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Tribunes
De l'urgence d'une discrimination positive au respect inconditionnel du mérite universitaire
22/06/2018 | 15:44
3 min
De l'urgence d'une discrimination positive au respect inconditionnel du mérite universitaire

Par SLim Khalbous


La décision du gouvernement de faire de la discrimination positive à l'orientation universitaire a été bien étudiée et réfléchie et se base sur le rapport d'une commission technique et pédagogique qui a travaillé durant plusieurs mois :

Voici des éléments de réponse factuels par rapport à certaines critiques ou inquiétudes :

- Le ministère n'a jamais parlé de filières nobles, mais des filières les plus demandées (statistiques effectuées sur les 5 dernières années, le choix est donc totalement objectif).

- Le choix des régions concernées par cette mesure a été fait en se basant sur les indices de développement du MDCI.

- Le taux de 8% correspond à 416 places sur les 5200 places les plus demandées dans les 30 établissements retenus (c'est donc une mesure d'ajustement pour assurer l'égalité des chances des tous meilleurs et cela ne touche en rien l'orientation des 51000 nouveaux bacheliers prévus)

-Dans les filières retenues il n'y a pas que médecine et ingéniorat, il y a aussi les filières en sciences humaines et sociales (gestion et droit...).

- Une opération transparente et informatisée: Techniquement la première itération se fera comme d'habitude sans quotas. Ex: si une Fac a 400 places elle recevra dès la 1ère itération 368 étudiants avec leur score habituel (92%).

- Une 2ème itération se fera pour les places quotas entre les meilleurs des zones défavorisées. Ex. Si la fac en question a reçu 4000 demandes le logiciel va éliminer les 368 reçus, et mettra en concurrence les demandeurs venants des zones défavorisées entre eux pour les 32 places qui restent à pourvoir. Supposons qu'il reste 2000 étudiants concernés, le programme retiendra les 32 meilleurs parmi eux. Et donc le niveau restera élevé et l'accès au mérite.

- Une 3ème itération est réalisée pour pourvoir les places libérées. Car probablement les 32 repêchés, déjà bons, ont obtenu une autre orientation qu'il faudra remettre en jeu. Et donc rien ne se perd.

- Juste à titre d'illustration un 15,70 ou 15,80 à Kasserine vaut largement un 16 obtenu à l'Ariana pour entrer dans une école d'ingénieur et il aura probablement encore plus de détermination pour réussir ... Pour certaines filières les différences se sont hélas accentuées ces dernières années: un élève à kasserine a 0,7% de chance d'accéder aux filières en question et celui de l'Ariana 25% ! Cela nous pousse à réfléchir à la l'urgence du développement régional, aux réformes éducationnelles cruciales pour notre pays, mais aussi et surtout à agir au plus vite...

- Le conseil des ministres dédié à l'ESRS a également validé une autre forme de discrimination positive. La possibilité donnée aux élèves ayant un talent particulier ou des compétences hors normes, surtout dans les disciplines basées sur la créativité, d'accéder aux filières correspondant à leur talent, même s'ils n'ont pas le score mathématique. Pour cette année, le ministère a retenu les filières suivantes : Musique, théâtre, journalisme, design, art et nouvelles technologies. Les élèves concernés déposent une demande justifiée et surtout soutenue par des preuves tangibles (oeuvres, concours, certification, créations exposées, articles publiés....), la commission d'orientation jugera s'ils sont éligibles ou pas à passer le test d'entrée à la filière demandée, et si c'est le cas, le candidat passera le test devant le jury expert de la discipline qui confirmera ou pas la réalité de ce talent exceptionnel.

- C'est donc une première tentative louable pour concrétiser la discrimination positive inscrite dans notre constitution, une évaluation scientique sera réalisée à la fin de l'année pour ajuster si besoin.

- Enfin, la réforme complète et intégrale de l'université, qui est la solution définitive, reste toujours d'actualité et avance convenablement mais cela prendra plus de temps...

Toute mesure de discrimination positive à vocation à disparaitre à moyen terme.

