d’un ton et halte aux insultes, ça en devient gênant. Voilà qui est dit. Maintenant philosophons sur le devenir du monde…

 

En zappant avant-hier, avachie sur ma méridienne en déprimant ferme, un commentaire accompagnant un reportage sur la pandémie mondiale, a réussi à me sortir de ma torpeur. Ça dit à peu près : « Voilà comment le monde s’est fermé en quelques jours. Son nouveau roi est un virus qui porte une couronne. Il donne ses ordres sur nos écrans, sur notre quotidien, sur notre vie d’humains. Il écrit un nouveau monde en confinant l’ancien ».

Difficile pour l’Homme d’accepter le changement et on nous dit qu’il y aura un avant et un après Covid-19. Si nous restons vivants, parce qu’on nous dit aussi que nous allons tous mourir. La psychose prend une tournure endémique. Difficile de se changer en anticonsumériste, en écologiste convaincu, en être plus en phase avec la nature et la planète à moitié détruite, si ce n’est plus. Mais on dit aussi que les hommes n’acceptent le changement que dans la nécessité et ils ne voient la nécessité que dans la crise.

 

Alors on se met à réfléchir, déjà, au monde d’après. On prophétise l’effondrement du modèle actuel. On remet en question le fonctionnement de notre société et de notre économie globalisée. Ces questionnements sont d’autant plus légitimes que ce système en place montre depuis un bon moment ses limites. La crise due à la pandémie n’est qu’un élément catalyseur d’une réflexion entamée depuis des décennies. Jacques Attali disait que « ce qu'on nomme la crise n'est que la longue et difficile réécriture qui sépare deux formes provisoires du monde ».

Maintenant, il nous reste à savoir si l’humain reconstruira le modèle existant ou s’il ira jusqu’à le réinventer. Indéniablement, il y aura basculement. Mais vers quoi ? Il est fort à parier que l’hypercapitalisme mondial saura retomber sur ses pieds, profiter de la crise et prospérer sous de nouvelles formes.

 

Pour l’heure, partout dans le monde, c'est le silence qui se remarque le plus. Le silence des rues, pas celui des oiseaux, la nature reprend son droit. Le répit sera de courte durée.

Par Ikhlas Latif
03/04/2020 | 17:30
3 min
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Commentaires
Gg
Nazou...
a posté le 05-04-2020 à 15:11
Vous avez raison. Ce virus nous met face à nos excès de façon implacable.
Du même coup, l'intérieur de la Tunisie est relativement protégé: population de faible densité, peu de voyages vers les lieux de forte contamination, économie locale, tout cela va dans le bon sens.
Alors on recharge les téléphones de mes belles soeurs pour qu'elles n'aillent pas à Sousse ou Tunis en ce moment!!
nazou de la chameliere
Gg
a posté le 05-04-2020 à 12:33
le model de tazarki et ses solutions n'ont rien de miraculeuses !
La chine ,il y-a beaucoup d'ouvriers et ouvrieres qui dorment sur place ,a l'endroit meme ou ils et elles travaillent !
Les autres pays ,ont besoin ,surtout les pays pauvres ,de transports en commun !
Supprimer les transports en commun par exemple en Tunisie ,et vous exploserais le nombre de pauvres !
Faut se souvenir des travailleurs agricoles ,qui n'ont pas le choix que les camionnettes pour leur transport ,faute de transport en commun !
Gg
Les 2 modes de propagation
a posté le 05-04-2020 à 12:14
Nazou et Tazarki ont tous les deux raison.
Au départ, le virus a migré de Chine vers la Corée, Japon, Europe...en utilisant comme porteurs les humains voyageurs. Ce sont les fameux "cas importés".
Une fois sur place, commence la "propagation horizontale", comme décrite par Tazarki.
nazou de la chameliere
a tazarki
a posté le 05-04-2020 à 10:07
ça n'est pas essentiellement les transports en commun qui propage l'épidémie .
Mais plutot les voyageurs internationaux !
Ca n'est pas un hasard que ce soit les grandes villes et plutot les capitales mondiales qui sont les plus touchées !
Vous dites beaucoup de betises ,pour un toubib !

BN ,avez-vous eu un bug hier ?
J'avais un postée un com ,mais apparemment il s'est perdu
Dr. Jamel Tazarki
@Madame Ikhlas Latif
a posté le 04-04-2020 à 13:11
Non ce n'est pas la fin du monde, il faut plutôt chercher les causalités et se demander:
a) Pourquoi cette propagation exponentielle du virus corona?
b) Pourquoi les Européens et les Américains sont incapables de neutraliser la vitesse de la propagation exponentielle du virus corona?
c) Et pourquoi la Chine a su maîtriser le covid-19 à Wuhan, oui en Chine la propagation exponentielle du virus corona a subit une réflexion par rapport à l'axe des abscisses, donc elle est ouverte vers le bas ==> le nombre d'infectés diminue suivant une fonction exponentielle (sans entrer dans les détails)

