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Chroniques
Gouvernement - UGTT : Une victoire à la Pyrrhus
08/12/2016 | 16:00
4 min

 

Pour satisfaire l’accord avec l’UGTT, le gouvernement sera-t-il contraint de vendre quelques bijoux de famille ? Les banques publiques, par exemple.

 

Le marathon budgétaire est, à chaque fois, jalonné de débats passionnés, pimentés parfois par de sournoises polémiques, sur certaines dispositions du projet de Loi de finances. Les harangues et autres controverses reflétaient les clivages du champ politique, entre libéraux et conservateurs, gauche et droite, laïc et religieux et que sais-je encore. Le gouvernement d’union nationale ne semble pas avoir balayé cette habitude. Sauf que cette fois-ci, les clivages politiques ne sont plus si clairs. Bien au contraire, rarement projet de loi de finances n’a fait l’objet de tant de contestation. Mais cette fois-ci, les clivages ne sont pas apparus entre partis, mais au sein même des partis. On les a simplement calfeutrés.

 

Il est pour le moins curieux qu’aucun parti politique soutenant le gouvernement n’ait pris position sur l’épineux sujet des augmentations de salaires dans la fonction publique. Pas le moindre signal, à défaut d’un message clair d’appui. Pire, la Commission des finances de l’Assemblée des représentants du peuple, jugera bon de reporter l’examen des premiers articles  du projet de Loi de finances relatifs au budget général de l’Etat, pour passer directement à l’étude des dispositions fiscales du projet dont une grande partie est dictée par le budget de l’Etat. C’est comme si on discutait des moyens de récolter de l’argent destiné à un Fonds qui n’existe pas. Les membres de la Commission des finances ont discuté, par exemple, d’une taxation exceptionnelle des revenus et des bénéfices des assujettis à l’impôt pour alimenter un budget de l’Etat qui, implicitement, n’existe pas ou, à tout le moins reste à construire.

Non seulement, on a mis la charrette avant les bœufs, mais on a laissé le gouvernement, seul, se démener pour tenter de faire venir à la raison l’UGTT sur les augmentations de salaires des fonctionnaires. On l’a laissé seul faire face à la contestation de certaines catégories socioprofessionnelles  refusant toute mesure de transparence fiscale, a fortiori d’équité fiscale.

 

La résistance du gouvernement aux multiples coups de boutoir contre le projet de Loi de finances a montré ses limites. Il a fléchi dans la dernière ligne droite. La pression a été trop forte et la responsabilité trop lourde à porter pour faire face, seul, à une grève générale et ses implications sociales.

L’accord conclu avec l’UGTT s’apparente à une victoire à la Pyrrhus. En effet, l’impact financier de l’accord est loin d’être négligeable, s’évaluant en centaines de millions de dinars. Il faudra bien trouver les ressources supplémentaires pour combler cette dépense non inscrite sur le projet initial de budget de l’Etat. Tel est l’enjeu.

 

En tout cas, le gouvernement s’aviserait mal de prêter une oreille attentive aux apprentis-sorciers qui estiment que l’enveloppe financière exigée par l’accord peut être obtenue en accélérant la cession des biens confisqués et en accentuant la lutte contre l’économie parallèle ou informelle. C’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire.  A cet égard, il n’en est pour preuve que les déboires de l’Immobilière de Gammarth, par exemple, pour s’en convaincre. Cela fait des mois que  cette société s’échine à céder les biens immobiliers confisqués, villas et appartements de luxe, sans trouver preneurs. Certes, on a réussi à céder l’Ecole internationale de Carthage. Néanmoins, cela reste une exception et, par ailleurs, une incroyable performance en termes de cession. Quant aux ressources pouvant provenir de la lutte contre la fraude et les activités informelles, elles ne sont réellement envisageables qu’à la condition de mener une guerre sans merci contre la corruption, particulièrement au sein de l’administration et de la fonction publique, celle-là même pour laquelle l’UGTT réclame une augmentation de salaire.

 

Cela étant, il s’agit de savoir maintenant quelle va être la réaction du principal bailleur de fonds du pays, le FMI, qui a conditionné l’octroi d’un crédit élargi de 2,7 milliards de dollars sur trois ans à un gel des salaires publics durant cette même période ? On pourrait d’ailleurs poser la question autrement : quels vont être les arguments que présenterait le gouvernement au FMI pour le convaincre d’écarter ce critère – pour l’année 2017 au moins - des formalités d’octroi du crédit élargi, dont l’une des tranches d’environ 400 millions de dollars devrait être décaissée à la fin de cette année. Un montant déjà inscrit dans le projet de budget du gouvernement actuellement en stand by.

Il ne faudra pas chercher trop loin. Le seul argument valable pour faire revenir le FMI sur les conditionnalités d’octroi du crédit élargi exigerait du gouvernement qu’il vende certains bijoux de famille. Les banques publiques, par exemple.

Là aussi, ce serait pour le gouvernement une victoire à la Pyrrhus.

08/12/2016 | 16:00
4 min
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Commentaires (6)

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TMT
| 10-12-2016 22:20
Il n'y a eu qu'un seul gagnant cher ami,c'est la Tunisie comme on l'aime.
Si Houcine n'a pas perdu,mais, voulant se prendre pour un futurologue,s'est trouvé complètement à côte de la plaque . D'ailleurs il n'est pas le seul...

DHEJ
| 09-12-2016 10:38
Bonjour,

Toutefois l'auteur évoque la question DE VENTE DES BANQUES!!!


Sachant que la CHAHED est un fils de banquier et est-il ultra libéral??? Ayant fait ses expériences à l'ambassade US...

N.Burma
| 09-12-2016 10:21
L'article voulait dire une victoire du gouvernement en trompe l'oeil, une victoire à la PYRRHUS où on gagne mais en ayant beaucoup perdu. kameleon78



Et réciproquement c'est à dire que l'UGTT qui demandait au gouvernement d'honorer la parole gouvernementale n'a obtenu que la moitié des engagements, c'est aussi cela la victoire à la Pyrrhus.
Le gouvernement aurait pu éviter cette victoire à la Pyrrhus, en anticipant sur le cours des évènements et devançant la centrale syndicale sur l'augmentation des salaires et y rester ferme sur cette augmentation. Il a voulu tergiverser comme s'il voulait mesurer la force syndicale et se rendant compte qu'il courrait à sa perte, il a fini par accorder la moitié de ses engagement et d'éviter l'épreuve de force c'est cela aussi la victoire à la Pyrrhus.

kameleon78
| 08-12-2016 21:45
L'article voulait dire une victoire du gouvernement en trompe l'oeil, une victoire à la PYRRHUS où on gagne mais en ayant beaucoup perdu.

BABA SANFOUR
| 08-12-2016 21:28
Cher monsieur
Pardonnez mon audace,car je voudrais savoir si vous avez un lien de parenté avec"Woody Allen"!Merci de satisfaire ma curiosité.

DHEJ
| 08-12-2016 17:21
Quelle est la partie perdante?