alexametrics
vendredi 29 mars 2024
Heure de Tunis : 08:10
Chroniques
Coq devant l'UTICA, poule mouillée devant l'UGTT
01/11/2017 | 15:59
3 min

 

Wided a osé ! Elle a brandi la menace ultime, celle de fermer toutes les entreprises en guise de contestation contre la Loi de finances telle que présentée par le gouvernement. Elle avait auparavant dit que l’UTICA se retirerait de l’Accord de Carthage si cette Loi de finances n’était pas révisée.

 

Le moins que l’on puisse dire c’est que Wided Bouchamaoui n’a pas l’habitude de faire ce genre de déclarations. Elle n’est pas coutumière de la menace et des déclarations tonitruantes, mais les choses semblent avoir atteint un niveau intolérable pour les entreprises et le vase a largement débordé. D’autant plus que parmi toutes les propositions de l’UTICA, rien ou presque n’a été retenu.

 

Il est vrai que cette menace est plus symbolique qu’autre chose. Il est difficile d’imaginer toutes les entreprises fermer d’un coup car ces entreprises doivent trouver de quoi payer leurs employés et leurs charges, elles.

Il est vrai aussi que cette menace ne s’accompagne pas d’un pouvoir de nuisance conséquent. Une simple grève des transporteurs d’hydrocarbures a plus d’impact sur l’opinion publique que les menaces de l’UTICA.

Cela n’a, évidemment, pas empêché les réactions aux propos de la patronne des patrons. A commencer par celle du toujours élégant Sami Tahri, secrétaire général adjoint de l’UGTT, qui s’est demandé si les fermetures d’entreprises concerneraient les « dépôts à torchons » et les « garages de bagnoles », faisant ainsi référence aux activités commerciales de la famille Bouchamaoui. Comme si l’UGTT était la mieux placée pour s’indigner des menaces et des chantages. C’est peut-être le fait de voir leur fonds de commerce menacé qui les fait réagir de la sorte.

 

Mais la réaction la plus scrutée est celle de l’exécutif, représenté par Youssef Chahed. Ce dernier s’est rebiffé et a déclaré que le gouvernement ne travaillait pas sous la menace. Il a aussi déclaré, en passant, que l’UTICA était un partenaire stratégique dans l’Accord de Carthage, le dialogue était toujours possible, et autres banalités sans importance.

Quoi qu’il en soit, le chef du gouvernement a refusé la menace. Une posture de vrai homme d’Etat qui mérite d’être saluée et qui rentre dans le cadre du rétablissement du prestige de l’Etat. Encore faut-il qu’il soit cohérent, et qu’il refuse la menace d’où qu’elle vienne. Ce qui n’est pas le cas.

Revenons à l’UGTT. La centrale syndicale a bien joué son coup en se posant comme le seul vrai protecteur politique de Youssef Chahed. La baliverne de l’unité nationale et les laïus du consensus ne résistent pas longtemps devant la réalité des faits et des chiffres. Donc, la seule « ceinture politique » dont dispose le chef du gouvernement lui est fournie par l’UGTT. Cette dernière se permet donc de dicter sa loi et de, non seulement menacer le gouvernement, mais en plus de lui assigner ses champs d’intervention.

Sans même remonter loin dans le temps et en s’épargnant le pénible exercice de l’inventaire des menaces de l’UGTT, il suffit de relire le dernier communiqué à propos de la Loi de finances. Une phrase cristallise tout le pouvoir de l’UGTT et illustre l’incapacité du gouvernement à rétorquer : « les entreprises publiques sont une ligne rouge ». Réponse du gouvernement : il n’y a pas de ligne rouge et on discute de tout avec l’UGTT. Admirez ici la fermeté et l’intransigeance du gouvernement qui « ne travaille pas sous la menace ». Le syndicat ajoute également qu’il n’est même pas question de revoir, de négocier ou même de reporter les augmentations de salaires, le gouvernement n’a encore rien dit –de concret s’entend- à ce propos. Inutile de rentrer dans le détail des autres décisions du syndicat que le gouvernement s’empressera d’exécuter sans broncher.

 

Donc, c’est bien de se montrer ferme, intransigeant, de fanfaronner et de tancer les uns et les autres. Toutefois, il faut être cohérent et avoir ces qualités avec tous les partenaires sociaux. Il faudrait tracer sa voie et la faire aboutir, n’en déplaise à ceux qui font des calculs de court terme. N’est-ce pas monsieur Chahed ?

01/11/2017 | 15:59
3 min
Suivez-nous

Commentaires (12)

Commenter

A4
| 02-11-2017 18:15
Et face à la secte des assassins, coq ou poule ?

Rationnel
| 02-11-2017 15:38
Excellent article. La réaction de Youssef Chahed révèle qui est vraiment le décideur dans le pays. L'UGTT est le donneur d'ordres et le gouvernement n'est qu'un sous-traitant.

