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Mehdi Jomaâ antiterroriste : en attendant les hélicos ?
29/07/2014 | 15:59
4 min
Mehdi Jomaâ antiterroriste : en attendant les hélicos ?
Par Wicem SOUISSI (*)

C'est l'histoire des hélicoptères qui se font dangereusement désirer. A l'image de Godot de Samuel Beckett —les deux uniques personnages visibles de sa pièce de théâtre dialoguent sans cesse, en attendant de... ne point le voir venir—, les hélicos de combat nécessaires à la lutte antiterroriste en Tunisie ont un horizon de livraison qui, depuis au moins l'été dernier, ne cesse de reculer, reculer encore. Et reculer toujours? Au profit de qui, d’ailleurs, alors que le danger terroriste est menaçant, notamment à l'ouest comme au sud du pays?

Silence radio à Tunis. Comme s'il s'agissait, pour le gouvernement tunisien, d'informations classées secret-défense. Mais, publiquement, les nouvelles à ce sujet proviennent plutôt de l'étranger. D'ailleurs, dès le départ: à l'automne 2013, le journaliste Georges Malbrunot, spécialisé dans le Moyen-Orient, avait le premier lancé une fusée éclairante jusqu'au Maghreb; il faisait état de marchands d'armes américains en embuscade, des discussions avancées entre Paris et Tunis pour finaliser l'achat de 6 hélicoptères européens Caracal (Oreilles noires en turc) —pour environ 400 millions de dollars. Et depuis? François Hollande, qui est venu en Tunisie en hiver et a reçu à l'Elysée le chef du gouvernement tunisien au printemps, est entré dans la négociation. Toutefois, au lendemain de l'horreur de l’opération de Henchir Tella à la frontière algérienne, Mehdi Jomâa livre certes jusqu'à l'ennui le détail des technologies d'appoint qu'il sollicite des puissances alliées. Mais il ne communique guère sur l'artillerie lourde dont a également besoin l'armée tunisienne. Cela alimente, à tort ou à raison, de sérieux doutes sur la volonté gouvernementale de doter les militaires des moyens d'adapter leurs capacités à l'ennemi salafiste armé. Et nourrit aussi des rumeurs, aux apparences fantaisistes, de marchés aux commissions juteuses.

Est-ce bon signe dans le combat contre le terrorisme islamiste? Certainement pas. Doublé d'un mutisme confinant à l'opacité, cet attentisme gouvernemental est dévastateur. Cela donne l'impression que l'on reproduit celui du précédent locataire de La Kasbah, Ali Laârayedh, dont nul n’ignore que le zèle à combattre les salafistes fut des plus actifs... à reculons. De soupçons confortés par son appartenance à l’ancien gouvernement de ce dernier en scepticisme quant à son émancipation de son ancienne équipe, la crédibilité antiterroriste de Mehdi Jomâa en est, bon gré mal gré, affectée.

Là, une fois de plus depuis l'étranger, un ancien contrat, datant vraisemblablement de 2010, refait surface. Alors qu'une attaque terroriste succède à Sakiet Sidi Youssef à celle du mont Châambi, c'est au tour des Américains de fournir, et de confirmer dimanche dernier, une autre information; elle traduit leur succès face à leurs concurrents français. Requérant du Congrès des sénateurs son aval, le Département d'Etat (ministère de la Défense) venait pour sa part d'approuver une commande tunisienne, non pas de 6 mais de 12 hélicos Black Hawk (Faucon noir). Ce doublement quantitatif, à un coût quasi doublé aussi —700 millions de dollars— se traduit-il en surcroît qualitatif? En tout cas, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, qui se félicitait en février dernier que le nouveau gouvernement transitoire tunisien soit composé essentiellement d’anciens élèves des grandes écoles françaises, en sera pour ses frais.

En Tunisie, cependant, malgré l'amplification du risque terroriste venant de Libye cette fois, l’absence de communication gouvernementale demeure constante. Tout au plus se rappelle-t-on les propos de Mehdi Jomâa sur ses efforts pour raccourcir les trop longs délais de livraison de matériel de détection sensible; ils confirment du même coup, et malgré lui, que la remise des hélicoptères, autrement lourde à réaliser, risque d’avoir lieu trop tard pour donner un avantage décisif aux forces militaires tunisiennes. Un renfort si tardif que ces hélicos, toujours pas en vue, rappellent un autre personnage de théâtre, déterminé lui aussi, comme Godot, par son absence physique de la scène, et entré dans le langage courant: l'Arlésienne de Alphonse Daudet, — son fiancé, désespéré, feint néanmoins la gaité, puis, finalement, se suicide.

