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Ces défaillances qui minent la lutte contre le financement du terrorisme
20/11/2017 | 19:59
4 min
Ces défaillances qui minent la lutte contre le financement du terrorisme

Lors de sa plénière qui a eu lieu en novembre 2017, au Luxembourg, le Groupe d’action financière (« GAFI ») a émis une circulaire dans laquelle il pointe les défaillances stratégiques dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme en Tunisie. Qu’elles sont ces défaillances ? Et quel crédit peut-on accorder au GAFI qui place la Tunisie, la Syrie et l’Iraq dans la même liste ?

 

Quelques jours seulement avant la parution de la circulaire du GAFI du 8 novembre, un conseil ministériel restreint (CMR), s’est tenu pour évaluer le système national pour la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme ainsi que les moyens susceptibles de développer l’action dans ce domaine. Le résultat auquel est arrivé le CMR, présidé par le chef du gouvernement Youssef Chahed, est le suivant : il faut impérativement accélérer la réalisation de la loi sur la cybercriminalité et œuvrer en collaboration avec l’INS pour mettre en place un système global des statistiques concernant les jugements et les biens confisqués à partir des crimes de blanchiment d’argent et de terrorisme.

Le CMR a en outre, demandé l’amendement de la loi relative au registre du commerce, outre l’accélération de la proclamation d’un décret gouvernemental pour le gel des biens et des organisations liés au financement du terrorisme.

 

La circulaire du GAFI, qui tombe seulement 5 jours après la tenue du conseil ministériel, met en évidence 5 dysfonctionnements au sein du service de renseignement financier tunisien, formé à l’issue e la loi organique n° 2015-26 du 7 août 2015. Selon le Groupe d’Action Financière, la CTAF (commission tunisienne des analyses financières) doit impérativement et dans les plus brefs délais faire l’implémentation de l’AML (Anti-Money Laundering). Une pratique mise en place par le Fonds Monétaire International (FMI) et qui vise à bloquer tout financement au terrorisme.

La CTAF devra, en outre, réaliser une mise à jour fréquente du registre de commerce et  développer le système de sanctions pour plus de transparence. Dans la circulaire, il est aussi recommandé de chercher à augmenter l’efficacité de la détection des transactions financières douteuses, d’établir un régime de sanctions et monitorage du secteur associatif et enfin d’intégrer le régime de sanctions à l’encontre des pays qui développent des armes de destruction massive tel que la Corée du Nord.

Il est clair qu’entre les recommandations du CMR et ceux du Groupe d’Action Financière, basé à Paris, la différence est grande. Il est clair également que, pendant ces deux dernières années, la Tunisie a réussi tant bien que mal à contrecarrer les attentats terroristes planifiés sur son territoire. Chose que d’autres pays, plus au nord, n’ont pas réussi à faire.

 

Cette bonne gestion du risque, la Tunisie y est arrivée malgré le peu de moyens dont dispose la CTAF (commission tunisienne des analyses financières). Une dizaine d’experts, travaillent aujourd’hui au siège de la Banque Centrale et se basent, au niveau opérationnel, sur des soupçons pour débuter leurs enquêtes. Des soupçons qui sont émis par l’ensemble des opérateurs monétaires et financiers : établissements de crédit, de micro-finance, la Poste, intermédiaires en bourse, assurances, avocats, notaires, bijoutiers. Et c’est là, une des limites du système de la commission qui s’appuie essentiellement sur des déclarations de soupçons faites sur une base « volontaire ». Le service ne peut donc, en théorie, pas être au courant des transferts de capitaux dont peuvent bénéficier les personnes physiques et les associations. Aussi, et dans son rapport datant d’avril 2017, la CTAF a su mettre en évidence deux principaux vecteurs de transfert de capitaux utilisés par les groupes terroristes. Le premiers est l’or et les pierres précieuses le deuxième est les biens immobiliers. D’après le document de 250 pages, ces moyens de payements transiteraient par des associations, des sociétés de commerce international et des banques.

 

Avec le début du printemps arabe, l’on se souvient tous, du départ massif de jeunes Tunisiens et Tunisiennes pour le djihad en Syrie. Ces jeunes, dont la grande majorité est issue de quartiers défavorisés, ont été mobilisés entre autre par des associations caritatives qui opéraient dans leurs quartiers. Officiellement, ces associations étaient là pour aider les pauvres gens mais malheureusement, elles ont fait tout le contraire. Depuis lors, beaucoup d’enquêtes ont été menées en Tunisie et ailleurs pour décortiquer cette guerre qui a fait jusqu’à aujourd’hui plus de 400 mille morts et une dizaine de millions de déplacés. Toutes ces investigations faisaient revenir la même liste de pays ayant participé activement au carnage. Le Qatar est en tête de liste. Une situation peut commode pour ses alliés qui lui ont aujourd’hui tourné le dos et lui imposent un embargo des plus sévères.

 

Avec la perte de vitesse importante de l’organisation terroriste Daech, causée essentiellement par l’intervention russe en Syrie, et la résistance accrue des services de sécurité tunisiens, l’organisation perd pied et ces cellules présentes dans de nombreux pays dans le monde en sont à commettre des attentats isolés avec des moyens matériels contenus. Lorsqu’il s’agit de sécurité nationale, chaque pays a ses méthodes. Le Groupe d’action financière a, néanmoins en ce mois de novembre 2017, formulé ses recommandations pour la Tunisie, reste à savoir si les autorités suivront ses « précieux » conseils.

 

 

 

20/11/2017 | 19:59
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