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L'économie tunisienne : attention déflation !
14/02/2016 | 15:58
4 min
L'économie tunisienne : attention déflation !

 

La transition économique en Tunisie est en panne. La croissance est faible, la macroéconomie fragile, le chômage fort et l'investissement hésitant. Comment analyser cette situation et quelles sont les politiques à mettre en place pour en sortir ? Quelques éléments d'explication…

    

Le rapport du Conseil d'administration de la Banque centrale de Tunisie lors de sa réunion du 28 octobre 2015 offre une importante analyse de notre économie. Dans un style court et concis dans la pure tradition des communiqués de ces institutions, il a dit l'essentiel sur la situation de notre économie lors des premiers neufs mois de l'année.

 

En l'occurrence, ce communiqué a mis l'accent sur quatre éléments essentiels dans son diagnostic. Le premier concerne le niveau de la croissance car s'il y a un tassement de la croissance tunisienne les projections ne devraient pas dépasser les 0,5% au cours de l'année 2015. Une situation qui confirme la récession technique dans laquelle se trouve notre économie avec un recul de la croissance pendant deux trimestres de suite.

 

Le second élément mis en exergue concerne le ralentissement du financement de l'économie. En effet, la Banque centrale a enregistré lors des derniers mois une baisse de la demande de crédits de la part de la plupart des secteurs économiques particulièrement ceux qui sont orientés vers le financement des investissements. Le communiqué note que le taux d'accroissement du recours à l'économie est passé de 6,8% lors des neufs premiers mois de l'année 2014 à 3,3% lors de la même période au cours de l'année en cours.

 

Cette situation, c'est le troisième élément mis en avant par la Banque centrale, s'est traduite par une baisse des besoins de liquidité des banques auprès de l'institut d'émission. Ainsi, le refinancement par la Banque centrale est en baisse par rapport à son niveau le plus élevé au cours de l'année en cours et qui s'est situé à 6,4 milliards de dinars le 14 juillet 2015 et à 4,9 milliards de dinars deux jours avant la tenue du Conseil d'administration, le 26 octobre 2015.

 

Enfin, le communiqué met en avant un autre élément essentiel qui concerne la baisse de l'inflation qui passe de 5,5% au cours du premier trimestre de l'année à 4,2% lors du troisième trimestre. Cette baisse s'explique, selon ce communiqué, par une baisse de la demande notamment des produits frais du fait de la crise du secteur touristique et la baisse de la fréquentation des hôtels depuis les attentats de Sousse en juillet dernier.

 

Ainsi, le communiqué de la Banque centrale a l'art de nous dresser un tableau exhaustif de l'état de notre économie avec peu d'éléments. Il s'agit d'une situation économique marquée par la baisse de la croissance et une baisse de la demande qui sont au cœur d'un relâchement de l'inflation et d'une diminution des demandes de financement de l'économie. Il s'agit d'une situation que les économistes connaissent bien et craignent beaucoup. En effet, pour eux, la concomitance de la baisse de la croissance ainsi que celle des prix avec la montée du chômage sont les signes avant-coureurs de tensions déflationnistes. Les économistes connaissent ces situations et beaucoup de pays ont connu des épisodes déflationnistes plus ou moins profonds, le plus connu est celui qui a mis l'économie mondiale au bord du gouffre lors de la grande crise de 1929. Une déflation qui n'a pu être dépassée que grâce au génie du maître de Cambridge, John Maynard Keynes.

 

Si cette situation est familière, les économistes craignent ses enchaînements et son emballement qui peuvent enfoncer notre économie dans une situation beaucoup plus difficile. Le premier enchaînement concerne le recul de l'inflation qui peut encourager les consommateurs à différer leurs achats et leurs consommations en anticipation d'une baisse plus importante des prix. En même temps, les entreprises qui observent une baisse de la demande et anticipent son aggravation vont aussi retarder leurs investissements en attendant des jours meilleurs. Ainsi, progressivement se met en place l'enchaînement infernal de la déflation où la baisse nourrit la baisse et l'économie s'enfonce dans une situation de récession profonde entraînant une explosion du chômage.