Mais, quoi qu'il en soit de l'imaginaire créatif, qu'en est-il de la réalité des Caracal et des Black Hawk? Dommageable pour la Tunisie, la concurrence franco-américaine est-elle le reflet d'un conflit de compétences voire d'intérêts entre les deux pôles chargés de la Défense nationale: le palais de Carthage version Moncef Marzouki et La Kasbah selon Mehdi Jomâa? Le gouvernement, qui n'a d'ailleurs pas évoqué, fût-ce du bout des lèvres, d'investissements en hélicoptères en faveur de l'armée, compte-t-il à cet égard rester muet? Cadres et troupes militaires, qui lisent les journaux comme tout un chacun, demeureront-ils en conséquence dans l'expectative, au péril de leur moral, d'une couverture aérienne efficace? Ou bien, après avoir enfin sonné le clairon du réveil pour combattre le terrorisme islamo-intégriste, le gouvernement, dans un élan non démenti de lucidité et de courage, se donnera-t-il, sans tarder indéfiniment, les moyens héliportés de lui donner des assauts concluants? Toujours est-il que, face à la menace pour leur sécurité, les Tunisiens ne verraient aucun inconvénient, dans l'attente du renfort déterminant de ces hélicos pour l'heure virtuels, que la guerre tunisienne contre le terrorisme aux frontières soit secondée par les appareils et les pilotes de nos puissances alliées. Autrement dit, du fait d'un danger international, dans les circonstances actuellement exceptionnelles, il est impératif de prendre des décisions d'exception.


(*) Journaliste
29/07/2014 | 15:59
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Commentaires (12)

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tounsi blidg
| 08-05-2016 18:09
12 helicos pour 700 millions de dollars ca parait enorme mais les ricains nous font une fleur car ils nous refilent une multitude d equipement tres couteux qui ne sont pas forcement factures....
la preuve les 24 kiowas pour 101 millions de dollars.dont 45 millions de $ d equipement neuf de vision nocturne. de leurres anti missiles de missiles hellfire et autres roquettes..
dans le domaine de l armement l empressement est une erreur enorme !....

Gg
| 06-08-2014 21:23
Comme le dit un intervenant, il faut attendre mi 2015 que des hélicoptères soient livrés, car il faut ce temps pour former les pilotes et les techniciens, 6 mois à 1 an.
Or c'est maintenant, tout de suite, que le besoin existe. Il faudrait donc mettre à disposition de l'armée tunisienne des hélicos avec les pilotes et les équipes au sol.
Bref, une coopération immédiate.
Alors cette histoires d'hélicos très chers livrés très tard est bien étrange...

Atlas69
| 30-07-2014 19:49
Pas de cette manière et pas à ce prix.

Les hélicoptères sont devenus indispensables pour soutenir l'armée en grande difficulté .

Entre le Hawk et le Caracal, il y avait des choix plus judicieux d'acheter de veritables engins d'attaques et de transport de troupes et ceci pour moins cher.

Le choix est grand et il y a tous les prix , n oublions pas qu on ce bas contre des paysans entrainés et malins et non pas contre une armée moderne et équipée.

le choix des Hawks restent à mes yeux politique de toute façon nos soldat feront sans et ceci pour un bon moment de quoi raviver encore plus leur moral ( Ironie).

De plus la démission de général Hamdi ne les aidera pas plus .

WICEM SOUISSI
| 30-07-2014 13:17
Bémols :
1/ Missions différentes selon les hélicos, merci de le souligner, mais pour l'heure il n'y a même pas d'hélicos...
2/ Si, ils peuvent donner un avantage décisif. Pourquoi se référer si loin (Afghanistan, Somalie sont des terrains totalement différents) ? Rappel, les derniers Fellagas récalcitrants à l'indépendance et au dépôt de leurs armes ont été délogés par des hélicos en Tunisie.
3/Tout à fait d'accord, comme je le disais dans une précédente réflexion ici, faut des moyens, et du temps, beaucoup de temps même, et des moyens autres que militaires pour lutter contre les terroristes au sein de la société.
W.S.

adel B
| 30-07-2014 09:46
D'abord les 2 types d'hélico ne répondent as à la même mission, les caracal, plus modernes servent plutôt pour projeter des forces commandosderrière les lignes ennemies et de les récupérer, les black wawk, de conception beaucoup plus anciennes, servent plus à des attaques ciblées au sol. ça traduit peux être un changement dans la stratégie tout simplement.

Deuxièment, des hélico n'ont jamais pu faire la différence contre des insurgés organisés en petites bandes et dessimés dans des terrains montagneux ou avec couverture forestière. l'expérience nous montre l'ehec des forces américaines en Afghanistant, somalie, irak etc.

