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Chroniques
Nobel vous avez dit ?...
10/10/2015 | 17:47
4 min

 

La Tunisie s’est vue décerner hier, et devant le monde entier, le prix Nobel de la Paix ! On ose à peine y croire tellement la nouvelle est énorme. Et elle l’est ! La Quartet formé par les deux centrales syndicale et patronale, la Ligue des droits de l’Homme et l’Ordre des avocats a réussi l’impossible, permettre à la Tunisie de hisser son drapeau au sein de cette institution à renommée internationale qui a vu défiler les plus grands : Martin Luther King, Nelson Mandela, Mère Theresa… pour ne citer qu’eux. La pluie de félicitations qui s’en est suivie a réussi à rendre fiers les plus sceptiques des Tunisiens…enfin en majorité. En réalité, passée l’euphorie du moment, on se rend compte que ce prix divise. Et je dois avouer que je comprends pourquoi. Hormis les quelques agités du bocal qui estiment que toute récompense nationale décernée pendant le pouvoir actuel doit être dénigrée et descendue en flèche, certaines personnes, tout ce qu’il y a de plus lucides, préfèrent cacher leur joie.

 

Réunir syndicat et patronat autour de la même table. Il fallait le faire. Réunir des politiques que tout oppose et qui se déchirent tous les jours, il faut quand même reconnaitre que la partie n’a pas été aisée, surtout si on se rappelle bien du contexte de l’époque dans lequel le dialogue national a été tenu. Mais en habituelle sceptique que je suis, je ne peux m’empêcher de penser que ce prix est pour le moins ironique. Ce prix récompense, habituellement, « la personnalité ou la communauté ayant le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion et à la propagation des progrès pour la paix ». Le Quartet a réussi à garantir la paix en Tunisie et à éviter une guerre civile, on ne cesse de nous le marteler. Ceci peut être en partie vrai étant donné que les discussions entre politiques de l’époque se déroulaient sur des charbons ardents et qu’après les premières élections démocratiques de l’histoire du pays, chaque partie se sentait obligée de rouler des mécaniques et de montrer qu’elle en avait dans le pantalon. Le Quartet leur a donc offert une douche froide, plutôt salutaire il faut l’avouer. Mais avait-il la légitimité de le faire ?

Alors que la légitimité a été le sacro-saint mot de l’époque, ne peut-on pas dire que le Quartet s’est opposé à la légitimité des élections ? Alors que le premier scrutin était reconnu comme étant transparent, des organisations nationales décident que, pour le bien du pays (soit !), il fallait ôter au vainqueur son pouvoir et en donner un peu plus aux perdants. Le peuple avait choisi les islamistes mais sa volonté a été bafouée sous prétexte de l’intérêt national (soit !) et sous prétexte que le peuple avait mal choisi (l’expérience  égyptienne n’aidant pas). N’est-on pas en train de marcher sur la tête ?

 

 

Il est vrai que l’euphorie ambiante rend certains amnésiques, mais c’est ce qui s’est passé à l’époque. Certains peuvent reconnaitre que le travail du Quartet a évité à la Tunisie un bain de sang, ceci est peut être vrai, mais on ne le saura jamais. La Tunisie était dans une situation très délicate à l’époque entre terrorisme, assassinats politiques et guerres fratricides entre partis politiques. Mais quel message ce prix renverra-t-il au monde ? Au-delà de la fabuleuse opération com’ que la Tunisie s’est offerte, cette récompense ne veut-elle pas tout simplement dire que nous, pauvres Tunisiens du tiers monde, nous ne sommes tout simplement pas bons pour la démocratie ? Qu’une institution à renommée internationale réunissant un jury de pays qui ne jurent que par la démocratie et les droits de l’homme, ait consacré l’action du consensus au détriment de celle de la démocratie est plutôt sidérant !