Je reprends ma question ci-dessus :
Pourquoi Wuhan a maîtrisé le covid-19?
C'est tout simplement, parce-que les chinois n'ont pas ces déplacements quotidiens à la con des villes européennes: des millions et des Millions de passagers qui prennent le train, le métro et le bus pour aller au travail/bureau. Ceux de la Banlieue sud vont travailler dans la banlieue nord et inversement, ceux des centres villes travaillent à l'extérieur et ceux de l'extérieur travaillent au centre. Des mouvements hystériques et sans aucun sens... Par contre 99% de ceux qui travaillent à Wuhan vont à vélo au travail et ne prennent ni train, ni bus et ni métro...
==>
Le confinement ne fait aucun sens, si deux millions de Tunisiens doivent prendre des trains, des bus et des métros bourrés de passagers. Et ceci n'est pas seulement le problème de la Tunisie mais de tous les pays "développés"

Il faut que les pays "développés" pensent autrement le transport public... Mais ceci est un autre sujet...

Fazit: La solution la plus efficace à long-terme contre les épidémies virales et de penser autrement le transport public, d'optimiser la structure des grandes villes et de limiter les déplacements hystériques quotidiens de millions et de millions de gens pour aller au travail... Oui, il faut plutôt s'inspirer de la structure des grandes villes chinoises plutôt qu'européennes...

Je prends l'exemple de la Bavière: Des centaines de trains régionaux bourrés le matin de banlieusards qui viennent travailler à Munich. Dites moi s.v.p., comment voulez-vous arrêter la propagation du virus?

Il faut aller voir aussi le métro à Londres, à Milan, à Paris, au Japon, etc.

Fazit: la faute n'est pas au virus corona, la faute n'est pas à la cellule humaine qui est de nature trop bête afin de se laisser infecter, non la faute est à la structure de la ville moderne et aux transports publics qui sont très mal pensés'?'

Oui, les villes chinoises avec la minimisation des mouvements hystériques et inutiles du capital humain ont permis le presque anéantissement du virus corona. ==> je fais référence à L'hyperurbanisation en Chine, on parle de mégalopoles est de compressed modernity dans laquelle les changements économiques, politiques, sociaux et/ou culturels se produisent de manière extrêmement condensée dans le temps et l'espace (je dis bien condensée dans le temps et l'espace).
---> Est qu'est ce que nous avons fait en Tunisie depuis l'indépendance, oui nous avons transformé nos terres les plus fertiles en villes de Banlieues de la capitale Tunis afin de permettre à chacun de nous une charmante villa avec un grand jardin, contrairement aux chinois avec leur compressed modernity.

La banlieue sud de Tunis n'était rien que des terres fertiles, Ez-zahra qui s'appelait jusqu'à la fin des années 70 Saint-Germain était la grande compagne avec des champs gigantesques de pommiers, amandiers, vignobles, etc.

En 50 ans, qui ne sont absolument rien sur l'axe du temps, nous avons détruit notre écosystème, nos terres les plus fertiles, nous avons massacré notre mer méditerranéenne qui pue les excréments humains, etc.,etc., etc. A cela s'ajoutent tous les mouvements quotidiens hystériques et inutiles du capital humain par un transport public en faillite et inefficace.

Le malheur est évident, nous continuons à détruire le reste de nos terres fertiles et de notre mer méditerranéenne, nous continuons à creuser partout des troues non rentables dans le sol afin de faire jaillir quelques m3 de méthane et détruire ce qui reste encore de notre écosystème, nous continuons à nous multiplier sans faire attention au danger de la poussé démographique exagérée'?'

==>
oui nous sommes une victime très facile pour le virus corona, il nous a échec et mat: on s'enferme et nous crevons de faim ou on sort et il fait exploser nos cellules


image de la cellule humaine,
https://www.pinterest.de/pin/596445544377156683/
==>
Oui la cellule humaine est trop bête afin de ne pas se laisser prendre au piège des virus qui se collent à l'un de ses récepteurs et injectent un morceau de leur DNA qui s'intercale dans le DNA de la cellule qui finit par produire des DNA du Virus (c'est le modèle le plus simple de la reproduction des virus) '?'

Viruses, Une vidéo qu'il faut absolument regarder:
https://www.youtube.com/watch?v=wUgEhfo_qxU

Je résume, les solutions existent à long terme, il faut penser autrement nos villes et le transport public.

