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Ennahdha au gouvernement : carte gagnante ou pion perdant ?
21/01/2015 | 19:59
5 min
Ennahdha au gouvernement : carte gagnante ou pion perdant ?
La grande question qui se pose aujourd’hui est de savoir si Ennahdha fera ou non partie du futur gouvernement de Habib Essid. Deuxième gagnant des législatives du 26-Octobre, le parti de Rached Ghannouchi semble avoir fait son choix et annonce, d’ores et déjà, qu’il en sera membre. C’est, en revanche, du côté de ses adversaires politiques que les choses se corsent et la décision se révèle être un véritable casse-tête.

« Ennahdha fera partie du prochain gouvernement ». C’est, en tout cas, ce qu’a décidé le conseil de la Choura du parti islamiste dans sa dernière réunion datant du 10 janvier. La haute autorité du parti, qui fait la pluie et le beau temps, a tranché. Si cette participation reste conditionnée par « une adéquation des programmes et les visions », il reste à savoir de quelle manière Ennahdha fera partie du gouvernement Essid. 
Aujourd’hui, les portefeuilles ministériels qui pourraient être attribués au parti ainsi que la nature même du gouvernement n’ont pas encore été tranchés. « Nous sommes au premier stade des discussions et n’avons pas encore proposé de noms pour le futur gouvernement », avait déclaré hier Noureddine Bhiri dans une déclaration à radio Shems. Le président du bloc d’Ennahdha au Parlement explique, par ailleurs, que la nature même du gouvernement n’a pas encore été tranchée et qu’elle devra être définie avant même d’arriver aux propositions de noms des futurs ministres. Au stade actuel des choses, on ignore encore si le gouvernement de Habib Essid sera politique, de coalition ou d’union nationale, mais on sait en revanche que la participation d’Ennahdha y est indubitable. C’est ce que certifie, par ailleurs, Houcine Jaziri, cet autre cadre du mouvement, sur Mosaïque Fm dans une interview donnée le 19 janvier.
Si la participation d’Ennahdha ne pose pas d’interrogations au parti lui-même, c’est plutôt du côté de ses adversaires au pouvoir que le doute subsiste. Nidaa Tounes, premier parti des élections législatives et dont le président a été élu à la magistrature suprême, se retrouve aujourd’hui au devant de la scène politique du pays. S’il a certifié à maintes reprises qu’une coexistence avec Ennahdha était « incontournable », le parti devra aujourd’hui composer avec la déception de ses bases, mais aussi de ses eventuels alliés, sans lesquels il n’aura pas la majorité au parlement.

A l’heure actuelle, la participation d’Ennahdha ne semble pas faire de doute. Les pourparlers porteraient plutôt sur la manière la plus douce avec laquelle le parti devra intégrer le gouvernement, sans trop faire de vagues. En effet, la possibilité qu’Ennahdha intègre le gouvernement, sans vraiment en faire partie, reste posée. Un tour de passe-passe qui permettra au parti islamiste de proposer des noms de ministres « indépendants » pour des portefeuilles ministériels. Indépendants, en théorie car ils n’émanent pas du parti, mais en seraient proches et en auraient l’aval. Ainsi, grâce à cette participation « indirecte », Ennahdha intégrera le gouvernement sans vraiment en faire partie.
Mais il n’est pas question que d’anciens noms soient proposés. Selon les dires de Lotfi Zitoun, hier sur la radio nationale, les noms qu’Ennahdha proposera pour faire partie du gouvernement Essid « n’auront pas occupé de postes ministériels au sein de la Troïka ». Voilà qui permettra de pallier l’image d’échec que le parti traine depuis son dernier exercice de pouvoir. Une image brandie sans cesse par les bases et partisans de ses adversaires politiques.