 

A la lumière des Printemps arabes, le monde occidental s’est posé plusieurs questions. Il était primordial de savoir si la démocratie était possible dans des « contrées » comme la notre et si islamistes et autres prétendus laïcs pouvaient cohabiter en paix. Ce prix répond-t-il à ces deux interrogations ? Face à des exemples tels ceux donnés par l’Egypte et l’Algérie voisine, la Tunisie a su tirer son épingle du jeu. Loin de l’Egypte qui a choisi de faire la peau aux islamistes et de l’Algérie qui a tourné le dos à la démocratie, la Tunisie a certes choisi une solution plus subtile afin de réussir cet impossible casse-tête. Mais cette solution ne s’est pas faite dans le respect total de la démocratie. On a préféré ôter aux islamistes leur pouvoir issu de la majorité. On a préféré aussi se substituer aux débats, légaux, entre élus de l’Assemblée nationale constituante. Tout cela pour le joli résultat que l’on voit aujourd’hui où ces mêmes islamistes, bien qu’éjectés du pouvoir par les urnes cette fois-ci, ont fait ami-ami avec leurs ennemis d’hier.

 

Ce prix Nobel est un espoir certes, l’espoir qu’un jour nous puissions faire mieux. Mais ce n’est pas cette fabuleuse victoire qu’on veut nous vendre. Cette récompense intervient à un moment particulier où les libertés restent encore bafouées, où les Tunisiens sont encore traités comme des sous-citoyens et où la Constitution n’est respectée qu’un jour sur deux. Il est possible de reconnaitre que l’intervention du Quartet a été salutaire, mais la situation n’est certes pas forcément beaucoup mieux aujourd’hui…

10/10/2015 | 17:47
4 min
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Commentaires (32)

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Rifal
| 18-10-2015 10:22
En pleine tourmente d'égos démesurés, de haine, de myopie collective, l'histoire retiendra que deux hommes ont joué un rôle déterminant pour initier, proposer et presser la mise en place du dialogue national et la nécessité impérieuse d'"adoucir toutes les extrêmes ».L'un est un tunisien écouté, l'autre est une grande personnalité internationale. Houssine Abassi en sait quelque chose. Le prix Nobel vient couronner un tournant important de la transition démocratique post révolutionnaire tunisienne.C'est tous les tunisiens démocrates qui sont ainsi récompensés par le biais de ce quartet.
Les détails suivront mais c'est aux vrais historiens qui savent dénicher les faces cachées de l'iceberg politique, de revenir en arrière sur cette époque pour comprendre.

Aucun
| 15-10-2015 10:27
Je formule un rêve : avec ces deux milliards de centimes , pourrions nous offrir à notre pays de vraies déchetteries , des camions poubelles performants, des éboueurs bien payés avec des tenues adéquates, de jolies poubelles à chaque coin de rue, des produits pour nettoyer tous ces tags affreux qui enlaidissent le patrimoine.Bref: viser un corps sain ou pourrait s'épanouir un esprit saint

rayan benne
| 14-10-2015 16:41
Si le Quartet n a rien à se reprocher, qu il rende publique sa demande pour voir les motivations de cette demande.
Beaucoup disent probablement la demande a été motivée par la haine des islamistes et par là sous entendre la révolution.

HBM
| 14-10-2015 14:52
Synda ,
Pour nous écrire des inepties pareilles, il fallait mieux s'abstenir '
Analyse de mauvaise facture ' même pas acceptable d'un jeune journaliste débutant.
Votre rédacteur en chef doit être plus vigilant.
HBM

rayan benne
| 14-10-2015 10:50
Beaucoup disent que ce Prix n est qu une récompense à la haine contre les islamistes. Si ce n est pas vrai, que le Quartet publie sa demande introduite auprès du Prix Nobel, pour voir leur motivation; probablement ils l ont motivée par une haine des islamistes!
Et maintenant parlons argent. Que vont ils faire avec ce fameux pactole de 2 milliards de millimes?
Vont ils le déposer à la trésorerie nationale, vont ils subvenir à des utilités par exemple offrir des ambulances qui manquent partout dans le pays (...); ou simplement vont ils garnir leurs comptes qui sont déjà bien garnis!
***!

habib
| 12-10-2015 07:37
il aurait mieux valu parle du temsps qu`il fait

jamel
| 12-10-2015 07:37
j'aime souvent partager votre point de vue sur ma page pour sa lucidité, sa maturité, ... cette fois ci, très déçu ... argumentaire " tiré par les cheveux " ... discours rhétorique qui ne fait que remuer le couteau dans la plaie !!! comme nous disaient nos maîtres : " peut s'améliorer !!! " @+ ...

déja-vu
| 11-10-2015 22:14
Dans son livre, Rached Ghannouchi le décrit comme « un fidèle compagnon qui a rendu à l'islam des services plus que beaucoup de musulmans ». Voila. Et les gaz du lablabi nous montent à la tête ! Et on oublie le sieur Noah Feldman.