Dr. Jamel Tazarki, Mathématicien

bahrila
comprenne qui voudra
a posté le 04-04-2020 à 11:58
cette pandémie va tuer plus de gens quand elle sera finie.
un seul remède : diagnostiquer , isoler les porteurs et les traiter à la mode Raoult et laisser les autres bosser , puis contrôler l'immunité par des sérologies et laisser les personnes immunisées travailler. 10.000.000 de tests à 15 euros l'un ça fait 150.000.000 d'euros 450.000.000 de dinars
beaucoup moins que les 2.600.000.000 dinars de dépenses supplémentaires
mansour
La mondialisation : les mêmes causes produisent les mêmes effets,comment le puissant Empire romain s'est effondré
a posté le 04-04-2020 à 11:08
Kyle Harper, professeur à l'université d'Oklahoma en 2017
L'Empire romain s'est effondré parce que le climat s'est modifié au Ve siècle. Le refroidissement a favorisé le développement de germes et de pandémies dévastatrices, qu'on ne peut cependant comprendre sans s'intéresser à la mondialisation romaine et à la circulation des produits,animaux et des hommes
Au début de l'ère chrétienne, d'autres pandémies vont abattre une civilisation plus puissante encore : Rome. En quatre cent cinquante ans, de l'an 150 à l'an 600, la population du monde romain chute de 55 à 35 millions d'habitants: de près de 40 %. Anthropologiquement, la chute a été plus abrupte encore, dans la mesure où les populations romaines ou romanisées d'origine ont été en partie remplacées, au fur et à mesure qu'elles disparaissaient, par des immigrants barbares : Germains, Slaves, Arabes, Berbères. Sans soubassement humain cohérent, l'empire d'Occident disparaît en 476, au profit de royaumes germaniques. Tandis que l'empire d'Orient, devenu néogrec ou byzantin, est en parti supplanté par le virus Arabe au VIIe siècle
nazou de la chameliere
c'est joliment bien écrit Mme Latif
a posté le 03-04-2020 à 21:58
Le monde retombera sur ces pattes !
Autrement dit ,on peut philosopher ,sur ce qui est juste ou pas ,mais,on repartira de plus belle .

Sinon j'adore les méridienne ,j'en ai une aussi !
Gg
Oui, peut-être...
a posté le 03-04-2020 à 19:23
Très beau thème de réflexion, essayons de faire court...

La nanobestiole nous inflige un certain nombre de leçons fondamentales.
La première, à mon sens, est que l'Homme appartient clairement au règne animal. Notre anthropocentrisme nous a de tous temps poussés à affirmer le contraire. Ainsi, nous serions issus d'un couple fondateur, Adam et Eve, nous posséderions une âme que les animaux ne posséderaient pas etc... nous serions même protégés des virus qui attaquent les animaux par la fameuse barrière des espèces. Et patatras, voici que la nano bestiole migre de la bête à l'Homme. Ce n'est pas un cas inédit, la rage, la peste... ont déjà montré que l'Homme appartient bien au règne animal.
Personnellement, cela me convaincrait, si c'était encore nécessaire, que les poissons, les oiseaux, les autres mammifères, sont bien mes cousins.
La deuxième leçon est que la nanobestiole, dans sa formidable faculté à se reproduire et à s'adapter à ses hôtes involontaires, ne fait aucune différence entre les religions, les Etats, les riches et les pauvres. Voyons ce qui se passe aux USA, dont le président affirmait il y a dix jours que ce n'était certes pas un virus qui allait affecter The Première Puissance du Monde!
Ironie du sort, voilà que les USA, où 47% des citoyens ne disposent d'aucune couverture santé, vont devoir soigner gratis les plus miséreux. Même les noirs, c'est dire!
Formidable leçon qui nous inflige violemment la sanction: si l'espèce veut survivre, la santé devra être assurée à tous, sur cette petite planète.
Troisième leçon, et non des moindres, les pays se comportent comme des pirates pour des masques, des ventilateurs respiratoires, des lits. On découvre soudain que les Etats, pour être souverains, c'est à dire être libres de décider eux-mêmes de leur sort, doivent être capables de produire eux-mêmes ce dont dépendent leurs fonctions régaliennes.
La France produit des fusées, des Airbus, des Rafale, des autos... mais pas de masques ou de coton-tiges, et voilà PSA, Renault, Valeo, Schneider etc... reconvertis en producteurs de masques et respirateurs!
C'est ça, ou crever.
Voilà nos décideurs, qui hier clamaient que la santé n'avait pas de prix mais tout de même un coût, les voilà qui soudain se fichent des cours de bourse et des plans de croissance.
C'est ça, ou crever.
Bon bref, je me suis fait comprendre!
Troisième leçon: la planète, soudain, se porte mieux.
Ben oui, depuis qu'on ne brûle plus plus de carbone que ce que la planète est capable de recycler, l'air en Chine, à Paris ou à Tunis est redevenu limpide et respirable. L'atmosphère se soigne, très vite!
Faudrait-il donc abandonner cette folie de déplacer un camion pour se faire livrer un livre venu de Chine par avion dans les 24h? Ou des fraises en décembre?
La mondialisation et son corollaire, la croissance sans limite, montre clairement qu'elle est une folie.

Donc, il devrait y avoir un après. Plus fraternel, plus frugal, plus centré sur l'humain. Et le modèle n'est pas les plus riches! Nous allons voir bientôt si nous sommes différents des rats, qui pullulent et anéantissent leurs ressources jusqu'à crever de maladie ou de faim. Ou si nous sommes condamnés à finir comme eux lorsqu'ils sont en surnombre.

Bon, STOP, c'est long!