Troisièmement il est plus judicieux de consacrer cette somme faramineuse : 1000 milliards à développer le renseignement et à éradiquer les véritables causes du terrorisme : pauvreté, chomage, absence d'infrastructure et de loisirs à Kasserine, Kef et autres bastions terrosites

WICEM SOUISSI
| 30-07-2014 09:42
Merci @ourwa de votre commentaire critique. Toutefois, en dépit du fait qu'il soit vraisemblable que, dans cette affaire d'achats d'hélicoptères de combat, Marzouki et Jomâa semblent plus proches du conflit de compétences que du conflit d'intérêts, je ne crois pas qu'Américains et Français soient, aujourd'hui, favorables à un Sévéso politique en Tunisie, comme vous dites en référence, avant Tchernobyl, à la plus grande catastrophe depuis Hirochima et au fait qu'on nous assimile, à la faveur des « printemps arabes » (sic) à un laboratoire démocratique où, à vous suivre, la dioxine politique, d'origine salafiste ou pas, est déversée jusqu'à ce que toute vie politique trépasse. Une fois par eux accepté le fait accompli de Sissi en Egypte, les Etats-Unis et la France n'y ont plus vraiment intérêt.

Que vous estimiez d'autre part que des élections présentent le risque de légitimer un gouvernement selon vous apolitique et toujours à vous lire "garant, dites-vous, d'une véritable démocratie", cela me laisse dubitatif sur votre compréhension d'un quelconque avenir démocratique en Tunisie.

W.S.

ourwa
| 30-07-2014 03:03
" la concurrence franco-américaine est-elle le reflet d'un conflit de compétences voire d'intérêts entre les deux pôles chargés de la Défense nationale: l le palais de Carthage version Moncef Marzouki et La Kasbah selon Mehdi Jomâa?" sic
Dans ce cas de figure, les USA et la France ne sont nullement en concurrence, mais alliés et alliés à long terme, à longue vue: ni les premiers ni les seconds n'ont intérêt à ce que le terrorisme soit éradiqué avant les élections et que soit accordée la légitimité, sur le terrain, d'un gouvernement a-politique, transitoire soit-il, garant d'une véritable démocratie... L'Occident trouve ses intérêts plus dans des régimes islamistes dociles et muselés, que dans des régimes séculaires, voire laïcs, à l'instar de l'Amérique et de l'Europe...A ce propos, il ne faut jamais oublier le soutien inconditionnel des USA et de la France aux monarchies pétrolières, leur condamnation sans équivoque du coup d'Etat de Sissi... Les efforts, certes maladroits, de l'Opposition dite démocratique, de se dégager de cette logique géostratégique poursuivie par l'Occident, semblent rendre plus opaque sa courte vue, ainsi que celle du gouvernement actuel...Celui-ci semble se complaire dans les discours creux..et.la probabilité d'un échec total de la dernière phase de la transition. L'échec de la "révolution" tunisienne signera celui des révoltes légitimes de 2010-2011, ainsi que de toutes les autres, dites " le printemps arabe". Le "laboratoires révolutionnaire" tunisien se mue, ainsi, en site type Sévéso politique...

G&G
| 30-07-2014 02:20
Pourquoi ce gaspillage alors que le retour de Ben Ali coûte beaucoup moins au contribuable.

HatemC
| 29-07-2014 20:21
Ils ne seront pas livrés avant 2015 au bas mot, ces hélicos à 58 millions de dollar pièces.
Donc d'ici là l'armée doit faire avec ses moyens.
Maintenant il faut mettre le paquet et que tous les médias accusent cette NEKBE qui a ramené le TERRORISME DANS SES BAGAGES. Les médias devraient écrire sur ce GANG, faire un rappel sur l'exploit de cette NEKBE les années 80/90, les jeunes d'aujourd'hui n'ont aucune idée pour qui ils roulent.

Le terrorisme c'est Ghannouchi et sa bande de pieds nickelées, d'inutile, de bras cassé tel ces Mourou, Chourou, Atig, Zitoun, Abou Iyadh, Almi, Hassine, Abbou, Daimi, Karoui fils, .... Eliminons cette ASSOCIATION DE MALFAITEURS ET LA TUNISIE RETROUVERA SON CALME. HC

Atlas69
| 29-07-2014 20:01
Merci Mr Souissi d'avoir mis en lumière ce jeu de dupe permanent entre les Américains et Européens et surtout Français concernant la guerre commerciale du marché de l'armement.

C'est une technique Américaine de venir saboter tous les marchés acquis par les européens , je ne citerai par exemple le marché Saoudien Miska ( ceinture Radar pour l arabie Saoudite) presque conclu par EADS ou bien les Eurofighter qui ont été sifflé par les US alors que les contrat étaient presque signés.

Par quelle pression on t il gagné ? des prêts ? une garantie de sécurité ?

Bref Oncle SAM fait valoir son hégémonie sur la politique Tunisienne et il le prouve encore une fois.

Le plus dramatique dans tout cela 700M$ que le contribuable devra débourser et tout ceci à cause du manque de pragmatisme ,l'amateurisme et des erreurs répétitives des CPR/Ennahda.

Pendant ce temps l'armée Tunisienne se trouve totalement dépourvu d'armes efficaces et lutte désespérément pour sa survie.

C'était bien le projet de Ghanouchi de la mettre à genoux et bien il est en passe d'atteindre son but.