Cette décision donne des sueurs froides aux dirigeants de Nidaa Tounes qui n’arrivent pas encore à se mettre d’accord. En effet, Nidaa Tounes s’était engagé, tout au long de la campagne électorale pour les législatives et même pour la présidentielle, à ne pas s’allier avec Ennahdha. Cette question a, cependant, toujours été prise avec des pincettes lors de la campagne, le parti ayant eu besoin du soutien du parti islamiste. Lors de son dernier meeting de campagne dans la ville de Sfax, Béji Caïd Essebsi, ancien président du parti, avait déclaré qu’aucune alliance avec Ennahdha n’était à l’ordre du jour, rassurant ses partisans ainsi que les bases du parti. L’actuel locataire du Palais de Carthage avait cependant nuancé en affirmant : « Nous ne pourrons gouverner seuls, nous avons une majorité relative. Ils ne nous ont pas proposé d’alliance mais nous sommes obligés de nous entretenir avec eux et de prendre leurs avis ». Voilà qui est plus que jamais d’actualité aujourd’hui.
Ceci dit, les bases de Nidaa ainsi que ses partisans ne cautionnent pas du tout ce « partenariat ». « Que dirons-nous aux Tunisiens si on ne respecte pas notre promesse ? Allons-nous leur dire que c’était un simple engagement moral ? », a lancé Mondher Belhaj Ali, diriegant de Nidaa, au sujet d’une présence d’Ennahdha au gouvernement. «Les femmes tunisiennes ne souhaitent pas voir ce parti au gouvernement », a-t-il tranché.

Mais ce n’est pas seulement des partisans et bases de Nidaa que le parti risque de s’attirer les foudres. Le Front Populaire, troisième force sur l’échiquier politique, a conditionné sa participation au gouvernement Essid par la non-participation d’Ennahdha. Hamma Hammami, leader du parti, l’a déclaré à maintes reprises : le Front ne fera pas partie d’un gouvernement dans lequel Ennahdha est membre. Voilà qui a le mérite d’être clair. D’ailleurs, aujourd’hui même, le Front Populaire annonce dans un communiqué qu’il ne participera pas au prochain gouvernement de Habib Essid. Le dirigeant du Front, Zouheir Maghzaoui, a déclaré aujourd’hui sur Radio Jawhara que le FP « refuse de participer à un gouvernement qui comporte dans ses rangs de figures de l’ancien régime, mais aussi des membres d’Ennahdha, responsables, selon ses dires, de la recrudescence de la violence et du terrorisme en Tunisie », et ce prenant en considération les craintes de ses électeurs quant au retour à une période jugée révolue.

La participation d’Ennahdha au prochain gouvernement serait-elle une erreur ? C’est ce que semble en tout cas penser son ancien secrétaire général qui s’en est désolidarisé en décembre dernier. Hamadi Jebali, qui briguerait un mandat présidentiel en 2019 et qui parle même de créer son propre parti, a expliqué dans un entretien à l’agence de presse allemande, qu’Ennahdha aurait tout intérêt à intégrer les rangs de l’opposition. « La participation d’Ennahdha au futur gouvernement de Habib Essid est une erreur envers la démocratie naissante puisqu’elle prive la scène politique nationale d’une opposition puissante ».
En effet, si les deux premières forces politiques du pays se placent dans le pouvoir que restera-t-il du côté de l’opposition ? Le Front Populaire semble être pour l’instant l’unique formation politique de taille à décider de se placer du côté de l’opposition, mais fera-t-elle le poids face aux deux mastodontes de la politique, Ennahdha et Nidaa ? La situation peut, en effet, se révéler très dangereuse avec un tel déséquilibre. Alors participera ou participera pas, Habib Essid aura son mot à dire.

