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Chroniques
Liberté de conscience ? Trêve de balivernes !
Par Ikhlas Latif
24/05/2019 | 15:59
4 min
Liberté de conscience ? Trêve de balivernes !

 

« La Tunisie est un exemple de liberté de croyance et de conscience, des valeurs de tolérance et du rejet de l’extrémisme ». Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le chef du gouvernement et certains ambassadeurs de chancelleries étrangères à l’occasion du pèlerinage de la Ghriba.

Permettez-moi de mettre en doute vos jolies paroles. On ne cesse de vanter cette Tunisie terre de tolérance et d’ouverture sur les autres cultes. Chaque année, on a droit aux mêmes déclarations dans le sillage du pèlerinage juif. Tout cela est bien beau, mais il ne s’agit que d’une image de carte postale. La vérité est tout autre. Comme le dit si bien le dicton tunisien, ne cachons pas le soleil par un tamis !

 

La vedette incontournable, du pèlerinage de la Ghriba (l’une des plus vieilles synagogues dans le monde en passant) a été le ministre du Tourisme, René Trabelsi. Sur tous les fronts, il s’est fixé pour objectif de faire réussir l’événement. Pari réussi donc pour un responsable qui mouille la chemise pour son pays. Sauf que ce responsable est de confession juive et pour cela il est considéré comme un citoyen de seconde zone. Tout Tunisien peut se porter candidat à la présidentielle, il s’agit d’un droit disposé dans « la meilleure constitution du monde ». Toutefois, il existe un petit hic. On a beau être de nationalité tunisienne par la naissance, si on n’est pas de confession musulmane, pas la peine d’y penser. Et cette discrimination touche essentiellement les citoyens juifs, parce que du moment  qu’une personne est née de parents supposés être musulmans, elle ne sera que définie comme telle. Par la force des choses, un potentiel candidat pourrait être bouddhiste, agnostique ou baha'i (peu importe) s’il est estampillé musulman de par sa naissance. Discrimination Level God.

 

Au moment-même où notre jeune chef du gouvernement nous parle de liberté de conscience et tout le toutim, nous sommes en plein ramadan. Et quand on dit ramadan, il faut comprendre intolérance Level God (aussi). Chaque année, c’est la même rengaine, la même galère pour les non-jeûneurs qu’ils soient musulmans ou non, il faut le préciser. Interdire, s’immiscer dans la vie personnelle des autres, limiter leurs libertés, leur imposer par la force les convictions de la majorité est la norme en ce mois saint. L’universitaire Abdelmajid Jemal en a fait les frais la semaine dernière, interpellé par un policier dans un café à Sfax. Siroter tranquillement un café pendant la journée pourrait vous amener à faire connaissance avec l’arme d’un agent. Attention !

 

Alors, oui les non-jeûneurs ne sont pas arrêtés comme cela se fait sous d’autres cieux. Cependant, ils sont intimidés par des contrôles d’identité devenus omniprésents dans les cafés ouverts en journée. Les non-jeûneurs sont obligés de se passer des tuyaux sur les endroits susceptibles de les accueillir durant les heures de prohibition. Ils sont obligés de se cacher comme des criminels, de peur d’offenser les pauvres croyants.

La Tunisie, exemple de liberté de conscience vous dites ? Hypocrisie de toute une classe politique oui ! Si chaque citoyen est libre de pratiquer ou non ses croyances selon notre constitution, si la Tunisie est un Etat civil, pourquoi donc les cafés et autres restaurants se transforment en kiosques à journaux pour cacher « les crimes » des non-jeûneurs ? S’installer en terrasse avec son verre serait outrage suprême ! Pourquoi un propriétaire de café à Kairouan, harcelé par le voisinage et les policiers, pour avoir ouvert son commerce, avait-il été arrêté ?  Pour quelle raison les resto-bars refusent de servir les Tunisiens ? Et les caves d’alcool qui ferment leurs portes à la veille de ramadan et qui les ouvrent tout juste après, on en parle ?   

 

Une schizophrénie qui se manifeste dans la formulation de l’article 6 de la constitution qui donne à l’Etat le rôle de gardien de la religion (l’islam étant inscrit dans l’article 1er, ce rôle est-il vraiment étendu à pied d’égalité avec les autres croyances ou non-croyances ?  ). L’Etat est aussi le garant de la liberté du culte et a l’obligation d’interdire l’atteinte au sacré. Une notion assez vague et dont les contours n’ont pas clairement été définis. Ce qui donne lieu à toutes sortes d’interprétations et d’agissements liberticides en conséquence.  