 

Ce sont cette situation et ses enchainements dangereux que les économistes et les politiques économiques cherchent à éviter. Pour échapper à la déflation nous devons mettre en place deux outils. Le premier est celui de la politique monétaire qui en prenant un tournant expansionniste pourrait encourager l'investissement et le recours au financement bancaire. Et, c'est ce que la Banque centrale avait actionné après que son Conseil ait décidé lors de sa dernière réunion de baisser son taux directeur de 50 points de base passant alors à 4,25%.

 

L'autre outil pour faire face à la déflation concerne la politique budgétaire et plus particulièrement la poursuite d'une politique volontariste et déterminée d'accroissement de relance des investissements publics et non pas la consommation finale afin non seulement de relancer la demande publique mais aussi pour sortir l'investissement privé de sa frilosité.

 

L'avantage de ce communiqué du Conseil d'administration est de nous avoir offert en peu de lignes une analyse fine de l'état de notre économie. A nous de mettre les politiques nécessaires pour échapper au spectre déflationniste, qu'il met en exergue sans le nommer, en renforçant la politique monétaire expansionniste par une relance budgétaire ambitieuse par le biais des investissements.

 

Hakim Ben Hammouda

14/02/2016 | 15:58
4 min
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Commentaires (10)

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Tunisien
| 15-02-2016 19:18
Les mouvements sociaux créent une peur aux hommes d'affaires de faire des recrutements. La meilleure solution est de les rassurer que leurs recrutements ne seront pas des fardeaux. Tous les nouveaux recrus seront à contrat à durée déterminée sans obligation de les rendre des contrats à durée indéterminée. Les nouveaux recrus pourront être licenciés sans pénalités pour l'entreprise. En réalité un homme d'affaire ne licencie pas un personnel qui donne satisfaction et qui a acquis de l'expérience.

Mohamed
| 15-02-2016 10:48
A mon avis, il est encore tôt de parler de déflation, on est quand même à 4,2% d'inflation (en supposant que sa méthode de calcul est précise..). On est plutôt dans la désinflation.

M. R
| 15-02-2016 09:30
L'appareil de production est en panne, l'investissement existant est en grande partie vieilli ou abandonné, il y a lieu de le redynamiser à travers la reprise de l'investissement privé en PME et l'activation des structures existantes (BFPME, SICAR Régionales, CDC, BTS, Société de gestion de Fonds d'amorçage ...), à ce moment là, l'économie aura un potentiel de production important et le mécanisme monétaire au Keynésien pourrait faire l'affaire

Nephentes
| 14-02-2016 22:46
il faut se concentrer sur les
réformes économiques orientées autour de quatre axes de régulation :

- favoriser l'accès au financement des micro-projets;

- relancer la consommation des ménages par la baisse des taux d'intérêts pour les crédits immobiliers et de consommation de biens semi-durables

- lutter avec détermination contre l'évasion fiscale,la corruption et le commerce parallèle

- développer l'infrastructure des régions défavorisées à travers des projets d'envergure

concrètement

Déployer une synergie efficace de véritable partenariat entre le public et le privé.

Développer des incubateurs industriels qu se focaliseront sur les secteurs à valeur ajoutée comme les technologies de l'information de l'électronique ou de l'aérospatial

Faciliter la transition du secteur informel au formel.

Réformer le système de subventions dans le secteur énergétique,en diminuant de moitié les subventions aux collectivités territoriales et administrations publiques, quitte à introduire des acteurs privés au sein du secteur.

Améliorer l'employabilité des chômeurs diplômés par une formation supplémentaire répondant aux besoins réels

Diffuser à grande échelle sur tout le territoire un programme entrepreneuriat sous forme de lancement de start-up en coopération avec les institutions financières.

Réformer le système bancaire avec la mise en place d'un dispositif d'accès élargi au financement pour les quatre prochaines années.