*Photomontage
21/01/2015 | 19:59
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Commentaires (20) Commenter
normal
moha
| 22-01-2015 19:34
Il n a pas le choix car il n a pas la majorite a l assemblee
c est la faute des tunisiens qui ont voté
Utopie quand tu nous tiens
Tounsi 2014!
| 22-01-2015 16:49
En politique tout est dans tout et tout le contraire de tout. Avec ses 69 sièges, le parti dit « islamique » de Ghanouchi sait qu'il reste une arête, difficile à extraire, de la gorge de la Tunisie. Nida T. connaît, parfaitement, la situation et sait qu'il ne peut résoudre qu'une partie de cette équation dont les paramètres s'avèrent de+ en + difficiles à maîtriser. Toutes ces hésitations et ces contradictions au sein des dirigeants de Nia T. sont édifiantes, car elles confirment les terribles difficultés morales et politiques auxquelles ce parti est confronté.
Contrairement à ce que nous pensons, Nida T. est nulle part. Toute décision irréfléchie peut avoir des conséquences imprévisibles sur l'avenir du pays et sur Nida T lui-même. Ennahdha est à l'affut et ne fera aucun cadeau à ce parti quitte à faire couler le navire.
Ghanouchi fera tout pour se rendre incontournable pour la composition du futur gouvernement d'autant plus que le FP a opté pour se ranger dans l'opposition.

En résumé, faire partie du futur gouvernement est un moyen très opérant pour les pseudo-islamique afin de :

1- Retrouver et renforcer une crédibilité chancelante auprès de la majorité de la population
2- Assurer une protection efficace pour les anciens ministres et responsables nahdhaouis soupçonnés de détournements de biens publics, de corruption et surtout d'assassinats politiques.
3- Contrôler les rouages de l'État
4- Recruter de nouveaux membres pour se préparer aux futures élections locales et surtout législatives et présidentielles de 2019 ( ?).
C'est tout un programme qui reste, pour eux, objectivement réalisable sans oublier le poids de leurs 69 sièges. Ils ne seraient vraiment vulnérables que si la justice se penchait un jour sur le passé mafieux de certains membres criminels et escrocs qui font partie des têtes « pensantes » de la choura.
@ Tounsia2 : vous n'avez pas tout à fait raison mais vous n'avez pas complètement tort. Depuis 4 ans, nous n'arrêtons pas de vivre des cauchemars. I l faut croire que la Tunisie n'est pas maître de son destin.
Quelque chose de pourri dans le royaume de BCE
Sidi Teta
| 22-01-2015 16:42
BCE est décidément de la vielle école PSD/RCD :
il prend les citoyens pour des abrutis incultes

il le vil servant de l'oligarchie mafieuse qui est en train de mener ce pays àu désastre

on verra bien s'il saura réprimer -et à quel prix- les prochaines émeutes

la soudaine recrudescence des atteintes aux droits fondamentaux , ainsi que le sentiment d'impunité, dans ce pays, ne trompe pas:t le MI et les mafieux savent reconnaître les leurs
Pas de nahdhaouis , même dans des postes secondaires
Angel
| 22-01-2015 16:41
UN GOUVERNEMENT DE PETITE COALITION
Bourguibiste nationaliste |21-01-2015 13:55
Il faut aller vers un gouvernement de petite coalition qui inclut Nidaa, Afek et pourquoi pas Masar, et peut-être quelques membres du FP. Pas plus. Cette petite coalition doit exclure toute présence islamiste ni dans les postes ni même à des postes mineurs.
ineurs.
Un gouvernement Politique restreint répond aux exigences de la période
tounsia2
| 22-01-2015 16:27
@kameleon78 |22-01-2015 13:30