 

Alors trêve de balivernes et que le double langage cesse une bonne fois pour toute, parce qu’on en a amassé des montagnes. Des lois, des circulaires ou des notes internes qui assoient l’intolérance, il en existe et des tas. Et quid du Code des libertés individuelles ? Aux dernières nouvelles, il prend la poussière dans les tiroirs. Vanter cette Tunisie terre de liberté de conscience, etc., n’est que pur simulacre.

Par Ikhlas Latif
24/05/2019 | 15:59
4 min
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Commentaires (25)

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fatmi benayed
| 28-05-2019 13:12

Une société tolérante, où chacun aurait le droit de faire ou ne pas faire le ramadan? Je ne vois pas comment arriver à construire un tel consensus.Je pense qu'il y a dans l'Islam, de manière inhérente, un coté Totalitaire. Tout le monde fait la même chose en même temps. C'est le règne de la Masse; à l'heure de l'Iftar, les rues sont vides: tout le monde est en train de rompre le jeune. A la Mecque, ils sont des millions à tourner autour de la Pierre, tous habillés de la même manière. Aucune exception n'est tolérée.
Les policiers qui importunent les non-jeuneurs ne font qu'être cohérents avec leur logique de bon musulmans. Ils sont convaincus de bien agir.

Gg
| 25-05-2019 22:05
Encore un mot :-)
"Juifs Musulmans Chrétiens cohabiteront dans un seul pays"
C'est un beau rêve, j'y crois de moins en moins.

Gg
| 25-05-2019 21:23
J'ai du mal à vous suivre. Vous citez les années 60, la France a bien changé depuis. Pour réussir aujourd'hui, il faut aller à l'école depuis le plus jeune âge, puis suivre des études, au moins des formations.
Et surtout accepter le pays où l'on vit, en l'occurrence multicultuel et laique. Ou partir...

EL OUAFI
| 25-05-2019 20:21
Bonsoir Gg il me semble que ces sauvageons fils de ces primitifs qui ont fui la misère et la tyrannie de leurs pays respectifs.
Ces chibanis illetrés sans aucune formation livrés aux plus pénibles labeur,ils étaient heureux d'avoir trouvé de quoi subvenir à leurs besoins leurs employeurs n'en demandaient que celà, maind'oeuvre docile ! Leurs progéniture livrés à elle même et le reste vous êtes bien placé pour connaître la suite ; et le résultat est peu probant à la hauteur du niveau des papas et mamans ! ! !
Ces juifs dispersés à travers le monde et qui côtoyaient l'élite des pays où ils residaient une intégration voici des siècles !
Comparons ce qui est comparable .
L'aviez vous remarqué une pépinière de ces fils de chibanis arrivent à accéder à la hauteur des compétences des médecins des ingénieurs des chercheurs etc . . . Rome ne s'est pas faite construite en un jour ! Ils arrivent ! La relève fait son chemin il faut du temps ils s'intégrerons par la consommation des siècles ils serons dissous dans la masse et ce beau pays qui est la France sera éternellement une mosaïque de religions et quelques autres (résidus de la société ) qui n'ont pas pu suivre le rythme ou la cadence.
Juifs Musulmans Chrétiens cohabiteront dans un seul pays.
Ce que je vous souhaite que vous verrez ce fatidique jour ! Bonne soirée. (Manai )

Gg
| 25-05-2019 17:48
Vous dites "par contre les juifs sont dans la quasi-totalité des postes clés".
Il faut dire que les français de religion juive sont parfaitement mélangés à la France. Leurs enfants vont tous à l'école, ils parlent tous français et l'écrivent bien, ils font pour la plupart des études supérieures. Ils respectent sans problème les lois de la République, et s'intègrent dans la laïcité sans problème.
A l'inverse, tout ce que la France compte de racailles analphabètes, est musulman.
Je ne dis pas que les musulmans sont tous comme cela, loin de là heureusement. Mais proportionnellement à leur population, les musulmans racailles analphabètes explosent la moyenne.
Il est ainsi beaucoup plus difficile d'y trouver des élites, et quand il y en a, elles réussissent très bien, jusqu'aux plus hauts niveaux.

Roger Rabitt
| 25-05-2019 17:33
Sans conscience pas de liberté

Notre incapacité à fonder une société démocratique et équitable est structurelle; elle est la résultante de facteurs politiques, économiques et culturels.

Les structures sociales d'un pays comme le notre procèdent de l'histoire et du niveau d'éducation de la population: en dépit de certaines apparences la société tunisienne reste très différente des formes d'organisation sociale propres aux pays développés.