Gg
| 14-02-2016 19:43
Il faut rapprocher cet article de celui- ci:

http://www.businessnews.com.tn/tunisie--amelioration-de-la-balance-commerciale-energetique-contre-la-deterioration-de-celle-alimentaire,520,62409,3

qui rapporte une baisse des exportations et des importations de 25% en un an.
Cela veut dire que l'économie ralentit, produisant du chômage.
Une inflation pourrait être provoquée par une relance de la part de la BCT, mais là c'est le contraire, les prix devraient baisser, et ce n'est pas une bonne nouvelle, parce que cette baisse traduirait une faible demande.
C'est un cercle vicieux:
Ralentissement de l'économie > chômage > baisse de la demande > ralentissement de l'économie
Pour casser le cercle vicieux, il faudrait un secteur exportateur fort, ce n'est pas le cas. Il ne reste à l'Etat qu'à emprunter pour masquer la baisse des revenus liés aux exportations, ce n'est pas bon non plus. Ou dévaluer fortement la monnaie, pour relancer les exportations. Alors c'est l'inflation assurée.
Il est clair qu'il y a urgence à relancer les secteurs qui assurent des rentrées de devises: le tourisme et les exportations.
Un vrai casse-tête, les dirigeants économiques marchent des 'ufs!
Inchallah...

hakim
| 14-02-2016 19:11
...à l'organe de gouvernance de la BC. A priori Mr Ben Hammouda s'ennuie et vise le poste de gouverneur de la BC.
Voila que bcp de gens cherchent la relève et les sentiers battus. Ou sont les createurs créatifs de nouvelles idées créatrices de valeurs? Sous d'autres cieux une simple start up peut être valorisée au bout de qq années à la moitié du budget de la Tunisie?
Où sont vos idées porteuses de valeurs...se restreindre à de simples a analyses pour des hauts cadres et avec soit disant des grands diplomes et une expertise internationale ceci est juste èquivalent à ce que font messieurs"tout le monde" lorsqu'ils s'ingenuent à commenter et analyser les matchs de foot..nationaux et internationaux...
En fin une remarque pour mr Ben H : est ce le prêt à 6% d'interet concocté en dernière minute avant sortie du gouv etait en prevision à cette déflation...

l'Ami du sage
| 14-02-2016 18:20
Parler de déflation,phénomène bizarre qui risque d'apparaître chez nous,oublie l'inflation importée à travers la dévaluation de notre monnaie qui sert à camoufler notre faible compétitivité.Avec des comptes extérieurs déficitaires,le risque n'est-il pas l'emballement de l'inflation?

mounir
| 14-02-2016 17:20
En lisant l'article on dirait qu'il devait être publié en fin 2015, des expression telle que les observations sur les neuf premier mois de cette année... ca laisse perplexe.
Article sortie des oubliettes pour combler un quotta?
Un article à la une est supposée récent! c'est un peu comme si dans le prochain article à la une on nous parler du premier homme à avoir posé les pieds sur la lune!
J'aurais attendu plus d'investigations, de propositions ou d'avis que celui de décortiqué un vieil article de la part d'une autorité gouvernementale

jojo
| 14-02-2016 17:05
Je suis désolé, mais il est complètement illogique de parler de déflation dans un pays où il manque de tout. Il est fort possible qu'il y ait une déflation sectorielle, pour les prix d'un secteur particulier (par exemple, le secteur informatique ou les produits de luxe), mais je ne peux pas imaginer que l'on a une déflation générale. Au contraire, à l'annonce d'une invasion militaire en Libye, les Tunisiens s'approvisionnent sans fin. Notre voisin a acheté 3000 boites de sardines, 2000 boites de tomates, 400Kg de nouilles, 300 litres de laits et il n'a pas encore terminé de s'approvisionner.

DHEJ
| 14-02-2016 16:13
Mais est-il vraiment un "TECHNO" ce Hakim?



En parcourant son article, il reste un "généraliste" voire moindre!


Et si on quantifiait la "société consommatrice"?!


Une chose est plus que sur, l'appareil de production est à l'arret et les deux mesures de la BCT ne pourront jamais les relancer!


La seule et unique action susceptible de relancer la croissance est la DECONGESTION DE L'ARSENAL JURIDIQUE du pays pour remonter la PRESSION JURIDIQUE...


C'est de la LEGIDYNAMISME qui échappe à la tete de l'ancien sinistre!


L'EBOUEUR et L'AGENT DE L'ORDRE sont les terminaux à charger!