Wided a osé et a ouvert la porte pour dénoncer les abus de l'UGTT qui vont mener le pays vers la banqueroute. Qui aura l'audace pour s'ériger contre ce monopole syndical devenu la plus grande force politique au pays.

khaloucha
| 02-11-2017 10:45
Business News serait le porte parole des patrons?rien n est plus évident et l article ci-dessus le prouve.Mais ce qui est difficile à comprendre c est cette haine maladive envers l UGTT et le silence total des méfaits des patrons sur l économie tunisienne à commencer par ceux de la patronne des patrons!!!!

amine
| 02-11-2017 10:38
Le sort des coqs c'est la marmite inévitablement.

Dream
| 01-11-2017 23:02
Certains membres *** de l'UTICA utilisent le PLF2018 comme prétexte afin de se débarrasser de Youssef Chehed en tant que Premier Ministre!

SAMIA
| 01-11-2017 21:02
Et leur consensus de merde avec Nahdha and Nida , nous avons raté une Occasion pour se débarrasser définitivement des islamistes comme en Egypte... c'est bien dommage !

BABA SANFOUR
| 01-11-2017 19:50
Cher ami
Je vous félicite pour cette admirable chronique!Vous avez eu le courage de critiquer,dénoncer toutes ces anomalies révoltantes et même pathétiques!
Vos propos sont sensés,argumentés et courageux!
Un courage que certains lâches,ignares et autres opportunistes pourraient qualifier de "témérité"!
@Quant à "l'épicier des chiffres",il se découvre une âme d'anarchiste pourfendeur de la bourgeoisie et défenseur de la prolétariat.
Et la meilleure,ce récidiviste se permet de vous donner,non pas son avis,mais, des leçons de journalisme!
Pourquoi récidiviste?:il a déjà tenté le coup avec Nizar!
L'épicier des chiffres est un génie qui sait tout!!!
Ps:pouvez-vous nous donner des nouvelles de la belle et talentueuse Ikhlas Latif?Cette requête s'adresse à Nizar.
Salutations,comme dirait l'autre!

HAtemC
| 01-11-2017 19:38
Vraiment pas fin du tout et même insultant quand on sait qu'il ferme son caquet face à l'UGTT ... mais là il s'est senti pousser des ailes pour affirmer son autorité ... les Tunisiens n'oublieront pas non plus sa tirade disproportionnée ... jouer les gros bras contre l'UTICA représenter par une femme et la poule mouillée face à l'UGTT représenter par des voyous avec de grandes gueules ...
C'est la mentalité zarabes qui ressort quand il s'agit d'affirmer sa force face à une femme ... c'est classique somme toute ... La misogynie basique ... HC

Momo
| 01-11-2017 17:53
En d'autres temps un certain leader n'a pas hésité à emprisonner tous les dirigeants de l'UGTT de l'époque, et ils avaient des gabarits beaucoup plus imposants que ceux d'aujourd'hui. Certains ont crié au scandale, mais finalement l'histoire lui a donné raison. Mais pour une décision pareille, il faut avoir des c****

Dr. Jamel Tazarki
| 01-11-2017 17:51
En Tunisie nous vivons sous la dictature du capital, la dictature de la bourgeoisie, nous subissons une "démocratie" bourgeoise, où quelques oligarques et la classe bourgeoise voudraient diriger les affaires du pays, soit directement soit de façon plus dissimulée à travers 1)une façade présentable (penser à Ennahdha et àNidaa Tounes, deux partis politiques purement oligarques) et 2)des menaces du genre "Elle [Madame Bouchamaoui] a brandi la menace ultime, celle de fermer toutes les entreprises en guise de contestation contre la Loi de finances telle que présentée par le gouvernement. Elle avait auparavant dit que l'UTICA se retirerait de l'Accord de Carthage si cette Loi de finances n'était pas révisée."

Face à notre "démocratie" bourgeoise il n'y a que notre UGTT qui ose protéger les droits de la masse prolétaire.

@Si Maroeun, vous écrivez:"Revenons à l'UGTT. La centrale syndicale a bien joué son coup en se posant comme le seul vrai protecteur politique de Youssef Chahed. La baliverne de l'unité nationale et les laïus du consensus ne résistent pas longtemps devant la réalité des faits et des chiffres. Donc, la seule « ceinture politique » dont dispose le chef du gouvernement lui est fournie par l'UGTT. Cette dernière se permet donc de dicter sa loi et de, non seulement menacer le gouvernement, mais en plus de lui assigner ses champs d'intervention." ===> Je désolé de vous le dire, mais c'est du n'importe quoi! Votre analyse est sans fondement! Ce n'est pas l'UGTT seule qui décide de l'avenir politique de Mr. Youssef Chehed! Comprenez enfin, Si Marouen, que Mr. Youssef Chehed a une politique dont le fondement est plutôt sociale, alors que Mr. Essid pratiquait une politique oligarque! Et si Mr. Youssef Chehed est pour une augmentation salariale, c'est plutôt par conviction et non pas par opportunisme afin de plaire à l'UGTT!


Je termine mon commentaire par une citation de notre adorable journaliste Mr. Houcine Ben Achour: "La ferme position de Wided Bouchamaoui contre le projet de loi de finances du gouvernement n'est pas aussi sans logique politique. A moins d'un an du congrès de l'organisation patronale, sa présidente a besoin de présenter à sa base un bilan honorable de son mandat [afin d'être réélue]."