22/06/2018 | 15:44
3 min
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Commentaires (4)

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Nouri Kamoun
| 25-06-2018 11:58
Votre raisonnement peut mener très loin
Quand vous écrivez
« « un 15,70 ou 15,80 à Kasserine vaut largement un 16 obtenu à l'Ariana « «
et que vous indiquez que ce que vous avez décidé
« « est donc une mesure d'ajustement pour assurer l'égalité des chances des '?'« « ,
permettez-moi , Monsieur Le Ministre de vous faire remarquer que suivant vos arguments , l'ajustement devrait alors commencer par assurer l'égalité des chances dans la réussite au Bac. Et là vos arguments sont aussi valables, vous auriez pu dire aussi
« « un 9,70 ou 9,80 à Kasserine vaut largement un 10 obtenu à l'Ariana « « et donc c'était beaucoup plus facile de multiplier toutes les moyennes par le bon coefficient ( autour de 1.03) et ainsi :
- avoir plus de réussis dans les régions concernées et ainsi faire bénéficier de la discrimination positive tous les candidats au bac et non seulement les meilleurs ce qui serait plus juste .
- Ne plus avoir besoin de faire beaucoup d'itérations dans l'orientation (si la différence ne dépasse pas effectivement 0.3 de moyenne comme vous l'avez mentionné dans votre illustration !)

Non Monsieur Le Ministre, avec cette décision, c'est un profond sentiment d'injustice que vous allez provoquer chez beaucoup de bacheliers. Une illustration : Le brillant fils d'un ouvrier habitant dans un quartier populaire d'Ariana et dont le score ne lui permettrait que d'avoir une place parmi les 416 places que vous allez réserver aux régions défavorisées vous dira un jour les yeux dans les yeux :

Vous m'avez détruit, vous m'avez volé la place que je mérite. En quoi moi avec mes conditions sociales difficiles j'aurai pris la place de quiconque ? Par votre décision ma place est allée au fils d'un haut cadre très aisé habitant Kasserine ou ailleurs alors que j'ai un point de moyenne plus que lui. Est-ce cela la justice pour vous ? Qui a empêché votre gouvernement d'étudier les raisons profondes des résultats faibles dans certaines régions et de prendre les mesures nécessaires pour les améliorer? Sûrement ce n'est pas moi !

Décidément, votre commission pédagogique et votre conseil de ministres manquent clairement de contradicteurs pour vous persuader de la gravité de certaines décisions.

Ali Baba au Rhum
| 25-06-2018 09:33
Un sujet épineux entre tous; en Inde la discrimination positive dans les universités en faveur des basses castes et des minorités a mené à une véritable guerre sociale et à l'arrivée au pouvoir des fascistes hindous . En Tunisie il me semble que le problème des inégalités régionales doive être traité d'une manière plus subtile, peut être en instaurant non plus un baccalauréat national, mais mais plusieurs épreuves régionales. Mais cela n'est pas suffisant. Il faudrait pour les filières les plus demandées instaurer des concours d'entrée pour chaque université , les candidatures retenues étant en fonction des résultats du baccalauréat, comme cela se fait au Maroc. Quoiqu'il en soit le plus important est que le Ministère réalise enfin que la formule actuelle, débutée il y a près de 40 ans, celle des filières d'orientation décidées " par l'ordinateur " en fonction du classement national au baccalauréat, n'est ni juste, ni garante de la qualité de la formation des lauréats .

Professeur
| 23-06-2018 09:58
Ce ministre est une honte pour la Tunisie et ses enseignants chercheurs!!..

De la politique de basse cour pour cacher l'effondrement du système de l'enseignement supérieur tunisien et l'exode des ses élites.

Continuez a faire de la décision d'autosatisfaction en sacrifiant des dizaines de milliers de nos jeunes dans un système producteur de chômage et d'insatisfaction.

Slim Khalbous, un ministre de l'enseignement supérieur !!... qui peut le croire il y a quelques années pour le Consultant imitateur et le chercheur invisible ;-).

Rationnel
| 22-06-2018 16:09
La discrimination positive a échoué dans la plupart des pays. L'objectif de la discrimination positive est de donner plus de chances aux populations et régions délaissées. Le résultat de la discrimination positive est qu'elle va donner des chances a une minorité d'individus (une élite) de ces régions défavorisées qui vont par la suite rejoindre les régions plus prospères ou rejoindre la France ou le Canada comme c'est le cas de la majorité des médecins ou ingénieurs. Les régions défavorisées vont perdre encore plus de talents et les éléments les plus intelligents. La discrimination positive est un passeport pour l'élite des régions défavorisées pour leur faciliter la migration.

Si on veut aider les régions défavorisées le gouvernement doit leur fournir une infrastructure similaire (routes, hôpitaux, écoles, ..) a celle des régions favorisées et plus d'autonomie administrative et économique. La concentration de tous les services, fonctions et décisions a Tunis, Sousse ou Sfax font que l'élite n'a pas de choix que d'habiter ces îles de prospérités.