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Nidaa Tounes n'est pas le seul vainqueur des élections
29/10/2014 | 1
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Nidaa Tounes n'est pas le seul vainqueur des élections
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Il y a des partis qui ont surpris par leurs bons résultats aux dernières élections législatives, même si le degré de surprise change d’un parti à un autre. Le Front populaire, l’Union patriotique libre (UPL), Afek Tounes et, un peu plus bas dans le classement, Attayar de Mohamed Abbou, composent ces partis qui seront les arbitres de la prochaine assemblée dans le duel Ennahdha-Nidaa Tounes. Lecture des résultats de ces partis pourtant bien différents.

Un statut Facebook a été mis en ligne ces derniers jours disant que la Tunisie est le seul pays au monde où un électeur peut hésiter entre Afek Tounes et le Front populaire. Cette remarque faite sur le ton de l’ironie possède néanmoins un fond de vérité.
En effet, si l’on analyse la campagne électorale menée par ces deux partis, on remarquera rapidement un point commun déterminant : Il s’agit de partis qui ont privilégié le travail de terrain aux apparitions médiatiques répétées et stériles. En parlant de campagne, on peut aussi saluer l’originalité et le dynamisme de la campagne digitale (sur les réseaux sociaux) de Afek Tounes qui n’a pas hésité à réunir ses principaux leaders autour d’une chanson.
Un autre point commun se dégage entre Afek Tounes et le Front populaire. Ces deux partis ont donné une place centrale dans leur discours à la proposition politique et aux programmes. Certes, il existe des différences fondamentales entre les deux programmes, mais force est de constater que les Tunisiens n’ont pas été insensibles à ce discours constructif. Avec une quinzaine de sièges, le Front populaire peut considérer son résultat comme une grande victoire. Outre le programme et l’attitude pendant la campagne électorale, les Tunisiens n’ont pas oublié les martyrs du Front : Chokri Belaïd, Mohamed Brahmi et Mohamed Belmofti.
Afek Tounes, quant à lui, a réalisé la performance de doubler son nombre de sièges par rapport à 2011. C’est un parti qui porte une idéologie et une mode de pensée clairement défini et qui a comblé sa jeunesse et son inexpérience par un travail continu dont la campagne n’a été que la consécration. Il est probable que les électeurs de Afek Tounes proviennent des réservoirs de voix de partis comme Al Joumhouri, l’Alliance démocratique ou l’UPT.
Ces deux partis pourront jouer les arbitres lors des discussions de la prochaine assemblée nationale. Leur poids en termes de siège fera en sorte qu’ils seront courtisés par les deux grandes puissances du Bardo, Nidaa Tounes et Ennahdha. Certaines rumeurs disent même que les tractations ont d’ores et déjà commencé et les analystes de la place commencent à disséquer les scénarios possibles. Dans le cas de ces deux partis, on peut se livrer à ce genre de pronostics en se basant sur l’idéologie portée par chacun d’eux.

Toutefois, il y a un autre parti parmi ces gagnants qui est une grande inconnue : l’Union patriotique libre. L’UPL est un parti créé et présidé par Slim Riahi, le controversé homme d’affaires président également de l’association sportive du club africain. Ce parti a réussi à être au coude à coude dans les résultats avec le Front populaire malgré l’absence de tout programme précis et chiffré et malgré sa nouveauté sur la scène politique. Il est tout à fait possible que d’autres leviers aient été utilisés pour parvenir à drainer autant de voix. Quoi qu’il en soit, c’est désormais une composante non négligeable de l’assemblée nationale. Malgré cela, il y a des bruits de couloir qui prédisent à ce parti un isolement politique semblable à celui qu’avait connu Al Aridha Echaâbiya après les élections de 2011. Bien que deuxième force du pays après Ennahdha en 2011, le parti de Hachmi Hamdi avait été mis au ban et ses députés n’ont servi qu’à faire le show dans l’assemblée et servir de mascottes dans les plateaux télé. Selon d’autres avis, le parti de Slim Riahi n’est pas moins courtisé que le Front populaire ou Afek Tounes et il pourrait devenir un allié de choix pour l’un des deux mastodontes de l’assemblée, même si cela paraît improbable.

Un quatrième parti a également créé la surprise : le courant démocratique (Attayar). Le parti fondé par Mohamed Abbou, ex-secrétaire général du CPR, a réalisé un score satisfaisant. Si l’on prend en compte le passif de Mohamed Abbou et la naissance récente du parti, obtenir 5 sièges peut être considéré comme une bonne performance. Il est à noter également que le parti Attayar a servi de refuge aux déçus du CPR. Idéologiquement proches pour ne pas dire identiques, le CPR et Attayar braconnent sur les mêmes terres en terme électoral. La différence entre les deux s’est faite au niveau du bilan, Attayar jouit du bénéfice du doute en comparaison avec le CPR qui traine un bilan désastreux et qui n’a réalisé aucune de ses promesses électorales. Toutefois, certaines dérives et certains verbiages peuvent jouer des tours au parti Attayar.
Par exemple, Samia Abbou, tête de liste du parti à Tunis 1 et membre de la prochaine assemblée, a déclaré sur Jawhara FM le 29 octobre 2014, que « les pratiques de Nidaa Tounes pendant les élections rappelaient celles du RCD » en ajoutant que le vote à ces élections était une sanction à la Tunisie et non pas au parti Ennahdha. Mme Abbou a continué dans un discours d’exclusion en se dressant en gardienne contre le retour de l’ancien régime. Ce type d’égarements, même si Samia Abbou en est une adepte, devrait être mieux contrôlé de la part du parti Attayar s’il veut continuer à se construire.
Les élections ont clairement montré que les Tunisiens n’étaient plus sensibles au discours vengeur et nerveux de ce type de « révolutionnistes ». Par ailleurs, pour revenir au cas de Mme Abbou, rappelons qu’elle s’est longtemps réfugiée derrière son immunité parlementaire pour éviter de se présenter devant les tribunaux. Donc, le discours de la lutte, du droit et de la transparence mériterait davantage de cohérence de la part de ceux qui en font leur cheval de bataille.    

Afek Tounes, le Front populaire, l’UPL et à moindre mesure, Attayar, pourront jouer un rôle déterminant au sein de la prochaine assemblée nationale. Ils pourront, au choix, participer activement à la stabilisation du pays ou bien jouer un rôle bloquant, voire néfaste. Même si l’on est, à peu près sûr de l’attitude qui sera adoptée par deux d’entre eux, le mystère reste entier pour les deux autres…
29/10/2014 | 1
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