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La révolution tunisienne et l'entreprise
14/02/2011 | 1
min
La révolution tunisienne et l'entreprise
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Par Slim Ben Ammar*

La révolution tunisienne est la plus noble qui soit, sans leader, sans manipulation politique, sans coloration religieuse ou idéologique. Une révolution endogène porteuse d’un message spontané d’une telle intensité qu’il a cristallisé les tunisiens de tout bord.  C’est au nom de ces valeurs transcendantes de liberté, de dignité et de citoyenneté que des millions de tunisiens ont collectivement exprimé leur ferme volonté qui a infléchi de manière irréversible le cours du temps.

 

Un tournant historique à préserver

Aujourd’hui, il est crucial de veiller à ce que le combat qui a été mené contre la tyrannie ne puisse  donner naissance à de nouvelles formes de dictature. Or, il est triste de constater que cette révolution dont la première étincelle fut le droit au travail soit précisément en train de détruire tous les jours des centaines d’emplois. L’entreprise en est la première victime, victime de cette inconscience et de cette irresponsabilité qui animent ces milliers de personnes et ces syndicats qui revendiquent tout, ici et maintenant, comme si la liberté et la démocratie allaient leur être subitement confisquées. Ce qui est d’autant plus grave et qui ressort de certains agissements, c’est la piètre image dont jouit, dans l’inconscient collectif, l’entreprise et par conséquent l’entrepreneur.  Cette entreprise qui a pu exister et réussir sous un régime corrompu et voleur devient-elle aujourd’hui fatalement suspecte, siège de tous les maux ?

Il est vrai que cela devrait interpeller certaines entreprises sur leurs pratiques, mais en même temps, n’oublions pas que la plupart d’entre elles ont été les premiers souffre-douleur de ce régime immoral et pervers. S’attaquer aujourd’hui à l’entreprise ou la mettre au banc des accusés c’est oublier qu’elle est le moteur du progrès social, une instance de socialisation à part entière et qu’elle constitue le garant de notre richesse et de nos emplois. Aussi est-il urgent de redonner à l’entreprise sa place dans l’échiquier socio-économique actuel, de valoriser l’entrepreneur et de susciter aujourd’hui plus que jamais son désir d’entreprendre et d’innover.


Une révolution pour les valeurs

Faisons de cette révolution une révolution pour les valeurs et rebâtissons les fondamentaux de notre société sur la base de règlementations, d’institutions et de mécanismes porteurs de sens, ayant un pouvoir organisateur et structurant à même de générer des comportements individuels et collectifs plus confiants, plus constructifs, plus citoyens, plus responsables.

Faisons que désormais plus rien ne soit plus comme avant : l’employé ne sera plus exploité par son patron, l’entreprise ne sera plus autorisée à créer de la valeur au dépend des autres. Plus jamais de marchés parallèles, plus jamais de passe-droit, plus jamais de pollution incontrôlée, plus jamais d’injustice, plus jamais d’impunité.

Faisons que le droit à la grève soit l’ultime mode d’expression après avoir épuisé toutes les voies du dialogue, que le management participatif devienne la règle et non l’exception, que la culture d’assistés soit bannie et que la démocratie et le respect de l’avis contraire soient élevés au rang du sacré. Et comme disait Gandhi, commençons à changer en nous ce que nous voulons changer autour de nous.

 

Une entreprise libre et responsable

Dans cette Tunisie nouvelle, l’entreprise aura un rôle majeur à jouer qui dépasse sa seule vocation économique. A ce titre, le CJD Tunisie, à l’instar du CJD international, a toujours eu une vision audacieuse de l’entreprise. Une vision porteuse de valeur humaine bâtie autour d’un concept fort,  désormais universel, celui de la «performance globale» qui allie à la performance économique, une performance sociale, sociétale et environnementale. Un véritable état d’esprit à faire entendre sans modération, une démarche structurante du dirigeant et de l’entrepreneur qui l’oblige, d’une part, à définir des principes de gouvernance en termes de valeurs, stratégie, processus de décision et de concertation et d’autre part, à prendre en compte les intérêts de toutes les parties prenantes de l’entreprise, ses clients, ses salariés, ses fournisseurs, ses actionnaires, l’Etat, l’environnement naturel, l’environnement sociétal.

Partager le fruit de la réussite avec ses employés, payer ses impôts, se soucier du traitement de ses déchets, respecter ses fournisseurs, passer d’un modèle directif à un modèle collaboratif, etc... seront les atouts des entreprises de demain, celles qui dureront.

C’est d’ailleurs sur quoi travaillent aujourd’hui plusieurs économistes tel que Stiglitz ou Sen, qui à l’issue de la crise économique mondiale qui a montré les limites du modèle idéologique ultra libéral et a marqué la fin du mythe de l’autorégulation des marchés, sont désormais en quête d’un modèle économique plus viable qui justement confèrerait à la conscience, la responsabilité et à la vision globale de l’entreprise une place prépondérante.

 Ce concept de « performance globale » sera également un atout majeur pour un discours patronal convainquant, un socle pour le dialogue social et un pouvoir de légitimité accordé aux interlocuteurs patronaux dans leurs négociations avec les décideurs politiques et les représentants syndicaux.

Il n’est pas trop tard. La simple évocation d’une perspective de prospérité future est en soit porteuse d’enthousiasme et de confiance en l’avenir,  soyons nombreux à y croire ! Anticipons les voies d’un vrai progrès, provoquons-les !


Ensemble, mettons l’économie au service de l’Homme, ensemble, mettons l’économie au service de la Vie.



*Slim Ben Ammar est le président du Centre tunisien des Jeunes Dirigeants – CJD -
14/02/2011 | 1
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