Qui a écrit votre constitution?
Qui a réunit les ennemis mortels?
Qui a imposé les dictats du quartet?

Pas un seul petit 'merci'?! Une petite allusion?! Un tout petit 'thanks' minuscule?!
Les ingrats eternels!

Sincèrement, à votre place, j'érigerais une statue de cet homme dévoué à son pays.

Un peu de décence! Un zest de modestie!

Attendez qu'on meurt au moins, avant de vous inventer des contes à dormir debout sur la sagesse d'ommi sissi et l'esprit de consensus des ouigours et des shamans!

Pauvre Gassas! Cet homme modeste y croyait vraiment...Il est clair qu'il était plus intelligent que beaucoup de ceux qui se moquaient de lui. Lui au moins a fini par comprendre...Il a failli en devenir fou!!!
Mes respects, Monsieur.

dadilesage
| 11-10-2015 19:57
Les choses sont beaucoup mieux en Tunisie aujourd'hui qu'elles l'étaient à l'époque de la Mafieuse Consituante. Celle ci était dominée par les Islamistes qui ne cherchent que renvoyer le pays au Moyen Age,répandre le terrorisme,créer un état parallel,une police paralelle et remplir les postes imporants et autres par leurs fideles et adherents qui n'avaient aucune qualification.On en vu de toutes les couleurs.Vous avez peut etre la memoire courte mais moi je n'oublierai jamais les cauchemares quotidiens.
Voir meme la psychologie de voir Bajbouj le patriote et de l'entendre parler en Tunisien,par rapport au traitre vendu de Qatar placé à Carthage par les Mafias Islamista.Et sonn probleme de Safirat...Quelle Soulagement.What a Relief!!!
Les Islamistes ont dépassé leurs légitimité electorale qui n'était pas sans reproches avec beaucoup de vol et de traffic et d'argent des Freres de Turquie,Qatar et autres et des milliards de dollars dans les valises et des associations criminelles religieuses de but lucratif politique.
Good riddance.Imagine une Tunisie sans les Islamistes,sans Ennakhba,sans cpr,imagine que ces arrieres n'existaient pas,combien le pays serait il beau,serein,developpé et prospère.Tout ce que je leur souhaite c'est la disparition de mon pays parceque nous Tunisiens,nous savons bien vivre et bien vivre en paix.

Forza
| 11-10-2015 19:14
Ils peuvent bien vivre avec les dictateurs. Apres la visite d'Hollande lors de l'inauguration de l'extension du canal suez voilà que Valls se dépêche au Caire. Le gouvernement français aime les dictateurs quand ils placent des contrats de milliard d'Euros (vente des rafales lors de la visite d'Hollande, signature de contrats pour les mistrals lors de la visite de Valls). Merkel a accueilli Essissi come un héros a Berlin et Siemens signait un contrat de 6 milliards d'Euro pour des centrales électriques. Les tunisiens sont les seuls responsables de la démocratie en leur pays s'ils veulent la réaliser. L'occident, Poutine ou la Chine (les gouvernements bien sûr) sont prés à travailler avec n'importe quel gouvernement qui garantisse leurs intérêts. Ils ne peuvent être royalistes plus que le roi. Le gouvernement américain d'ailleurs supporte Essissi avec les hélicoptères de combat qu'il utilise au Sinaï pour bruler tout surtout après la pression du lobby sioniste comme AIPAC au profit d'Essissi, le général qui réalise les rêves des généraux israéliens de faire noyer Gaza. Quelques liens sur cette alliance Essissi-AIPAC :
http://jfjfp.com/?p=47659
http://www.al-monitor.com/pulse/originals/2014/06/aipac-us-aid-egypt-stop-cut.html#