L'investissement étranger : attention aux mirages !
L’ARP entamera après la trêve de l’aïd, la discussion du nouveau Code des investissements que tout le monde présente comme un outil essentiel de la reprise des investissements bloquées depuis presque cinq ans. Ce nouveau code essayera d’alléger les procédures administratives et donnera de nouveaux avantages aux investisseurs étrangers et nationaux.
Cela sera-t-il suffisant pour les amadouer ? Rien n’est moins certain tant ces investisseurs ont été habitués aux royalties offertes par les gouvernements, en Tunisie et ailleurs, sans réelle contrepartie sauf une pérennité relative de leurs entreprises. En plus, on a tendance à croire que l’investissement étranger est la locomotive de l’économie. En réalité, l’investissement étranger ne fait que suivre la dynamique de l’investissement dans un pays qui doit reposer essentiellement sur l’investissement national.
Au cours de sa récente rencontre avec les acteurs économiques tunisiens, le chef du gouvernement Youcef Chahed a appelé les hommes d’affaires et les entrepreneurs tunisiens à prendre plus de risques. Cet appel, lancé en faisant bien attention aux formes diplomatiques d’usage, est un véritable réquisitoire contre une certaine catégorie d’entrepreneurs égoïstes qui ont toujours parasité l’Etat pour leurs propres profits.
L’heure est à la transparence et au franc-parler nous dit-on. Avouons donc que parmi les acteurs économiques actuels, certains ne doivent leurs fortunes et leurs positions financières qu’aux largesses et au favoritisme d’un Etat-providence qui, par clientélisme politique, les a toujours choyés. Avouons aussi que parmi ces acteurs politiques, certains s’empressaient, et s’empressent encore, de verser des milliards au parti politique au pouvoir, puis aux partis dominants, alors qu’ils rechignent à s’acquitter de leurs impôts envers l’Etat.
Cela a profité aux acteurs économiques, aux partis et aux carrières des politiques mais n’a nullement profité au pays. Avouons enfin, que des centaines d’hommes d’affaires, trop près de leurs sous, ont décidé depuis 2011 de réduire leurs activités, ou tout simplement de les délocaliser, au Maroc ou ailleurs, sans penser un seul instant à leur responsabilité envers un pays, qui passe par une période difficile certes, mais qui leur a tant donné.
Les acteurs économiques tunisiens doivent montrer aujourd’hui qu’ils s’inscrivent tous dans une dynamique nationale qui vise de sortir le pays au plus vite du marasme économique et social actuel. Ils doivent suivre l’exemple des milliers d’entrepreneurs et d’hommes d’affaires tunisiens qui ont résisté aux difficultés des cinq dernières années, qui ont préservé leurs activités et les ont développées pour certains.
Ce sont ces femmes et ces hommes d’honneur que nous saluons et qui ont fait que malgré tout, la situation de notre pays n’est pas désespérée et que des lendemains meilleurs sont possibles. C’est avant tout sur eux que nous devons miser.
Les investisseurs étrangers ne pourront alors que suivre cette dynamique nouvelle moyennant des encouragements que pourrait leur accorder le nouveau code des investissements. Ils seront parmi nous d’ailleurs à la fin du mois de novembre prochain, venus de plus de soixante-dix pays, pour participer à la conférence internationale pour l’investissement en Tunisie.
C’est un événement très important parait-il. Tellement important que l’Etat, peu confiant dans les capacités de son administration, l’a confié en sous-traitance à deux commissaires généraux, l’un résidant à Tunis et l’autre à Londres. Il parait même que l’un des objectifs majeurs de cet événement, selon les propres dires de l’un des commissaires, est d’améliorer l’image de la Tunisie à l’étranger.
Quant aux retombées financières de cet événement, personne ne veut se prononcer tant ces investisseurs étrangers ont la langue fourchue. On se rappelle tous comment en 2011 ils ont promis monts et merveilles à Béji Caïd Essebsi, alors Premier ministre de transition, et annoncé même le montant des aides et des crédits qu’ils allaient accorder à notre pays sans jamais honorer leurs engagements.