Exception faite d'une fraction plus ou moins importante de la population, un grand nombre de tunisiennes et tunisiens vivent encore dans le cadre de la logique de groupe caractéristique d'une économie de subsistance où la liberté individuelle est réduite à sa plus simple expression

La "culture" de la plupart des tunisiens en 2019 c'est un folklore indigent, souvent comique, de bribes déformées de l'histoire tunisienne et de fantasmes infantiles sur la prétendue capacité du peuple tunisien à s'adapter à la modernité et aux défis du monde contemporain

Des FOUTAISES.

En vérité : des rapports sociaux que l'on peut qualifier (faute de mieux) de "semi-féodaux" existent encore dans de nombreuses régions de l'intérieur, où les relations strictement économiques entre la main-d'?uvre et les employeurs cèdent souvent la place aux rapports de subordination personnelle (vassalité, clientélisme, mafias claniques , etc.).
Ces relations sociales subissent souvent l'incidence des liens socio-économiques qui tendent à renforcer les formes traditionnelles de sujétion de l'employé envers son patron.

Comment voulez vous avoir des garanties de liberté de conscience dans certaines régions comme Gafsa Jendouba ou Kasserine, où l'étayage abusif et précaire ne laisse qu'une fraction minime des profits au travailleur agricole, où il y a sous-location des terres par de multiples intermédiaires, corvée et travail forcé plus ou moins imposés par les mafias locales en collusion avec l'administration et où il persiste une confusion fréquente entre les responsabilités administratives et le pouvoir économique local,.

En verité, en Tunisie l'oligarchie reste une caste privilégiée qui continue de détenir une position extraordinairement forte, exorbitante par rapport à ce qui existe dans les pays développés.

Ces pouvoirs permettent l'accaparement de la majeure partie des profits du pays, qui tendent depuis 15 années a devenir de moins en moins productifs et de plus en plus liés à l'économie spéculative et informelle.
Le maintien de ces structures sociales fondamentalement archaïques, beaucoup moins transformées qu'on le prétend, n'est pas sans conséquences psycho-sociologiques.

D'où des niveaux de conscience individuels et collectifs bloquant toute véritable implication et responsabilisation citoyenne.

Mohamed Obey
| 25-05-2019 16:44
Oui, je vois les choses dans la même optique que vous: la liberté de conscience, semble-t-il, se résume à un article inséré relatif dans la Constitution après une guerre quasi-nucléaire dans l'hémicycle... Ces gens rassasiés du lait de chamelle du désert ne vont n'usent de cette liberté de Con-science que comme une sorte de technique de marketing de leur mensonges qu'on connait....

EL OUAFI
| 25-05-2019 16:33
Tiens tiens Quel hasard vous vous êtes décider à lever votre boycott ou embargo envers moi ! (Je plaisante )
Cher Gg vous croyez que je ne le savais pas ?
Tout simplement faire rappeller à madame que la Tunisie été et elle le resterait terre de tolérance et de paix.
Concernant les Français de confession musulmane je le savais mais avec modération par contre les juifs sont dans la quasi-totalité des postes clés. Mes salutations Gg ne tenez pas griefs rien n'est éternel. (Manai )

Mansour Lahyani
| 25-05-2019 16:30
C'est un constat qui pourrait passer pour accablant... si on ne tient pas compte de l'intolérable décalage entre les principes et la réalité. D'un côté, la réalité - commençons à rebrousse-poil : la réalité, il faut bien le reconnaître c'est que les principes sont perpétuellement bafoués, et nul n'a encore inventé le moyen de les faire respecter... même la trique, si elle devait être en dernier recours employée, n'y pourrait rien, juifs, noirs, bédouins continuent à être méprisés, moqués, vilipendés... en dépit des principes.
De l'autre côté, les principes, justement : ils sont affirmés dans les textes, et notamment par LE texte suprême, la Constitution, et réaffirmés par les textes subsidiaires et subséquents, qui expriment la quintessence de la position officielle, la seule qui vaille pour juger, et qui est au-dessus de tout soupçon - ce qui "pose" en quelque sorte la situation en Tunisie. Là où le bât blesse, souvent très douloureusement, c'est dans ce décalage dont il a été question plus haut, et auquel nul ne peut rien : aucune législation ne peut rattraper des siècles de honte !
Naturellement, il ne faut pas baisser la tête devant ce constat amer : un vieil ami, juif, me rapportait cette "profession de foi" commerciale : "Le possible, on l'a fait ; l'impossible, on le fera. Pour les miracles, on demande un délai...

Gg
| 25-05-2019 14:40
....et renseignez vous avant de dire n'importe quoi. En France, dans tous les corps d'état et jusqu'au plus haut niveau (ministres), nous avons des musulmans. Et des juifs, et des chrétiens, et de tout... des athées et des agnostiques.