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Tunisie – Retour de vacances pour les salafistes
20/08/2012 | 1
min
Tunisie – Retour de vacances pour les salafistes
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Après s’être éclipsés pendant quelque temps, au point que plusieurs médias s’interrogent sur le sens de cette absence, les salafistes ont refait surface, accaparant de nouveau l’attention de l’opinion publique, notamment à la fin de ce mois saint de Ramadhan.
Les salafistes semblent avoir choisi pour cible des événements culturels, qu’ils jugent blasphématoires ou contraires à l’Islam. Ils ont, récemment, multiplié les actes de sabotage des œuvres, spectacles et autres événements artistiques, à commencer par des sit-in de blocage sur les lieux des spectacles, jusqu’à l’attaque armée de la maison de la culture de Bizerte dans la soirée du 16 août dernier...
Ces hostilités orientées contre la culture et l’art, se produisent et se multiplient tout en gagnant en ampleur et en gravité, hostilités auxquelles les forces de l’ordre et le gouvernement ripostent bien timidement et, parfois, ne se manifestent pas du tout.


Ainsi, au cours d’une même semaine, trois attaques ont été perpétrées, ayant pour cibles des événements culturels. Le phénomène avait débuté bien avant ces trois attaques, avec l’exposition d’El Abdelliya, quand un groupe de salafistes et de délinquants avait saccagé les œuvres d’art exposées qui, selon eux, portaient atteinte au sacré. Ensuite, est survenu l’empêchement du spectacle de Lotfi Abdelli à Menzel Bourguiba, suivi du sabotage du concert de Lotfi Bouchnaq accompagné de la troupe des « soufis » iraniens à Kairouan, pour en arriver au grave incident de Bizerte.

En cette soirée, quelque 200 "barbus" ont fait usage de violence pour empêcher la tenue d’une conférence organisée par une association bizertine, dans le cadre de la "Journée d’El-Aqsa" et qui comptait parmi les présents l’ancien détenu libanais dans les geôles israéliennes, Samir Qantar, indésirable pour eux car considéré pro régime de Bachar El Assad en Syrie.
Au cours de cette dernière attaque, les assaillants ont fait usage de bâtons et de sabres, ce qui a engendré plusieurs blessés, dont des images poignantes ont été diffusées dans les médias et sur les réseaux sociaux et ont entraîné un grand mouvement de colère et d’indignation parmi l’opinion publique.

Ennahdha, en tant que parti islamiste au pouvoir est pointé du doigt pour avoir été passif face à cette violence et clément avec les salafistes. Certains accusent Ennahdha même de complicité.
De leur côté, les autorités compétentes se sont montrées peu convaincantes tant par l’inaction, voire carrément leur inertie, que par les commentaires. Ainsi, l’intervention des forces de l’ordre a tardé à venir ou alors a fait défaut dans la plupart des cas.

Face aux accusations de l’opinion publique et notamment l’opposition, le ministère de l’Intérieur se justifie tantôt par "la délicatesse de la situation, tantôt par "une mauvaise appréciation de la situation". Toujours est-il que le même département de l’Intérieur reste peu bavard et peu explicite à ce sujet comme s’il y avait une crainte dissimulée à l’égard de ces groupes de salafistes. Dans le cas contraire, il s’agirait bien alors, selon les observateurs, d’une complaisance.
Le ministère de la culture, lui, s’est contenté de diffuser un communiqué, qui déplore, condamne, et regrette les incidents. Ce communiqué n’a nullement impressionné les salafistes puisqu’ils ont repris, le soir même, leurs attaques "de plus belle".

En fait qui sont-ils, ces salafistes? Pourquoi font-ils si peur? Et pourquoi ciblent-ils la culture précisément? Autant de questions qui intriguent et auxquelles on ne trouve pas forcément les bonnes réponses.
On sait tous que les islamistes extrémistes se sont structurés depuis la révolution sous forme de partis politiques ou d’associations, et plusieurs d’entre eux ont graduellement obtenu leurs visas. Sauf que les évènements récents ne portent la signature d’aucun organisme connu et officiellement reconnu. Les salafistes qui ont agressé, battu, pillé, détruit, portent juste des barbes, des jilbabs, des drapeaux noirs et parfois des armes blanches ou des matraques. Il s’agit probablement d’individus qui essaient de faire la loi d’une manière arbitraire en ayant recours à la manière forte et en semant la terreur parmi les populations paisibles. Ou bien, y aurait-il quelqu’un qui se cacherait derrière eux et qui serait en train de tirer les ficelles en orchestrant leurs actes?

Il reste tout de même évident que ces salafistes, s’en prennent, généralement et bien clairement, à la culture et aux œuvres d’art. Et c’est là justement où réside le caractère dangereux de leurs actes. En effet, étant donné que l’art et la culture, en général, représentent l’expression civilisationnelle d’un peuple, toute répression et tout étouffement en la matière équivaut à un étouffement de toute la civilisation.

La Tunisie, riche de son histoire trois fois millénaire, de sa diversité, de son ouverture et de sa modernité, est en train de se faire voler cette richesse.

Si ces salafistes veulent ôter les couleurs du pays, effacer ses traits et faire taire sa voix, ils projetteraient d’aller trop loin. Et ils y parviendront si le gouvernement continue à leur faire les yeux doux et si les partis politiques et la société civile se laissent faire ou adoptent la politique de l’autruche et une attitude molle et passive.
20/08/2012 | 1
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