Je suis d'accord avec vous concernant la responsabilité du FP dans cette crise, toutefois je ne partage pas votre point de vue concernant la coalition entre nidaa et Ennahdha qui serait à mon avis plutôt déstabilisante pour le prochain gouvernement puisqu'il sera toujours sous la menace du bloc d'Ennahdha qui pourra le faire tomber au grès de ses humeurs et de ses combines ; cela s'est justement passé au Liban lorsque les ministres de Hezbollah ont fait une démission collective entraînant la chute du gouvernement. A mon avis, le mieux pour Nidaa est de former un gouvernement POLITIQUE restreint avec 51% seulement s'il le faut, pour ne pas être sous la pression de n'importe quelle sensibilité et pouvoir ainsi réaliser les programmes de réformes structurelles qu'il a promis; Je suis convaincue que Nidaa en a les moyens et peut le faire ; Par ailleurs, toute forme de coalition avec le parti Ennahda qui n'a pas encore répondu des accusations (terrorisme et corruption) dont il fait l'objet, peut nuire gravement à la réputation du parti Nidaa qui est supposé privilégier la justice et la vérité avant de penser s'allier avec un parti qui a perdu sa crédibilité et qui a une mauvaise réputation. Ne dit on pas "dis moi avec qui tu fais équipe, je te dirais qui tu es ? !"
Psy-cause
Raad
| 22-01-2015 15:58
Le futur chef de gouvernement nous joue t 'il du Hitchcock, en ces temps difficile,ou l'ensemble des votons disent non à la participation du parti islamique "Ennahdha" au pouvoir.
La photo que BN nous met au dessus du titre on dit long
La lutte continue !
Héla
| 22-01-2015 15:54
Nida semble bien avoir tourné le dos aux seules forces capables d'appuyer valablement son gouvernement composé par ses membres et ceux de sa "propre famille politique", ces forces vives et effectives sont les mouvements sociaux et la société civile patriotique. Évidemment les pressions étrangères USA/EU et les vieux barons du RCD au sein de Nida préfèrent de loin une alliance Nida-Enahdha plutôt que l'appui sur ces forces populaires. Ce faisant, Nida non seulement se coupe d'une très grande partie de ses électrices et électeurs, mais encore Nida aura contribué à ce que la démocratie naissante soit avortée. Nous sommes très, très préoccupés (es) par le gouffre qui ne cesse de nous menacer depuis près de 4 ans. L'Histoire jugera alors Nida comme étant un reliquat du passé et un obstacle à un projet cohérent et effectif pour sauver la patrie en danger. La lutte continue!
Voie royale
kameleon78
| 22-01-2015 13:30
En refusant de gouverner avec Nidaa Tounès, le Front Populaire a laissé la voie royale à Nahda de former une majorité avec le parti de BCE. Pour des raisons bassement politiciennes, Hamma Hammami porte la responsabilité de cet échec de former une majorité à grande composante laïque regroupant le FP et Nidaa Tounès. Devant ce choix cornélien difficile, Habib Essid devra composer avec Nahda. Donc pour moi, ce n'est pas BCE qui a trahi ses électeurs mais c'est Hamma Hammami qui a poussé Nidaa dans la gueule du loup.
De quelle démocratie parle t on
HB
| 22-01-2015 12:54
Les tunisiens se sont dit près à vivre pleinement la démocratie mais semble t il pas la classe politique qui continue à mon avis à fonctionner comme avant. Qui dit démocratie dit élection qui dit election dit parti au pouvoir et parti comme opposition officielle et qu'est ce qui se passe en ce moment en Tunisie du n'importe quoi personne ne veut prendre ses responsabilités et tout le monde veut partager le gâteau et le population attend encore. La démocratie
Déception amère ....
HBM
| 22-01-2015 11:24
A faire suivre à Monsieur le Président BCE...
Monsieur le président,
Ne vendez pas votre âme au diable....
Nous vous avons suivis et voter pour vous et Nidaa Tounes parce que vous combattiez l'hégémonie et les la pensées rétrogrades d'Ennahdha...Nous vous avons fait confiance, nous avons cru en vous et vos promesses, ne nous décevez pas, ne laisser pas faire, nous ne voulons pas d'Ennahdha au gouvernement ...Ne dites pas que c'est n'est plus de votre ressort, ce serait renier votre parole...maintenant que vous êtes elu..."aprés moi le déluge!!!"
HBM.